Les MCFC (Molten Carbonate Fuel Cell) ou piles à carbonates fondus font partie avec les SOFC des piles "haute température". Elles trouvent leur application dans la cogénération de moyenne à forte puissance, voire de production uniquement d'électricité. Leur développement a commencé plus récemment, elles sont donc considérées comme des piles de seconde génération.

Caractéristiques des piles MCFC     

L'électrolyte

L'électrolyte de ces piles est un mélange eutectique de carbonates de lithium et de potassium (Li2CO3K2CO3, 62% - 38%). Ces composés ont des propriétés très intéressantes telles une bonne conductivité ionique entre 600 et 700°C, un point de fusion assez bas et leur non toxicité. La température de fonctionnement se situe entre 600 et 660°C. Les carbonates sont maintenus dans une matrice en aluminate de lithium (Li AlO2). Son épaisseur est de l'ordre de 400 nm. A la différence des PAFC où l'électrolyte était maintenu par une matrice en PTFE, de tels matériaux n'existent pas à ce niveau de température. Il est nécessaire d'avoir une interface électrode-électrolyte stable: pour cela, le diamètre des pores de l'électrolyte est donc inférieur à celui des pores des électrodes pour éviter un noyage par l'électrolyte. Un des problèmes de ce type d'életrolyte vient de la corrosion et de son évaporation. Un phénomène de "crossover" des gaz à travers la matrice peut avoir lieu mais il faut l'éviter car il provoque un échauffement et une dégradation des performances.

Les réactions aux électrodes

Dans ce type de pile, les ions traversant l'électrolyte sont les ions carbonates CO32-. A l'anode, la réaction d'oxydation est:

Dans le cas où l'hydrogène est produit par réformage à partir d'un autre dérivé hydrocarboné, du monoxyde de carbone est aussi présent dans le reformat, cette réaction prend alors la forme suivante:

A la cathode, la réaction électrochimique devient:

La réaction bilan devient donc devient (dans le cas de l'hydrogène à l'anode):

Les ions carbonate mais aussi le CO2 prennent part aux réactions, ce qui explique pourquoi ce type de pile peut être alimenté avec des carburants comme le méthane, mais aussi le méthanol, le biogaz, voire le charbon gazéifié. Par ailleurs, le CO2 produit à l'anode doit être recyclé pour être utilisé à la cathode. On a principalement deux méthodes pour amener le CO2 à la cathode.

  • Brûler les gaz de l'anode avec un excès d'air,
  • Utiliser un "product exchange device" pour séparer le CO2 des gaz de l'anode et le transférer à la cathode.

La fem de la pile dépend donc d'une part des concentrations en oxygène, hydrogène et eau, mais aussi des concentrations en CO2 à l'anode et à la cathode; celles ci sont généralement différentes.

 

Les MCFC n'ont pas le problème de l'empoisonnement par le CO, mais elles ne supportent pas davantage que les autres piles le Soufre. Par ailleurs, on peut assister à des réactions parasites comme la réaction de Boudouard ou celle de méthanation, en particulier si on travaille à une pression supérieure à la pression atmosphèrique. C'est pourquoi la présence d'eau est bénéfique pour éviter la formation de C-graphite.

Les électrodes sont du type poreuses à gaz. En raison du niveau de la température, il n'est plus nécessaire d'utiliser du platine ou d'autres métaux précieux. On utilise généralement du nickel:
à l'anode, le nickel est sous forme réduite et généralement mélangé avec 2 à 10 % de chrome;
à la cathode, il est sous forme oxydée et mélangé avec des ions lithium.

Les plaques de connexion

Accolées aux électrodes se trouvent des plaques d'interconnexion dont les canaux permettent le contact des gaz avec les électrodes. Ces canaux se trouvent sur les deux faces des plaques et sont croisés. Ici encore, elles assument le double rôle de connexion électrique et de distribution des gaz jusqu'aux électrodes. Elles peuvent être réalisées avec divers aciers inoxydables ou d'alliages à base de nickel. Entre ces plaques se trouvent des joints d'étanchéité. Un des problèmes des MCFC réside dans la corrosion de ces plaques ou dans le manque d'étanchéité des joints.

Le reformage

En général, le reformage qui permet d'obtenir le mélange d'hydrogène et de monoxyde de carbone alimentant la pile est externe. Dans le cas de la MCFC, on peut également avoir d'autres configurations: celle du reformage interne qui est particulièrement appropriée pour les piles haute température. Avec la technique du Reformage Interne, on utilise la chaleur directement dans la pile au niveau des réactions électrochimiques.

Reformage externe

Reformage interne

Par rapport aux autres piles, les MCFC ont de nombreux avantages, en particulier:

  • un rendement électrique élevé (60%),
  • l'utilisation de la chaleur produite pour de la cogénération, voire le réformage interne ou un couplage avec une turbine,
  • la possibilité d'utiliser des carburants comme le méthane, le méthanol, l'éthanol ou le charbon gazéifié..,
  • l'utilisation de métaux non précieux pour les électrodes.

Les difficultés majeures de ce type de pile sont d'ordre technologique. En effet fonctionnant dans un milieu très corrosif à température assez élevée, on rencontre des problèmes de corrosion de l'oxyde de nickel par l'électrolyte. Des métaux plus résistants sont recherchés pour remplacer l'oxyde de nickel. Il se pose également des problèmes d'étanchéité des cellules sur ce type de pile.

Fabricants de MCFC     

Les constructeurs de ce type de piles sont présents au Japon, aux USA et en Europe. D'où la présence de prototypes d'essai dans ces trois régions.
En Europe, trois entreprises se sont engagées dans cette filière: il s'agit de l'italien Ansaldo, des neerlandais ECN/BCN et de l'allemand MTU Friedrichshafen. Ce dernier est connu par son concept du Hot Module, réalisé en partenariat avec d'autres entreprises dans le cadre du European Direct Fuel Cell Consortium (ARGE DFC) et rassemble outre MTU: Ruhrgas AG, Haldor Topsoe Inc., Elkraft A.m.b.A. et RWE AG. Ansaldo a réalisé deux installations de 100 kW à Milan et Iberdrola (Espagne) et projette de commercialiser une série de modules de 500 kW ("Series 500") pouvant être assemblés pour créer des installations de plusieurs MW.
Au Japon, plusieurs entreprises se sont investies dans la construction de prototypes: Hitachi, IHI, MELCO. L'installation de Kawagoe, partenariat entre Hitachi et IHI, a une puissance 1 MW: il s'agit de 4 modules de 250 kW, deux par entreprise, alimentés au LNG. Elle a atteint un rendement électrique de 45% pour une durée de vie de 5000 h.
Aux USA, les firmes Fuel Cell Energy (ex ERC) et MCPower travaillent dans ce domaine. Il existe une application de 2MW en Californie à Santa Clara qui a fonctionné pendant 4000h. Un autre système de MCPower de 250 kW est utilisé en cogénération à Miramar.

Installation de Miramar

Application des MCFC     

Les applications de ce type de pile sont dans le stationnaire:

  • Production d'électricité avec des installations de type centrale électrique,
  • Cogénération pour des applications industrielles ou des bâtiments (Piscine, école, hôpitaux ..).

Toutes les piles installées dans le monde ont une puissance allant de quelques centaines de kW à plusieurs MW. Si les plus petites pourraient plus être dédiées à la cogénération pour des bâtiments, les plus grosses seraient utilisées pour la production centralisée de courant. Pour les applications de cogénération, le niveau de la température de la chaleur dépend de celui de la pile: il varie de 40 à 200°C pour ce type de pile. Il est aussi envisageable de les combiner avec une turbine pour améliorer le rendement.
Le rendement électrique de ces piles est élevé, cependant les MCFC ont besoin d'un ensemble d'auxiliaires dont la taille dépend directement de la taille de l'installation: pour cette raison, les plus grosses centrales bénéficient d'un meilleur rendement. Compte tenu de leurs caractéristiques, on estime que de nombreux progrès sont encore à faire en particulier du côté des matériaux. D'autant que les piles à carbonates fondus sont en concurrence avec les piles de type SOFC pour les applications stationnaires.