Les PEMFC (Proton Exchange Membrane
fuel Cell) sont actuellement le type de pile le plus étudié. Leurs
applications sont multiples autant dans le domaine automobile que dans
le domaine stationnaire et portable. Elles portent également d'autres
noms: SPEFC (Solid Polymer Electrolyte Fuel Cell), Solid Electrolyte
Fuel Cell ou encore Ion Exchange Membrane Fuel Cell (IEMFC).
Si elles sont si populaires par rapport aux autres types de piles, c'est
qu'elles présentent plusieurs avantages:
- elles ne sont pas sensibles au CO2 (comme
l'est l'AFC);
- leur faible température de fonctionnement,
permettant un démarrage rapide, une plus grande souplesse de fonctionnement
et une meilleure gestion thermique (moins de chaleur à évacuer);
- elles sont multi-usage (effets de synergie)
et couvrent un large spectre de puissance.
Cependant, elles présentent encore des problèmes
qui doivent être réglés:
- elles sont très sensibles au CO;
- leur faible température de fonctionnement
ne permet pas de bien valoriser la chaleur (notamment dans le cas
d'applications stationnaires);
- le catalyseur (Platine) coûte cher, de même
que les plaques bipolaires et la membrane.
Caractéristiques des PEMFC
Le coeur des piles de type PEMFC
est constitué d'une membrane (l'électrolyte), des électrodes, des plaques
de diffusion (backing) ainsi que des plaques bipolaires.
La PEMFC et ses composants
Membrane
L'une des caractéristiques essentielle
de chaque type de pile est son électrolyte. Pour les AFC, l'électrolyte
était liquide, ce qui entraînait soit la noyade des électrodes en cas
d'excès de celui-ci, soit leur assèchement en cas de fuite; pour les
piles PEMFC, l'électrolyte est une membrane polymère ionique de type
acide: en général, il s'agit d'une membrane perfluorée sur laquelle
sont greffés des groupements acides sulfonates SO3-
ou COOH. Le premier modèle qui reste aujourd'hui de référence est celui
de la firme Du Pont de Nemours:
le Nafion, mais des membranes sont actuellement aussi fabriquées
par d'autres concurrents: Asahi
Chemicals, Gore,
Dow
Chemicals.
Dans ce type d'électrolyte, les
ions négatifs sont retenus dans la structure de la membrane. Seuls les
ions hydrogène H+ sont mobiles et libres de transporter la
charge positive à travers la membrane, de l'anode vers la cathode et
c'est ce mouvement associé à la circulation des électrons qui est à
l'origine du courant produit. La conductivité ionique de la membrane
dépend de la température, de la concentration en groupe acide et et
de l'hydratation de la membrane: celle ci doit toujours rester saturée
d'eau pour permettre le déplacement des ions H+.
Structure de la membrane Nafion
Autre propriété de la membrane:
elle doit séparer efficacement les gaz: en effet tous sont susceptibles
de passer à travers, en particulier l'hydrogène qui est le plus petit
mais aussi l'azote ou l'oxygène. Il faut cependant éviter un court circuit
chimique (par ex.: une réaction entre l'hydrogène et l'air) ou une baisse
de rendement par dillution de l'hydrogène par l'azote.
Enfin, les électrons ne doivent pas pouvoir franchir la membrane.
Ces membranes fonctionnent à une
température entre 60 et 90°C et à des pressions entre 1 et
5 bars. Dans ces conditions, elles se montrent très stables et résistantes,
ce qui permettrait d'atteindre des durées de vie de 3000 à 4000h pour
les transports d'ici 2005. Au delà de ces températures, leurs performances
commencent à se dégrader.
Ces membranes ont une épaisseur
entre 50 et 200µm. Les surfaces nécessaires dans une pile sont
fonction de sa puissance; une pile de 30 kw doit posséder une surface
de membrane de l'ordre de 10 m2 (avec 0,5 A/cm2
à 0,7 V). Mais elles restent encore très chères, de l'ordre de 2000
à 3000F/m2 en raison de leur fabrication délicate: pour être
viables économiquement, il faudrait descendre au niveau de quelques
centaines de francs/m2.
Le fonctionnement de ces membranes
se révèle encore assez difficile en raison de la température de fonctionnement
et de la gestion de l'humidité.
A des températures supérieures à 90°C, les membranes ne retiennent
plus l'eau et peuvent donc plus assurer une migration convenable des
protons. Des recherches sont faites pour augmenter ces températures
de fonctionnement à des niveaux de 160 à 180°C, ce qui permettrait d'augmenter
l'activité des catalyseurs en platine des électrodes et d'éviter l'empoisonnement
de l'anode par le monoxyde de carbone. Par ailleurs, une température
plus élevée de fonctionnement permettrait aussi d'améliorer le rendement
thermique du système en permettant d'exploiter la chaleur des gaz en
sortie de pile comme avec un système de cogénération. Pour atteindre
des températures plus élevées, on pourrait faire travailler la membrane
sous pression, mais cela augmenterait la consommation des auxiliaires
et pourrait diminuer la durée de vie de la pile. Aussi s'oriente t on
davantage vers des membranes fonctionnant à 160 - 180°C mais à pression
ambiante et des recherches intensives portent sur de nouveaux matéraux
polymères pouvant remplacer le Nafion.
Une solution actuellement à l'étude par le CEA est celle des membranes
polyimides sulfonées, pouvant r6eacute;sister à de plus hautes températures.
Des résultats semblent montrer que ces membranes ont des performances
comparables à celles du Nafion.
La deuxième difficulté concerne
la gestion de l'eau: d'une part, la membrane doit être constamment
humidifiée (trop sèche, elle peut se rompre), ce qui impose que l'air
et le carburant soient suffisamment humidifiés pour maintenir la membrane
convenablement hydratée; mais d'autre part l'eau est un produit du fonctionnement
de la pile, elle doit donc être évacuée. L'influence de l'humidification
de la membrane se fait sentir aux densités de courant élevées: la tension
chute alors particulièrement pour une membrane sèche.
Les électrodes
Dans la PEMFC, les électrodes sont
à base de métaux précieux, surtout du platine, dont la teneur
est de 0,1 à 1 mg/cm2. Il est sous forme de très fines particules
sur du charbon actif à très grande surface spécifique. Les électrodes
doivent permettre de dissocier l'hydrogène et le transfert des protons
vers l'électrolyte.
Zone de triple contact
A l'anode, l'hydrogène diffuse
à travers le matériau jusqu'à ce qu'il rencontre une particule de platine.
Sous l'action du catalyseur, la molécule d'hydrogène se scinde en deux
atomes d'hydrogène. Ceux ci forment alors une liaison avec deux atomes
de platine, puis chacun se scinde en un électron et un proton H+
qui pourra alors traverser la membrane de l'anode vers la cathode.
Les réactions précédentes sont
celles en présence du catalyseur Platine: la première est une étape
longue d'adsorption et de dissociation.
A la cathode, on utilise
aussi des catalyseurs à base de platine. Le mécanisme de réaction est
là aussi assez complexe (étapes multiples).
Réaction dans la PEMFC
Bien qu'on utilise de l'air pour
simplifier le système, l'utilisation d'oxygène ou d'air enrichi
en oxygène permet d'améliorer sensiblement les performances de la
pile. Il reste à savoir si cette méthode qui est contrebalancée par
une complexification du système est globalement bénéfique ou non.
Bien qu'elles ne soient pas consommées
lors de la réaction, elles peuvent "s'user" par suite du frittage progressif
des particules de catalyseur. Lorsque la pile est alimentée en hydrogène
pur, il n'y a pas de problème; en revanche, il suffit de quelques
ppm de CO dans les gaz pour provoquer un empoisonnement des
sites actifs au niveau des électrodes, avec pour conséquence une chute
du potentiel. Le soufre est lui aussi un poison pour les
électrodes.
Influence du CO sur la caractéristique
"Tension-intensité surfacique"
De même que la membrane, les électrodes
sont chères en raison du platine dont le prix avoisine les 90F/g.
On cherche donc à diminuer les quantités de Pt utilisées: de gros progrès
ont été réalisés faisant passer la teneur de 4 mg/cm2 à 0,1
mg/cm2 mais il semblerait qu'on ne puisse pas diminuer encore
beaucoup cette teneur. Une solution possible serait de modifier l'architecture
des électrodes puisqu'il a été montré que seulement 20 à 30% de ce métal
est vraiment actif. L'autre possibilité consiste à faire fonctionner
les piles sous une pression plus élevée, mais avec des conséquences
sur la consommation du compresseur. Enfin, des recherches sont menées
sur des alliages à base de platine pour l'anode (platine/ruthénium,
platine/molybdène et platine/étain) qui fonctionneraient à des températures
plus élevées mais permettraient d'atteindre des tolérances de l'ordre
de 500 ppm de CO. A la cathode, les recherches sont orientées sur des
alliages à base de métaux tel le chrome, le nickel ou le molybdène.
Les Backings (plaques de diffusion)
Entourant les électrodes, ces Backings,
d'une épaisseur de 100 à 300 µm ont un double rôle:
- permettre la diffusion des gaz jusqu'aux électrodes,
- permettre le transfert des électrons de l'anode
vers la cathode.
Ils doivent donc être à la fois
conducteurs et poreux. De plus ils assurent un rôle essentiel dans la
gestion de l'eau en permettant à la fois qu'elle soit évacuée ou d'humidifier
la membrane.
La nature poreuse de ces supports permet aux gaz de diffuser, ce qui
leur permet, en se dispersant, d'entrer en contact avec la surface entière
de la membrane.
Les plaques bipolaires
Ces plaques sont souvent faites
avec du graphite haute densité, mais une autre possibilité est l'utilisation
de mousses métalliques. Elles servent à assurer la distribution des
gaz et l'évacuation de l'eau: pour cela, l'une des faces est parcourue
de micro-canaux de dimensions de l'ordre de 0,8 mm. Mais ce sont aussi
des collecteurs de courant. Les électrons produits par l'oxydation de
l'hydrogène traversent le support d'anode puis la plaque, passent par
le circuit extérieur et arrivent du côté de la cathode. Les éléments
EME (électrodes-membrane) sont accolés et connectés les uns aux autres
par l'intermédiaire de ces plaques, les plaques positives étant au contact
des plaques négatives. A ces plaques s'ajoutent deux plaques terminales
à chaque extrêmité de la pile.
Représentation d'une plaque avec des micro
canaux
Outre les contraintes au niveau
de la conductivité, elles doivent présenter une bonne stabilité face
aux réactifs, notamment par rapport à l'eau et aux acides ainsi qu'une
très faible perméabilité à l'hydrogène. Parallèlement, cet ensemble
doit être légèr afin de limiter le poids total de la pile. Par ailleurs,
les canaux dont dépendent les performances de la pile doivent être usinés
avec soin, d'où une fabrication délicate et des prix élevés. Les recherches
se portent donc sur l'utilisation de matériaux autres que le graphite
(inox, résines thermodurcissables) ainsi que sur la mise en place de
procédés de fabrication plus simples.
En résumé, les PEMFC ont de nombreux
avantages: outre un rendement pouvant aller jusque 60% pour la pile
et 40% pour le système, elles ont des densités de puissance maximales
de 1 W/cm2. Elles peuvent fonctionner à charge partielle
sans baisse (et même avec une hausse) du rendement. Le fait de fonctionner
à faible température permet d'atteindre une température de fonctionnement
en quelques minutes, donc un démarrage rapide. Le principal défaut de
ces piles est leur faible tolérance du CO, et leur coût encore élevé.
PEMFC
Du point de vue des coûts, ceux
ci se décomposent en trois parties à peu prè,s égales: membrane, électrodes
et plaques bipolaires.
Les applications des PEMFC
A la base, les PEM avaient été
développées pour des applications spatiales. En 1963, la firme General
Electric (GE) présentait un module de 1 kW. Ces travaux furent poursuivis
au milieu des années 80 avec United Technologies Corporation (UTC) et
appliquées au domaine spatial. C'est alors que Siemens développa des
PEMFC pour les sous marins (avec une license GE). Mais le véritable
démarrage de cette technologie eut lieu avec Ballard Power Systems en
1983: sur la base d'une membrane de DOW Chemical, l'entreprise se tourna
vers la réalisation d'une pile fonctionnant à base d'air et d'hydrogène
réformé.
Applications automobiles
Les PEMFC sont particulièrement
adaptées aux applications automobiles par:
- leur faible température de fonctionnement,
- leur "simplicité" de fabrication,
- leur adéquation avec la nécessité de nombreux
démarrages,
- leur meilleure réactivité,
- leur bon rendement aux puissances inférieures
à la puissance nominale.
En fait, on peut concevoir les
piles soit comme système principal de fourniture d'énergie pour un moteur
électrique, soit comme une APU (Auxiliairy Power Unit) fournissant l'électricité
nécessaire à des organes secondaires (air conditionné...).
Il existe actuellement de nombreux
prototypes de véhicules à pile avec une PEMFC. DaimlerChrysler
qui travaille en collaboration avec Ballard est la plus avancée dans
ce domaine: en 1994, elle construit son premier véhicule NECAR
(New Electric Car). Celui ci est suivi de 4 autres prototypes NECAR
II, III, IV et V: Necar II et Necar V fonctionnent au méthanol (vaporeformage),
les autres à l'hydrogène. Parallèlement, elle développe des bus et en
1997, elle présente le NEBUS (New Electric Bus) fonctionnant
à l'hydrogène. Ces bus ont été ou seront bientôt introduits un peu partout
dans le monde pour des tests en ville.
DaimlerChrysler n'est plus le seul
constructeur automobile à s'intéresser à ces piles pour les applications
automobiles. Les constructeurs du monde entier se sont engagés dans
cette voie: en France, PSA et Renault (allié à Nissan) avec respectivement
TaxiPac et FEVER, General Motors/Opel avec Hydrogen mis au point dans
le GAPC (Global Alternative Propulsion Center), Volkswagen avec le projet
CAPRI et plus récemment HY.POWER. Au Japon, on peut citer Toyota et
son FCH-V3, ainsi que Nissan. Aux USA, Ford a également mis au point
la P2000 et Ford focus FCH. En raison des spécificités des PEMFC, tous
ces prototypes fonctionnent soit à l'hydrogène (gazeux ou liquide),
soit au méthanol. L'utilisation d'autres carburants est tojujours d'actualité
avec l'utilisation d'un reformeur.
Si le carburant qui alimentera
la pile, de même que l'architecture exacte du véhicule restent des incertitudes,
la pile PEMFC reste pour ainsi dire la seule envisagée pour les applications
automobiles. Seules les piles SOFC pourraient être utilisées mais en
tant qu'APU (Auxiliairy Power Unit). Le système de traction à pile reste
actuellement trop lourd et encombrant par rapport à des moteurs thermiques.
Applications stationnaires
Du côté des applications stationnaires,
on trouve d'abord les applications strictement domestiques avec
des petites puissances de l'ordre de 1 à 5 kW. Aux avantages déjà cités
pour l'automobile s'ajoute celui de la modularité des piles PEMFC. Actuellement,
ce type de piles fait l'objet de nombreux tests car elles sont les seules
avec les SOFC à être pressenties pour ce type d'applications. Certains
constructeurs donnent des prognostics très optimistes: un marché de
4% des habitations individuelles aux USA, Vaillant le constructeur allemand
compte sur un marché de 100.000 PEMFC par an à partir de 2010. A ces
optimistes prévisions, il convient d'opposer le manque de données fiables
sur la durée de vie des piles, leur comportement dynamique, la diminution
des coûts avec l'augmentation de la production et l'effet d'une miniaturisation
du système sur les coûts.
A côté de ces applications de petite
taille viennent celles de cogénération pour les clients du type communes,
petites industries (10-20 kWel) jusqu'à la cogénération de moyenne puissance
(jusque 1 MWel). Pour les PEMFC de cette taille, les premières installations
en test (250 kWel à Berlin) ne permettent pas d'avoir un recul suffisant.
Applications portables
On ne peut pas oublier les applications
des nouvelles technologies avec portable, téléphone, agenda électronique.
De même que les DMFC dont elles ont les concurrentes directes, les PEMFC
ont un avenir dans cette voie, à condition toutefois de s'entendre sur
le carburant.
Enfin, un phénomène intéressant
mérite d'être cité: certaines entreprises proposent des packs éducatifs
pour le public ou les écoles avec des PEMFC.
Quelques constructeurs de PEMFC
Il existe de très nombreuses entreprises
développant ces piles. Avec l'intérêt croissant manifesté pour ce type
de pile, ce nombre est en augmentation, sans compter toutes les alliances
qui se créent avec les constructeurs automobiles, les énergéticiens,
les fabricants de composants de pile, les pétroliers.... Ci dessous
figurent les noms de quelques constructeurs avec leurs domaines d'intervention.
Avista
Labs, Ballard: automobile et stationnaire
(moyenne puissance), DAIS:
petites unités de 25, 125 W et 1kW, ElectroChem
Inc., Electro
Chem Technic: petites piles, Energy Partner
stationnaire jusque 10 kW, Hpower: stationnaire,
portable, éducative, H
Tec: modèles éducatifs, NEC:
micropiles, Nuvera
(DeNora + EPYX): stationnaire et automobile, Proton
Energy Systems: stationnaire, automobile et portable, Plug Power,
Vaillant: applications
stationnaires de petite puissance, Xcellsis:
automobile.