Les DMFC (Direct Methanol Fuel
Cell) sont un type de pile à part: à la différence des autres piles
où l'hydrogène est oxydé à l'anode, elles sont alimentées directement
en méthanol. Le méthanol est en effet l'un des rares réactifs avec
l'hydrogène (ainsi que le glycol, l'ammoniac ou l'hydrazine) qui ait
des caractéristiques d'oxydation suffisamment intéressantes pour pouvoir
être utilisé dans les piles à combustible fonctionnant à basse ou moyenne
température. C'est un type de pile relativement nouveau et de nombreuses
et significatives améliorations ont déjà été réalisées ces dernières
années au niveau du coeur de pile (densité, puissance, rendement, durée
de vie).
L'avantage décisif par rapport aux PEMFC est le fait qu'elles fonctionnent
directement au méthanol, un carburant certes toxique, mais liquide à
température normale, actuellement produit à partir de gaz naturel, (c'est
aussi possible à partir de pétrole, du charbon ou de biomasse) et qui
pourrait bénéficier de l'infrastructure existante pour l'essence. On
se dispense ainsi du problème du reformage et/ou du stockage de l'hydrogène
Caractéristiques des piles DMFC
Les réactions
Principe de la DMFC
Le combustible est un mélange
d'eau et de méthanol, il réagit directement à l'anode selon:
La température d'ébullition du
méthanol à la pression atmosphérique est assez basse (65°C), cela nécessite
donc une température de fonctionnement autour de 60-70°C (pour éviter
une pression de vapeur trop élevée). Le mécanisme réactionnel est beaucoup
plus complexe avec l'apparition d'espèces adsorbées ainsi que de HCOH
et HCOOH. Si on considère cette réaction sur un catalyseur Pt/Ru,
elle peut être représentée avec les étapes suivantes:
Les composés PtCOH, PtCO sont
des poisons pour le Platine, l'adjonction de ruthenium permet d'y
remédier.
A cette réaction électrochimique
correspond un potentiel anodique Ea = 0,016 V. Du côté de
la cathode, l'oxygène de l'air est oxydé selon:
Le potentiel cathodique est: Ec = 1,23 V. Au total, la réaction
est:
Cela correspond à une fem de 1,21
V dans les conditions standard (à 25°C sous 1 bar). Théoriquement, on
pourrait atteindre un rendement de 96,7 %. Cependant ce rendement est
limité:
-
d'une part, par le fait que
la réaction d'oxydation n'est pas toujours complète: on peut
avoir formation d'acide formique (HCOOH) ou d'aldéhyde formique
(HCOH), d'où un rendement faradique inférieur à 1,
-
d'autre part, les potentiels
d'électrode sont très différents de la théorie en raison de surtensions
importantes (autour de 0,3V à l'anode et 0,4V à la cathode).
On assiste aussi à l'empoisonnement des électrodes avec les produits
intermédiaires des réactions (HCCOH, ...).
Au niveau des électrodes, les seuls
catalyseurs suffisamment actifs pour oxyder le méthanol et stables à
60°C sont essentiellement des alliages métalliques à base de platine
(Pt-Sn, Pt-Re, Pt-Ru). Le même problème de coût qu'avec les PEMFC se
pose donc, d'autant que les densités surfaciques de courant sont
faibles (150 à 250 mW/cm2) et que les quantités de
platine sont importantes (2 mg/cm2) (en raison
de la plus faible réactivité du méthanol en comparaison à l'hydrogène).
Des travaux sont donc réalisés sur de nouveaux alliages à base de platine
et de nouvelles structures pour les électrodes, par exemple à l'Institute
of Transportation Studies, (University of California-Davis) est mené
un projet "Catalysts for Direct Methanol Fuel Cells". Un autre axe de
recherche est l'augmentation de la température de fonctionnement à 150°C.
La membrane
L'électrolyte de ce type de pile
est de type acide, soit une membrane polymère, soit un électrolyte liquide.
Avec un électrolyte alcalin, le CO2 produit par l'oxydation
du méthanol réagirait avec les ions hydroxyde. On utilise surtout des
membranes comme pour les piles PEMFC.
Un autre problème vient de la perméation
du méthanol à travers la membrane vers la cathode et son oxydation avec
l'oxygène en dioxyde de carbone et eau (sans fournir de courant). Ce
phénomène se nomme le "cross over" et c'est une perte de combustible
estimée à 10%. Une solution pourrait venir de membranes plus étanches
au méthanol tout en ayant une conductivité ionique acceptable. Si des
progrès importants ont été faits permettant de réduire considérablement
la perméation du méthanol, ils ont pour conséquence une augmentation
de la résistance des membranes et une hausse des coûts. Energy
Visionss Inc. (EVI, ex Energy Ventures), un fabricant de DMFC, a
développé une technologie pour récupérer le méthanol et éviter cette
réaction: en fait les produits et impuretés seraient éliminés de façon
continue pendant le fonctionnement. Ceci est réalisé grâce à un électrolyte
circulant : ce système permet ainsi d'assurer le contrôle des concentrations
des produits, du pH, de l'humidité et de la température de la pile.
EVI travaille également à la réduction de la quantité de catalyseur
dans les électrodes.
Autres caractéristiques
Les effluents de la pile contenant
du CO2 nécessitent l'épuration des gaz d'échappement par
traitement post catalytique avant leur rejet à l'atmosphère; il peut
ainsi être lavé par de l'eau obtenue par condensation de celle qui se
trouve dans l'oxygène ou l'air en sortie de pile.
Tout ceci ramène le rendement autour
de 20%, rendement faible dont la DMFC a toujours souffert. Cependant,
grâce à sa faible température de fonctionnement elle peut démarrer rapidement
et répondre ainsi de façon satisfaisante aux changements de demande
de puissance.
Utilisation des piles DMFC
Ce type de pile reste intéressant,
bien qu'il pose encore certains problèmes techniques.
On pense surtout à ce type de pile pour les piles miniatures ou micro-piles:
rechargeur de téléphone portable, ordinateur, camescopes; ces piles
pourraient remplacer les piles "normales" dans les divers appareils
électriques...C'est le cas de sociétés comme Mechanical
Technology, Medis qui veulent développer
et commercialiser des micro-piles pour des portables ou des agendas
électroniques. La société DuPont
qui s'est alliée avec Mechanical Technology travaille aussi avec H Power Corporation
sur des piles de 100 à 1000 Watts. Manhattan Scientific
Inc. croit en la percée des DMFC dans ce domaine du portable avec
des performances Wh/kg 5 fois supérieures à celles des piles Li-Ion.
Un autre domaine est l'automobile
(toujours en tant qu'auxiliaire): Energy Visions Inc. (EVI) a ainsi
construit une DMFC d'une puissance de 300W pouvant servir de générateur
auxiliaire pour un véhicule militaire. Le but d'EVI est de tenter de
s'introduire sur le marché des petits véhicules (voiture de golf, motos)
voire des systèmes hybrides. On voit aussi apparaître des piles pour
les vélos électriques...
Sur le plan stationnaire, les DMFC
pourraient aussi avoir quelques applications mais limitées car elles
entrent en concurrence directe avec les PEMFC: on peut les voir comme
sources de secours pour des villages isolés. Dans ce même domaine, EVI
s'intéresse aussi à la recharge des batteries pour les militaires.