Le vendredi 21 septembre 2001, à 10h17, l'explosion du hangar 221 de l'usine AZF faisait trente morts et près de neuf mille blessés. Cette explosion a constitué la principale catastrophe industrielle survenue en France depuis la guerre.
Les circonstances de l'explosion restent encore à être élucidées.
Présentation de l'usine AZF :
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L'usine AZF se situe à environ 5 kilomètres du centre ville de Toulouse, sur une zone industrielle entourée de quartiers très peuplés : à moins de 1 kilomètre , on trouve hôpital, lycée, magasins, habitations... ainsi que rocade et route nationale. A 500 mètres environ d'AZF se situe la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs), qui produit entre autre chose le carburant de la fusée Ariane, et qui utilise des substances hautement dangereuses.
Etablissement de la Grande Paroisse , l'usine AZF, construite dans les années 1920, fabriquait des engrais azotés, commercialisés sous la marque AZF (AZote de France). Elle appartenait au groupe TotalFinaElf, et employait 450 salariés. |
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Circonstances de l'explosion
L'explosion est survenue dans un stockage de « nitrates d'ammonium déclassé » qui était autorisé pour 500 t et contenait 300 à 400 t de produit le jour de l'explosion. Les produits étaient « déclassés » à cause d'anomalies dans la granulométrie mais aussi dans la composition des produits. Le bâtiment de stockage était adjacent à une sacherie où des produits combustibles étaient stockés.
Cet ensemble de bâtiments n'était pas équipé de système de détection incendie. Pour le stockage, il n'y avait pas de détecteurs d'oxydes d'azote : le risque d'explosion était considéré par l'exploitant comme négligeable.
Les manutentions dans le local de stockage étaient effectuées par du personnel d'une société sous traitante TMG qui effectuait également la manutention des nitrates en sacs et sur palettes.
La veille de l'explosion, 15 à 20 t d'une fabrication d'ammonitrate avec un adjuvant en phase de qualification ont été amenés dans ce local. Le matin de l'explosion, des produits issus du conditionnement des ammonitrates et des ateliers de fabrication y ont été amenés.
L'explosion s'est produite à 10 h 17 dans le bâtiment de stockage, elle a provoqué la mort de 30 personnes dont 22 dans l'usine et 9 à l'extérieur, 2500 blessés dont une trentaine gravement.
L'explosion du nitrate d'ammonium même sensibilisé par la présence de certains produits (matières combustibles par exemple) nécessite une source d'énergie dont la nature n'est pas encore connue.
L'analyse des conséquences de cette explosion conduit à estimer que la puissance de celle-ci est comparable à celle de 20 à 40 tonnes de TNT , ce qui indique qu'entre 40 et 80 tonnes de nitrate d'ammonium auraient détonées.
Qu'est ce que le nitrate d'ammonium (NH 4 NO 3 ) ? d'après Gilles Peyrou, docteur en chimie
Le nitrate d'ammonium (NH4NO3) est utilisé dans la fabrication d'engrais.
La forme solide, aussi appelée ammonitrate est l'engrais azoté le plus utilisé en France. Tous ceux qui côtoient le monde agricole ont déjà vu ces sacs estampillés AZF et contenant les petits granulés sphériques de nitrate d'ammonium.
Le nitrate d'ammonium est préparé à une température de 160°C , sous une pression de 3 bars, par réaction entre l'acide nitrique (HNO 3 ) et le gaz ammoniac (NH 3 ). Le contrôle thermique de la réaction est impératif puisqu'au dessus de 195°C , le nitrate d'ammonium peut se décomposer avec explosion.
Le nitrate d'ammonium, tel qu'il était stocké à l'AZF, est un produit à l'état solide et stable dans les conditions normales de température et de pression.
Ainsi, il est très loin de l'instabilité caractérisée d'explosifs comme la nitroglycérine.
Il faut savoir cependant que le nitrate d'ammonium peut être utilisé comme explosif. Dans ce cas, il n'est pas employé seul : le mélange nitrate d'ammonium et fuel à 6% est l'explosif industriel le plus utilisé. L'amorçage de l'explosion est réalisé avec de la dynamite ! C'est l'explosif qui fut utilisé lors de l'attentat d'Oklahoma City aux Etats-Unis, le 19 avril 1995 (167 morts).
Une chose est sûre : dans des conditions normales, le nitrate d'ammonium ne peut pas exploser de lui-même.
Diverses hypothèses sont émises :
Explosion d'une unité de production voisine qui aurait amorcé la détonation de l'entrepôt de nitrate d'ammonium
Incident de manipulation dans l'entrepôt avec combustion voire explosion d'autres composés
Acte criminel par positionnement de charges explosives amorçant la détonation de tout le stock,
Infiltration du produit dans le sol et effet de fermentation sur un très long terme (le produit étant très avide d'eau). Ce n'est pourtant pas un produit organique car il ne contient pas de carbone (les produits organiques comme les matières végétales fermentent effectivement)
phénomène de vieillissement inconnu
Des accidents impliquant le nitrate d'ammonium se sont déjà produits par le passé à l'étranger et même en France. En voici quelques-uns uns :
21 septembre 1921 : usine de BASF à Oppau (Allemagne), explosion de 5400 t (600 morts)
16 avril 1947 : explosion de 2 bateaux à Texas City aux Etats-Unis (500 morts)
28 juillet 1947 : explosion d'un bateau à Brest (26 morts)
L'explosion de l'usine AZF n'aurait dégagé que de l'ammoniac (NH 3 ). Ce gaz irritant peut devenir dangereux pour l'appareil respiratoire mais il faut que la concentration dans l'air soit importante, ce qui n'a pas été visiblement le cas compte tenu de la dispersion atmosphérique due au vent.
L'explosion du nitrate d'ammonium peut aussi dégager des oxydes d'azote toxiques, mais d'eux, personne n'en a parlé.
Un accident grave impliquant la SNPE voisine (Société Nationale des Poudres et Explosifs) pourrait avoir des conséquences dramatiques sur les populations. En effet cette industrie utilise, entre autres, un réactif : le phosgène. Ce composé est un gaz dont l'émanation aurait une issue terrible. Il s'agit d'un gaz de combat qui était utilisé lors de la première guerre mondiale.
Conséquences matérielles de l'explosion :
Elle a provoqué la mort de nombreux membres du personnel (22 victimes, voir plus haut) et des dégâts matériels considérables dans toute la partie nord du site : destruction de certains réservoirs de solutions de nitrate d'ammonium et pollution de la Garonne avec des fuites d'acide nitrique.
Le réservoir de solution chaude de nitrate d'ammonium à 95 % a été endommagé mais sans provoquer de fuite.
Cependant, il n'y a pas eu de propagation aux autres stockages de nitrate d'ammonium , ni aux stockages d'ammoniac sous pression situés à 300 m de l'explosion, ni à celui d'ammoniac liquide situé à plus de 600 m . Le bâtiment abritant le stockage de chlore à plus de 500 m a subi des dégâts mais les wagons à l'intérieur n'ont pas été touchés. Ceux situés au sud du site à plus de 400 m , ont été protégés par certains bâtiments dont la structure a résisté à l'onde de choc.
"Si un wagon de chlore ou d'ammoniac s'était trouvé près de la zone où s'est produite l'explosion et avait été endommagé les effets du nuage auraient été d'autant plus meurtriers que l'explosion avait détruit les vitres dans un large périmètre autour du site."
La SNPE (Société Nationale des Poudres Explosives) a subit des dégâts notables dans ses installations générales et l'on doit déplorer des victimes, dont un mort (chute d'une porte métallique soufflée par l'explosion à 750 m de l'épicentre), dans son personnel. Toutefois, aucune installation technique n'a été endommagée, aucune fuite ne s'est produite. Les installations ont immédiatement bénéficié du fonctionnement de leurs automatismes de sécurité et les personnels ont pris les mesures de précaution prévues.
Du fait de son éloignement, TOLOCHIMIE n'a subi aucun dégât autre que quelques bris de fenêtres.
ISOCHEM , assez proche du point zéro de l'explosion, a subi des dégâts extérieurs mais ses installations techniques n'ont pas été endommagées.
Outre les très nombreuses victimes (voir plus haut), les dégâts matériels à l'extérieur du site sont considérables. Les effets du souffle ont provoqué la destruction des bâtiments les plus proches c'est à dire dans un rayon compris environ entre 400 et 700 mètres . Prenons par exemple le cas d'EDF-services Pyrénées-Gascogne, 99, route d'Espagne (services techniques, distribution, commerciaux) à 450 mètres d'AZF : les bâtiments ne sont plus utilisables, un mort, dix blessés graves, soixante blessés légers. Au lycée professionnel Galliéni, un peu plus loin, on déplore également un mort et le lycée doit être reconstruit.
De fait, au-delà de la distance par rapport à l'épicentre de l'explosion, il faut aussi prendre en compte la position des façades par rapport à ce dernier, la nature des matériaux de construction, la configuration des lieux qui sont autant d'éléments qui font varier l'ampleur des dégâts. Pour simplifier, disons que dans un rayon compris entre 700 et 1500 mètres ils sont la plupart du temps impressionnants : montants des fenêtres et des portes arrachés, toitures gravement endommagées, murs parfois fissurés. C'est ainsi qu'au 29 octobre, le nombre de familles ayant demandé à être relogées à un moment ou à un autre était de 1245 dont 591 dans le parc privé et 654 dans le parc public. Au-delà de 1500 mètres , ce sont la plupart du temps les vitres cassées qui sont les marques les plus voyantes du sinistre mais à 2300 mètres , la toiture en fibrociment d'un magasin (But) a été détruite à 75 %.
Sites :
http://pedagogie.ac-toulouse.fr/histgeo/monog/azf/azf.htm#2
http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/azf/2azf.htm#a2
http://www.univ-tlse2.fr/cieu/publications/azf.htm
http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=297
www.crepac.com/Hourtin-2002/calendrier/compte_rendu.asp
À
A qui profite l'attentat...ou son absence ?
Le Point , dans la foulée, met en cause la compagnie pétrolière française : « Une chose est sûre : la piste de l'attentat servirait les intérêts de TotalFinaElf ». Une fois encore, vous avez bien lu : pour le journal Le Point , dans l'affaire AZF, une (seule ?) chose est sûre. Le tout est de savoir pourquoi : « S'il s'agit d'un accident, Total devra payer une partie de la facture, qui s'élève à plusieurs milliards d'euros. Dans le cas d'une action terroriste, ce serait l'État. » Une seconde chose semble donc sûre, que le journal Le Point omet de mentionner : la piste du non-attentat servirait les intérêts de l'État, lequel est en charge de l'enquête. Notons, par ailleurs, que TotalFinaElf est probablement assurée.
http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/azf/2azf.htm#a2
Les moyens de communication
La plupart des institutions rencontrées s'est trouvé privé de moyens de communication notamment téléphoniques, dans les minutes qui ont suivi l'accident. Les seuls réseaux restés opérationnels ont été le réseau Rimbaud (réseau réservé aux autorité et services de l'état ), le réseau télématique, qui de fait a peu été utilisé, et les réseaux de radio télécommunication de la police, des sapeurs pompiers et des SMUR.
Par ailleurs l'ampleur de cet accident a entraîné une paralysie immédiate des réseaux et voies de communication terrestres rendant tout déplacement extrêmement difficile voire impossible. Seuls les moyens de locomotion à deux roues ont trouvé leur utilité.
L'ensemble des institutions ont fait part de leur constat d'isolement durant cette journée (au moins jusqu'à 17h), cet isolement pouvant se caractérisé par :
une absence d'information sur les causes de cet événement, source d'inquiétude et d'angoisse
l'absence d'information pour certaines d'entre elles quant à la conduite à tenir, face à la nécessité de prendre rapidement des décisions d'organisation pour répondre aux urgences, sans connaissance précise du schéma général d'organisation des secours.
La question des moyens de télécommunication a été essentielle. Plusieurs intervenants (cliniques, hôpitaux..) ont fait observé qu'il y a quelques années, ils étaient dotés de moyens de radiocommunication leur permettant notamment de se mettre en relation avec les services de secours (les sapeurs pompiers et les SMUR sont toujours dotés de ce type de moyens.)
Cette question, non spécifique aux services de santé, devra être abordée dans le cadre de l'organisation des soins à envisager en cas de catastrophe, tenant compte de l'ensemble des acteurs du système de santé.
Elle nécessitera de préciser les moyens de communication à mettre en place en dehors des moyens classiques, précisant leur destinataire, leur usage ainsi que leur intégration dans un schéma général.
Les médias
Les informations retransmises par les médias n'ont pas permis durant les premières heures de renseigner de façon objective sur la nature de cet événement; ces informations ayant même été perçues pour certaines d'entre elles comme contradictoires.
Ce constat est à relativiser, les médias s'étant eux mêmes retrouvés placés dans une situation analogue (coupure des communications, déplacements difficiles…). Mais il soulève néanmoins la question de la communication et de l'utilisation de ces moyens pour informer la population en temps réel.
La demande est d'avoir une information fiable et régulière sur les événements et leur évolution sous l'égide de la cellule de crise, et donc d'utiliser les moyens encore fonctionnels pour y parvenir.
La réquisition exclusive d'une chaîne de radio locale devrait pouvoir être prévue dans ces cas particuliers voire la réquisition de tout autre moyen de communication selon la nature de l'événement et de ses conséquences.