Interview d'un ornithologue du Parc du Marquenterre : Philippe Carruette
Philippe Carruette est ornithologue au Parc du Marquenterre depuis 18 ans, il répond ici à nos questions sur l'impact de la chasse aux oiseaux migrateurs sur l'environnement du Parc, dans une interview accordée le 21 mai 2005 à St Quentin-en-Tournmont (80)
Philippe Carruette estime que l’évolution des populations dans le Parc, qui reflète l’évolution internationale des populations, est plutôt positive depuis sa création en 1973. En ce qui concerne les espèces dont les effectifs sont tout de même en diminution, il tient à souligner que la chasse ne représente souvent qu’un facteur marginal, les causes les plus importantes étant les modifications de l’habitat liées aux nouvelles pratiques agricoles, et le changement des mentalités qui conduit l'homme à rejeter certaines espèces vivant près de lui.
Quelques espèces comme la barge à queue noire restent, selon lui, trop chassées, mais il se montre dans l’ensemble satisfait des dates de chasse actuelles, estimant pour sa part que la controverse est aujourd’hui quasiment terminée puisqu'elle ne porte plus que sur quelques points techniques. Enfin, il insiste sur le fait que la chasse ne doit pas être politisée et que l'unique solution au problème d'image des chasseurs réside dans une pratique exemplaire de leur activité et dans une communication positive auprès du public, afin de contrer la présentation caricaturale qui est souvent véhiculée dans les médias.
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Damien : En quoi consiste votre rôle d’ornithologue au sein du parc ?
PC : Je travaille au parc de Marquenterre depuis 18 ans. Donc ce parc, situé dans la baie de Somme, qui est un haut lieu de l’ornithologie française et haut lieu de la chasse. Moi j’ai pour rôle tout ce qui est suivi naturaliste, bagage des oiseaux, comptage, travail de terrain et tout ce qui est pédagogique, on n’a pas d’équipe scientifique, on n’a pas d’équipe pédagogique, c’est la même. L’ensemble des animateurs nature, l’ensemble des pédagogues qui sont sur le terrain sont chargés aussi de l’information, sont chargés d’abord de l’info du public mais aussi du suivi écologique qui fait que les visiteurs qui viennent sur le parc sont au courant au quotidien de ce qui se passe sur la réserve en direct. J’ai une mission aussi avec le reste de l’équipe de gestion de terrain : gestion des niveaux d’eau, gestion des pâturages, tout le travail de gestion sur le lieu au niveau écologique puisque le parc est géré principalement pour les oiseaux mais aussi pour les plantes, les insectes : donc tout est lié. Finalement on est assis sur un tabouret à trois pattes : la pédagogie, le suivi scientifique, et la gestion des milieux. Si une patte est pourrie, on se casse la figure.
Aurélien : On voulait savoir aussi si le parc avait un statut spécial au niveau européen ou autre…
PC : Tous les statuts que vous pouvez imaginer au niveau européen, il se les est pris au fil des années. C’est une politique très française, hein : généralement on rajoute des protections sur des sites qui sont déjà protégés. On est une propriété, euh, le terrain est une propriété du conservatoire du littoral donc on est une propriété du conservatoire du littoral. Tous les statuts de protection et d’inventaire européens on les a ( ZICO, ZPS, Natura 2000 bien entendu) et on est géré par le département, par le syndicat mixte d’aménagement de la côte picarde. Propriété d’Etat, gestion du département, et classement " réserve naturelle d’état " qui est le classement actuellement en France qui est le plus fort au niveau protection. Le parc fait 200 ha et l’ensemble de la réserve naturelle fait 3000 ha. C'est-à-dire qu’il y a le parc qui est la partie terrestre de la réserve naturelle et il y a une partie maritime qui fait 2800 ha qui est la partie nord de la baie de Somme, la baie de Somme faisant 7000 ha, 3000 en réserve et 4000 hors parc.
A : Et puisque vous êtes au parc depuis assez longtemps, quelle évolution avez-vous pu constater dans les populations d’oiseaux, est-ce que c’est plutôt à la hausse ou à la baisse ?
PC : Alors nous on est un micro lieu au niveau des oiseaux mais les évolutions des populations du site reflètent en partie l’évolution locale, régionale, mais aussi l’évolution internationale. Généralement, si une population augmente à l’échelle européenne, et si c’est une espèce qui fréquente le lieu, normalement, si on gère pas trop mal le site, on doit en bénéficier. C’est le cas de la spatule, les spatules blanches sont des grands échassiers avec le bec en cuillère : la population augmente au niveau européen, depuis l’année 2000, on a une vingtaine de couples de spatules qui nichent sur le site. Si les populations diminuent, on en a probablement les répercussions, les espèces comme les Gravelot à collier interrompu diminuent au niveau européen, bon là on sent cette diminution. Même si on est tout petit, on vit pas en dehors du temps et on vit pas en dehors des conjonctures internationales. Donc globalement, depuis que le parc existe, depuis 73, pour la majorité des espèces, on a vu une augmentation des espèces. L’effet réserve a permis cette augmentation des espèces. Il y a des grandes catégories, des grandes familles d’oiseaux qui se portent mieux que quand j’étais gamin, bon, j’ai commencé à observer les oiseaux, je devais avoir 7, 8 ans. Une des familles qui a le mieux prospéré, qui s’en est le mieux sortie, ce sont les grands échassiers, type hérons, aigrettes, spatules, tout ça a fortement augmenté au niveau international, grâce à la protection des espèces. Les hérons ont été protégés en France en 75. A l’époque il devait y avoir 2500, 3000 couples de hérons en France. Aujourd’hui on est plutôt à 45000, 50000 couples. Ils sont redevenus normaux. Les cigognes c’est pareil : en 79, il restait 11 couples de cigognes en France, aujourd’hui on en est à peu près à 700. Donc tout ça a augmenté. Les rapaces aussi. Globalement, quand j’étais gamin, observer une buse, ben c’était toujours un peu l’événement. Aujourd’hui les buses, on en voit pas mal. La majorité des effectifs de rapaces a augmenté. Il y en a quelques-unes qui ne sont pas en bonne situation mais ce sont des espèces très particulières comme l’aigle de Bonelli, mais les rapaces au sens large du terme sont plutôt plus abondants aujourd’hui qu’ils n’étaient autrefois. Et vous avez des espèces qui diminuent. Et globalement la majorité des espèces qui diminuent sont des espèces liées à l’agriculture. C’est très très net. Parce que le monde bouge, parce que l’agriculture bouge. En bien ou en mal, j’en sais rien. C’est une constatation, ce sont les agriculteurs qui le diront et les consommateurs aussi. Ca c’est très net. Il y a une partie des espèces qui est en train de diminuer, qui a été découverte par le muséum d’histoire naturelle de Paris : c’est les espèces communes, qui vivent autour des nids. Les hirondelles … Il y a 10 ans, il y avait des ornithologues anglais qui, bon on a beaucoup d’anglais qui viennent ici, qui viennent nous voir et nous disent : on a une diminution des moineaux. Moi ça me faisait marrer, les piafs, les moineaux… Je leur disais : " Ah c’est bon, on va vous en envoyer des colis parce qu’on en a pas mal. " Quand je vais en Angleterre maintenant il y a des régions où on voit quasiment plus de moineaux. Dans les villes et, surtout en ville, mais aussi même dans les villages, chez eux ça a très fortement diminué, de l’ordre dans certaines régions comme le Kent de 70, 80% des effectifs des moineaux. Chez nous, c’est 20% à Paris à peu près, 15 à 20%. Dans la région on n’a pas de diminution, on a encore une agriculture à peu près traditionnelle. Donc on voit que les espèces qui sont proches de l’homme, euh, que certaines espèces proches de l’homme sont en train de diminuer. Ca c’est assez inquiétant parce que c’est des indicateurs, comme toutes les espèces, et comme ils sont proches de nous, c’est des indicateurs peut-être d’un habitat qui devient trop aseptisé ou qui devient trop, trop banalisé et que même ces espèces-là ne peuvent plus trouver de quoi vivre. Ca c’est une autre catégorie d’espèces qui sont en train de diminuer.
François : Surtout à cause de l’habitat ?
PC : On ne sait pas trop. On sait que, par exemple dans le cas des hirondelles dans tous les villages des environs, la majorité des nids d’hirondelles que je vois, c’est déjà dans des fermes traditionnelles d’élevage, les bâtiments agricoles modernes, c’est pas un habitat favorable pour les hirondelles et puis aussi la majorité des nids d’hirondelle se trouvent chez des gens qui ont plus de 40 ans, qui acceptent d’avoir des nids dans leur bâtiment, dans leur menuiserie, des trucs comme ça, qui mettent un papier journal en dessous pour pas faire de crottes. Les jeunes couples qui ont des maisons modernes, il y a une hirondelle qui veut s’installer, paf ils bousillent le nid. Donc il y a aussi une évolution des mœurs : pour les gens plus âgés, une hirondelle ça porte bonheur, ça revient de migration, etc, pour les plus jeunes, le symbole n’est peut-être plus si fort ou si important. C’est un oiseau qui fait des crottes et qui emmerde le monde quoi. Mais aussi il y a des côtés un peu sociologiques, des côtés qui, euh, des mœurs qui évoluent et on s’intéresse de plus en plus à la nature mais on est peut-être de moins en moins tolérants face à des contraintes. On va pas aller jusque là mais c’est un peu comme l’histoire du loup, c’est un vrai problème de cohabitation avec l’homme. Aujourd’hui, la cohabitation elle est difficile mais on accepte de moins en moins le loup qui est une grosse contrainte pour les jeunes. Mais on veut le risque 0 partout, dans tous les domaines et, euh, le loup est un anti-risque 0, et comme l’animal ne doit avoir absolument, il doit avoir 0 maladie. Donc ça c’est impossible. Donc tout ce qui est espèce qui pose des problèmes, des contraintes, c’est difficile.
A : Pour quelques espèces dont vous avez parlé, quelques espèces de rapaces qui diminuent, ce ne sont pas des espèces chassables ; qu’en est-il pour les espèces chassables ?
PC : Alors c’est intéressant parce que la majorité des espèces qui diminuent en France sont des espèces non chassables, des espèces protégées qui ont un super tampon du ministère en disant, " on n’a pas le droit de leur faire du mal, on n’a pas le droit de les tuer, on n’a pas le droit de détruire leur habitat ", et puis ils diminuent quand même. C’est pas bien parce qu’on leur a dit qu’ils étaient protégés donc ils doivent prospérer. Donc c’est souvent des espèces qui sont protégées.
A : Et dans le cas d’espèces chassables qui diminuent aussi - il peut y en avoir aussi - quelle importance relative vous accordez aux différents facteurs donc en particulier la chasse, l’agriculture, la modification des habitats ?…
PC : Il est difficile de voir les pourcentages. Les espèces chassables qui diminuent, c’est quelques espèces de canard, il y a la sarcelle d’été, il y a le canard chipeau. Le canard chipeau a connu une période de prospérité où les effectifs ont fortement augmenté, aujourd’hui ils diminuent. Alors quelle est la part de la chasse et quelle est la part des disparitions d’habitat ? Pour la sarcelle d’été, la part de la chasse est très faible. Parce que la sarcelle d’été, à partir du mois de septembre, à partir du 15 septembre, vous en avez plus en France, elles sont parties, elles sont parties en Afrique de l’ouest. Donc les chasseurs en tuent en gros jusqu’à début septembre puis après c’est terminé, puisque maintenant la chasse ouvre globalement en août ; pour certains départements, ça ouvre en septembre mais la plupart du temps, le gibier d’eau, c’est une ouverture début août et une fermeture fin janvier. Donc c’est lié à la disparition des prairies humides, des habitats, on revient à l’élevage, aux éleveurs, le rôle des éleveurs est capital aujourd’hui en protection de la nature. Pour le canard chipeau, la part de la chasse est peut-être un peu plus importante, mais là aussi il y a une disparition des habitats, notamment c’est un oiseau qui aime bien aller nicher aussi dans des zones de marécages, des étangs avec des prairies humides aux alentours. Et puis il y a les échassiers, où là c’est pareil, il y a des espèces qui sont chassables qui sont très très sensibles aux modifications des habitats donc il y a certaines espèces en France qui a priori ne devraient plus être chassées comme la barge à queue noire, le combattant…
A : L’avocette n’est pas chassable ?
PC : non, c’est aussi protégé. En France, euh, généralement, la France chasse un certain nombre d’espèces de limicoles qui sont protégées dans le reste de l’Europe. Comme les barges, les courlis, les bécassines, tout ça c’est chassable en France. Mais si on regarde le statut de la barge à queue noire ou des combattants, les populations françaises sont très faibles : les barges à queue noire, il y a à peine 300 couples en France qui nichent, le combattant c’est moins de 10 couples, mais on n’est pas dans les aires de reproduction importantes de ces espèces-là : la France est un élément mineur au niveau de la reproduction de ces espèces-là. Par contre elle est un élément majeur dans la migration. Il y a énormément de barges à queue noire qui s’arrêtent en migration chez nous et une partie hiberne, quelques-unes hibernent sur le site.
A : Dans un autre domaine un petit peu, est-ce que les ornithologues du parc par exemple ont un rôle à jouer auprès des instances décisionnelles pour participer à la fixation des dates de chasse ?
PC : Non, non. Par nos données, par nos informations, par des comptages, tout ça, ça nous permet d’apporter des informations globales à la connaissance de la migration des oiseaux mais on n’est pas consulté particulièrement sur le parc… Sachant qu’aujourd’hui on est arrivé au niveau des dates d’ouverture à un statu quo qui est pas mal. Vous seriez venus deux ans auparavant j’aurais pas dit ça. On va prendre les cas extrêmes hein : notre département et certains autres en France ont fait une ouverture en bord de mer sur la côte début août et dans les marais intérieurs fin août et une fermeture fin janvier (je parle pour les oiseaux d’eau hein !). C’est marrant parce que les dates d’ouvertures posent problèmes sur les oiseaux d’eau : on ne parle pas des dates d’ouverture des perdrix, des lièvres, des sangliers, des chevreuils, c’est vraiment le cas particulier des oiseaux d’eau qui pose problème. C’est vrai pour plusieurs raisons parce qu’on a affaire à des oiseaux migrateurs donc qui appartiennent à toute l’Europe donc il y a aussi une pression de certains pays européens. On a affaire à beaucoup d’espèces, la France chasse 64 espèces d’oiseaux, par rapport aux autres pays européens c’est beaucoup plus… Je crois que le prochain après c’est la Finlande où c’est 51 puis après on descend tout de suite à des chiffres comme 20, 30. Donc on chasse beaucoup plus d’espèces que les autres pays européens. Puisqu’on est un site de migration. On est à mi-chemin entre les pays d’Europe du nord qui sont les pays " producteurs " d’oiseaux et les pays d’Europe du sud qui les reçoivent et l’Afrique bien sûr. Donc on est sur un lieu de passage. C’est sûr que les Finlandais ils vont pas chercher les barges à queue noire au mois de décembre. Il y a longtemps que les barges à queue noire sont soit en France, soit en Espagne soit en Italie soit en Afrique. Mais du fait qu’on est une plaque tournante de la migration on s’octroie le droit de chasser plus d’espèces que les autres pays européens. Mais aujourd’hui ces dates d’ouverture sont pas mal. Certains demanderaient peut-être des ouvertures un peu plus tardives au mois de septembre, c’est là où est la polémique. L’ouverture en août je trouve ça pas mal. Ca pourrait être un peu mieux, je préférerais que tout le monde ouvre au 15 août par exemple, aussi bien la côte que le marais. Au 15 août ou fin août mais bon, c’est pas mal. Par contre, la fermeture en février je trouve que ça a été très très bien. C’est vraiment quelque chose … que certains chasseurs … bon il y a des chasseurs qui acceptent moins mais globalement certains chasseurs se sont rendus compte que c’était intéressant. Parce que en février il y a des migrateurs qui remontent (pas tous hein, il y a beaucoup d’espèces qui remontent beaucoup plus tard, en mars, avril voire en mai, il y a beaucoup de petits échassiers qui remontent début mai) mais quand vous chassez en février, vous chassez la part d’oiseaux qui a passé l’hiver chez nous ou dans des pays aussi du niveau de l’Europe et vous chassez la part d’oiseaux qui a survécu à l’hivers, qui a survécu aux prédateurs, vous tapez dans le corps actif des futurs nicheurs. Tous ceux qui n’étaient pas dans le coup sont morts : morts durant la migration, durant la chasse d’automne, morts par les prédateurs, morts par les hivers froids. Donc ce qui reste en février ça va être notre capital, notre " cheptel " (si on parle comme un éleveur) qui va être les futurs reproducteurs. Donc normalement ça sera les meilleurs. Ceux qui restent, ce sont ceux qui ont du bol et qui sont les meilleurs, les plus résistants donc c’est pour ça que c’est dommage de prélever sur cette partie-là. Alors que quand vous chassez en juillet août vous chassez beaucoup de jeunes oiseaux dont normalement, une partie va mourir durant la migration, de fatigue, de faim, des prédateurs, de tout ce que vous voulez que la nature met en place pour " limiter " les populations et équilibrer les populations. Donc là une fermeture au 31 janvier c’est bien et ça serait dommage de revenir à l’ancien système.
D : On a entendu parler beaucoup dans la région du parti CPNT. Qu’est-ce qu’il en est aujourd’hui ? Maintenant je pense qu’il doit être moins revendicatif du fait de nouvelles dates qui conviennent mieux.
PC : Pour moi c’est un faux problème. Pour moi la chasse est pas politique, c’est un loisir. C’est une passion avec des gens souvent passionnés et je trouve que la politique n’a rien à faire là dedans. Je crois qu’il y a un problème sociologique, humain qui est très fort et qu’il faut prendre en compte parce que dans certaines régions de France comme la Somme, comme la baie de Somme ou comme le bassin d’Arcachon c’est vraiment sociologique : le week-end on va à la chasse, la nuit on va à la chasse à la hutte, c’est un loisir très fort, c’est un plaisir…J’allais pas dire que c’est un centre de vie mais c’est vraiment une passion donc il faut le prendre en compte, ça joue aussi un rôle économique qui n’est pas négligeable dans ces régions-là. Mais je trouve que la politique n’a pas, n’a pas à …
D : Mais c’est grâce à un parti politique qu’il y a eu la modification récente, non ? Avec les dates de chasse…
PC : je pense que, euh, le parti politique, j’ai pas vraiment regardé ce qu’il souhaitait mais il aurait tendance à fixer des dates plus, plus tardives hein, je pense que CPNT serait plus favorable à une chasse en février. Je crois que la politique n’est pas… Je pense que la politique a beaucoup plus à faire à résoudre des problèmes qui ne sont pas des loisirs au quotidien plutôt que de s’occuper de ces affaires. Même dans les villages quand je vois que, quand il y a des réunions électorales le sujet tourne sur la chasse alors qu’ils manquent de crèches, qu’ils manquent de tout, je crois que parfois il y a des femmes, même des femmes de chasseurs qui disent un peu ras le bol. Occupons-nous aussi des problèmes de nos villages, de la désertification rurale… La chasse c’est très bien, c’est un loisir rural qui est très fort dans notre région et qui est important mais donnons-lui sa juste place ; au sein du monde qui évolue, c’est un loisir qu’on doit reconnaître qui doit être exemplaire parce que chez nous on a beaucoup de touristes de toute l’Europe qui viennent et qui comprennent pas forcément ça. La première raison c’est que c’est pas leur culture. Les Scandinaves, le Belges ou les Hollandais ne sont pas des pays chasseurs, nous on est un plus un pays chasseur et puis vous descendez vers le sud vous avez affaire à des gens qui chassent. Et bien si on est exemplaire sur ce mode de chasse dans notre comportement, et bien on sera bien mieux compris et vous aurez des touristes qui viendront. Quand vous allez dans les Pyrénées et que vous voyez un type qui va chasser dans les Pyrénées l’isard et qui redescend de la montagne avec son isard sur le dos, ben il n’y a personne qui lui dit qu’il est un massacreur. Au contraire les gens lui disent : " Oh, vous avez passé toute la journée à crapahuter en montagne, vous avez descendu un isard. " C’est tout, il vous explique la chasse de l’isard puis que les populations sont en bonne santé. Chez nous ça devrait être pareil. Le gars qui revient de la hutte, il a tué 2 canards. Par contre, s’il a tué 15 canards dans la voiture ou s’il en a plein son sac, le jugement sera pas le même. Je crois que hormis les protecteurs des animaux au sens strict qui ne supportent pas que l’on tue les animaux, les gens ne sont pas contre la chasse. Ils sont contre une pratique qui n’a pas d’éthique. Donc globalement, heureusement la majorité des chasseurs a une éthique. Cette éthique il faut qu’ils la montrent et les brebis galeuses qui n’ont pas cette éthique, il vaut mieux qu’ils évitent. Parce que c’est un loisir qui pose un peu polémique parce qu’on tue. Si les chasseurs envoyaient, faisaient du flashball, je pense que la polémique serait moins forte. Et si les animaux ne saignaient pas, ce serait pareil. Regardez les pêcheurs, il n’y a pas cette polémique sur la pêche. Maintenant, les pêcheurs font pas mal de no-kill mais personne ne montre du doigt. L’effort doit venir aussi, si on veut que les gens acceptent la chasse, il faut qu’il y ait une éthique très forte parce que c’est un loisir qui n’est pas facile à accepter, notamment pour les pays anglo-saxons. Donc si on a une bonne éthique je crois que le public français notamment, mais même le public anglo-saxon est prêt à l’accepter.
A : Je reviens juste sur une question purement technique sur la migration. Vous avez parlé de la France comme plaque tournante de la migration. Comment ça se passe exactement la migration ? Quel est son rôle ?
PC : Il y a des livres entiers écrits là dessus. Globalement il y a deux migrations. Il y a la migration de printemps, la migration d’automne. La migration de printemps donc ce sont les oiseaux qui ont passé l’hivers globalement du Benelux jusqu’à l’Afrique du sud et qui remontent pour aller nicher sur les pays d’Europe du nord sur les pays où ils sont nés. Donc nous la France elle joue son rôle de plaque tournante de migration. Elle est aussi un pays où les oiseaux viennent nicher. Donc cette migration de printemps elle commence au plus tôt fin janvier. Et elle termine au plus tard vers le 15, 20 mai. Là on a une migration très tardive des limicoles. On a aussi beaucoup d’échassiers qui sont remontés très tard, jusqu’à maintenant. Comme ils nichent au cercle polaire, hors de question qu’ils arrivent là-haut début mai : il ferait encore trop froid. Donc ils vont arriver là-haut mi-mai, fin mai, début juin donc ils remontent très très tard. Et vous pouvez avoir un chevalier gambette qui remonte au mois de mars, qui va nicher au Benelux, qui va nicher au Pays-Bas, au Danemark, en Belgique et le même chevalier gambette de la même espèce qui va nicher au cercle polaire et lui qui remontera début mai. Donc vous voyez c’est pas facile de faire des dates d’ouverture parce que j’allais dire que chaque individu est différent en fonction de son aire de répartition.
Vous avez la migration d’automne qui commence dès fin juin, dès que la reproduction est terminée, dès que la nidification est terminée, dès que les jeunes sont élevés ou sont sur le point d’être élevés, il y a des petits échassiers qui quittent leur nid, ils savent même pas encore voler, dès que les jours diminuent, dès qu’il y a une diminution de la durée du jour les migrateurs partent, jusqu’au mois de novembre. C’est mi-novembre pour les oies…
A : Est-ce qu’on pourrait avoir aussi quelques informations sur les méthodes de comptage que vous employez ?
PC : Ah les méthodes, nous ici sur la réserve c’est très facile de compter, on a 14 postes d’observation donc tout est compté un par un. On installe les longues vues et moi je compte une fois par semaine l’ensemble de la réserve. Et puis il y a des comptages actifs durant la migration de, surtout d’automne, qui est plus spectaculaire : ça se passe sur des points hauts, comme le point de vue qui permet de découvrir la réserve et là on compte les migrateurs qui passent : les passereaux, les pinsons, les alouettes, en migration active. Donc là c’est souvent moins, un peu moins précis parce que c’est plus difficile de compter un par un. Mais c’est soit vous comptez les oiseaux posés sur la réserve un par un, soit après vous faites des comptages au moment de la migration, comme sur les cols pyrénéens, les endroits stratégiques de la migration. Ca ça donne une idée aussi des dates de passage des oiseaux, de descente et de remontée. Globalement les dates sont à peu près toujours les mêmes, bien que depuis quelques années il y ait des petites évolutions. Mais elles changent quand même assez chaque année. Le gros de la population passe toujours à peu près aux mêmes dates mais après vous avez une augmentation peut-être des migrations plus précoces. Mais les dates sont à peu près globalement les mêmes mais après tout dépend des conditions atmosphériques aussi, tout dépend de pas mal de facteurs qui ne sont pas forcément des facteurs locaux. S’il y a du mauvais temps dans le sud de l’Europe, s’il y a une sécheresse forte en Espagne qui oblige les oiseaux à remonter tôt. Autrefois dans les campagnes on disait " tient, les oies remontent en janvier, oh, ça y est, c’est la fin de l’hiver. ". Mais après on se payait un -15 en février, ça calmait tout de suite. Les gens avaient oublié que si les oies remontent en janvier, c’est peut-être qu’en Espagne il n’y a plus d‘eau, il n’y a plus de flotte dans le delta du Guadalquivir, ça les oblige à quitter la région plus tôt et essayer de trouver des zones de nourriture autres. Avec l’augmentation de la durée du jour, ça les oblige à remonter plus au nord.
F : Ca donne des renseignements de quel ordre? Sur l’évolution du nombre d’oiseaux de chaque espèce ?
PC : Oui mais sur des petits sites comme ça c’est pas forcément précis. Nous c’est plus sur les dates de passage et puis des études de comportement. Au mois de mars on a eu de la neige, sur le site il a fait froid très tard et de manière très longue. Généralement, bon, ça arrive souvent qu’il fasse froid en mars, mais de se prendre 15 jours, presque 3 semaines (le mot est pas bien choisi, mais de froid, on va pas dire de coup de froid) en mars, c’est étonnant. Ce qui était marrant, c’est que j’ai plein d’ornithologues qui sont venus en mars pour essayer de voir des espèces d’Europe du nord, de pays froids qui viennent nous voir. Mars c’est la période de remontée des oiseaux. Ils commencent à remonter. Donc ce ne sont pas des oiseaux d’Europe du nord qui vont descendre même s’il fait froid. En mars, dans la tête de l’oiseau, le but c’est de remonter. Donc nous quand on a eu le coup de froid de mars, il n’y a rien, ça a pas bougé. Les oiseaux qui étaient présents, qui étaient prêts à remonter vers le nord ils ont pas bougé. Ils se sont dit : " on va attendre pour remonter". Ils sont pas descendus vers le sud parce que dans leur tête il fallait remonter, les jours rallongeaient. Il ne s’agit pas de s’inverser le cerveau. Et les espèces qui étaient plus au sud de la France, ils ont commencé à remonter et ils ont été coupés par le froid à partir de la Loire et ils sont restés bloqués aussi. Donc on a eu en mars un statu quo où ça bougeait pas du tout sur le site. C’est ça qui était intéressant. C’était la première fois moi que je vivais un coup de froid aussi long à cette période-là. C’était intéressant de voir le comportement des oiseaux. Je m’y attendais, je me disais " Ca va pas bouger, il va pas y avoir… Les oiseaux vont être euh, ils vont subir. Un oiseau est incapable de savoir le temps. Il sait pas le temps qu’il va faire. Quand il est au Sénégal il sait pas le temps qu’il fait à Biarritz. Ou alors c’est un super champion !…
A : On voit bien comment ces comptages peuvent permettre d’avoir une idée de l’évolution des populations mais alors comment est-ce que l’on fait pour avoir une estimation absolue du nombre d’oiseaux d’une population puisque c’est quand même important pour fixer les dates de chasse ?
PC : C’est des comptages internationaux qui sont faits une fois par an au niveau mondial pour voir les effectifs des populations d’oiseaux hivernant dans toute l’Europe. C’est Wader Study Group qui organise ça au niveau européen, c’est basé en Angleterre. Il y a un comptage mondial des populations d’oiseaux d’eau. Alors ça va pas permettre de définir les dates de chasse, ça va permettre d’estimer la population mondiale d’un certain nombre d’espèces d’oiseaux d’eau.
A : Et puis pour terminer peut-être, est-ce que vous pouvez nous donner votre opinion sur l’état actuel de la controverse entre les chasseurs et les écologistes, sur son évolution...
PC : Pour moi elle est terminée. Il y a plus de controverse. Il y a des points à voir, assez intéressants, sur des espèces, sur le statut de certaines espèces au niveau européen et notamment au niveau français ; quelques espèces comme la barge à queue noire, le combattant, la sarcelle d’été. Il y a même la sarcelle d’hiver qui est très très chassée en France. On se rend compte maintenant que c’est elle qui en prend, euh, comme le colvert se sédentarise de plus en plus, aujourd’hui c’est la sarcelle d’hivers qui est en première ligne. Donc il faut voir un peu, cette sarcelle d’hiver, comment elle va évoluer, quelles sont ses populations actuellement et puisqu’elles ont une prise en chasse qui est très forte sur elles, qu’est-ce que ça va donner ? Certains diront qu’elles le supportent depuis des années et des années et puis que ça va bien, oui mais le jour où ça ira mal, je pense que cette population-là va chuter. Le fait de ne plus chasser en février aussi pour la sarcelle d’hivers je pense que c’est une bouffée d’oxygène.
A : D’accord mais quand on regarde un peu ce qui se passe dans les media, on a quand même tout le temps l’impression que c’est un problème assez délicat. Les arrêtés ministériels sont régulièrement attaqués en conseil d’Etat …
PC : Mais ça s’est beaucoup calmé. C’est un sujet polémique alors les media aiment bien les ressortir parce qu’ils savent très bien que ça sert à rien de parler des trains qui arrivent à l’heure. Si pour les media on commence à dire ben finalement, la chasse au gibier d’eau, ça se passe à peu près bien, il y a des petites choses à voir encore mais des petits… j’allais pas dire des détails mais des petites choses très techniques, ça, ça n’intéresse pas les media. Le statut de la barge à queue noire au niveau français, le Monde ou le Figaro, il en a pas grand-chose à faire. Par contre, que les chasseurs descendent dans la rue, qu’ils cassent tout, et que les écologistes disent " ah non ", que les naturalistes disent " ah non les dates sont pas bonnes, il faut tout changer", quand il y a un bon coup de politique derrière qui essaie de récupérer des voix, tout ça c’est intéressant quoi, donc aujourd’hui on est arrivé à une situation que moi je n’attendais pas si tôt. Je ne m’attendais pas à ce que si tôt on ait une ouverture au mois d’août plus ou moins, bon une ouverture bord de mer/marais moi j’aime pas que ça soit différencié. Moi je préférerais qu’on ait tout en même temps. Et puis une fermeture en février moi j’y croyais pas aussi tôt. Donc c’est pas mal. Puis il faut prendre en compte le fait qu’on cherche des oiseaux migrateurs donc il y des jours où ça passe et des jours où ça passe pas. Mais c’est pas mal, c’est pas mal. On a une situation qui est positive.
A : Sur le plan des données scientifiques pures, vous estimez que là on est arrivé à un bon compromis.
PC : Oui. Et puis on peut encore en faire des études. Là on en fait sans arrêt. Moi je suis plus partisan des actes concrets que des études pour les études pour les études. Et puis on touche maintenant des phénomènes au niveau environnement qui sont plus prioritaires aujourd’hui. Je pense que la chasse en février était une priorité au niveau environnemental. Aujourd’hui, le problème est l’évolution agricole, pour l’environnement mais aussi au niveau humain, puisque derrière la chasse il y a le côté humain. Au niveau agricole il y a le problème humain qui est très fort : quelle sera l’agriculture dans 20 ans ? Pour les agriculteurs, pour les éleveurs, pour les consommateurs, pour la nature… Ca c’est un gros défi. On se fait des idées plus ou moins, euh, au niveau français et au niveau européen. C’est pas la PAC qui fera tout. Ca c’est un gros défi au niveau environnemental. Il y en a un autre pour moi aussi qui est important, c’est de donner un sens de la nature à nos enfants. Au niveau pédagogie, on ne fait plus de sciences naturelles à l’école. Un peu les instits car ils ont un programme mais à partir de la 6ème c’est terminé. On parle de choses actuelles qui sont très importantes et dont il faut parler aussi mais je pense que les enfants auront besoin de savoir la nature au quotidien dans les jardins, dans la campagne, d’une sensibilisation à la nature dès le plus jeune âge. Ca c’est complètement oublié, c’est plus dans les programmes alors que c’est du concret, c’est du quotidien. Ici on reçoit 35000 scolaires par an et je trouve que c’est une de nos plus belles missions de donner le goût aux enfants de regarder, de s’intéresser aux éléphants et aux rhinocéros en Afrique mais aussi de s’intéresser à leur faune au quotidien qui est autour d’eux. Ca c’est capital pour se rendre compte que pour bien vivre chez toi (même si on habite en ville) il faut un côté nature autour de soi. Un chant d’oiseaux ça sert quand même à quelque chose. Avoir un jardin, une forêt, ça c’est indispensable.
A : Ce n’est pas étranger d’ailleurs aux répercussions importantes qu’a la controverse auprès du grand public puisqu’il y a une certaine déconnexion de ce que perçoivent les populations urbaines par rapport à la réalité…
PC : Ben oui, il y a plein de choses qui ont fait que…Bon écoutez, on va enlever la chasse au gibier d’eau qui est quand même très technique, les dates, il y a aussi des problèmes d’éthique, mais il y a une perception de la chasse qui est aujourd’hui différente. Comme on a une perception du maître d’école, comme on a une perception du maire du village, même, bon maintenant ce sont les médecins qui sont attaqués. Avant dans les campagnes les gens qui partaient à la chasse dans les campagnes étaient quelque chose de tout à fait normal voire valorisant. Le mec qui partait avec son fusil dans les champs et qui chassait la perdrix ou le lapin, c’était " quelqu’un ". Ca faisait vraiment parti du rituel le dimanche d’aller chasser. C’était tout à fait normal et respectable. Aujourd’hui c’est montré du doigt. Pas par tout le monde mais c’est en partie montré du doigt comme aujourd’hui on montre du doigt le maire qui est jugé incompétent, on montre du doigt l’instituteur qui n’est plus la figure du village… C’est une évolution de la société. Je condamne pas, je dis pas que c’est mauvais ou pas, c’est une évolution. Et ça, la chasse ne l’a pas pris en compte, cette évolution, que ce loisir qui était considéré comme quelque chose de normal à la campagne, qui faisait partie du lieu - il y a une histoire de chasse qu’il y a notamment dans le sud de la France avec Tartarin de Tarascon ou même chez nous dans le nord ou partout, on raconte des histoires de gibier - et tout ça, eh bien, euh… dans les régions fortement de chasse, c’est encore perçu comme quelque chose de positif mais de moins en moins et ça c’est je pense un des défis de la chasse de prendre en compte cette évolution et de se dire " on n’est plus considéré comme on l’était, à nous de comprendre la société et comment elle a évolué, à nous de, j’allais pas dire de changer, mais d’expliquer mieux notre activité et de la rendre plus acceptable et rationnelle. ". Et ça je pense ça n’a pas été suffisamment fait. Certains chasseurs en ont souffert. Il y a des guides qui sont chasseurs, d’autres qui le sont pas. Quand on me ramène une spatule tirée ou une cigogne tirée, espèces protégées qui sont faciles à reconnaître, ceux qui sont le plus outrés, c’est pas forcément les naturalistes, les guides très naturalistes issus des milieux de protection de la nature, ce sont les guides qui sont chasseurs. Ils ont tiré sur cet oiseau-là mais ils ont aussi tiré sur la chasse. Parce que le mec qui fait ça il donne pas une image de marque positive de la chasse. Et ça me fait autant mal pour la protection de la nature que pour la chasse parce que je me dis " Ola, avec ces comportements-là ils sont mal partis " parce que la population peut de plus en plus se promener et devient consommateur de nature de plus en plus donc le conflit il ne faut pas qu’il arrive, il faut qu’ on en parle. Et ça c’est de la sociologie mais je crois que s’il y avait eu une plus forte prise en compte de ça, hormis le problème spécifique des oiseaux d’eau qui est très technique, on aurait certainement une chasse beaucoup plus positive parce que les Français ne sont pas anti-chasse. On ne naît pas anti-chasse, on le devient. Quand il y a des choses… Le gars qui est dans la campagne qui se promène et qui se fait tirer au-dessus de la tête avec des plombs qui retombent dessus, ben il peut pas être pro chasse. Par contre le gars qui euh, bon, en baie de Somme il y a pas mal d’efforts qui sont faits, il y a des visites de huttes de chasse, il y a des enfants qui sont amenés pour faire des comptages d’oiseaux, il y a des comptages de perdrix aussi dans les champs. J’ai même vu des gens qui, pas des enfants, disant " on a fait une visite guidée en baie de Somme avec un chasseur. Ils sont bien les chasseurs. ". Parce que le gars avait un discours positif et puis il était chasseur mais c’était pas son but principal. Quand vous êtes footballeur vous passez pas 99,9% de votre temps à parler du foot. Vous parlez aussi d’autre chose, vous avez un esprit ouvert. Et ça c’est bien, c’est positif pour la chasse.
A : Et vous avez parlé de la modification des habitats due à l’agriculture, est-ce qu’on peut voir aussi une action positive des chasseurs qui replantent des haies, qui font des choses comme ça ?
PC : Oui oui, souvent. Et ça peut être aussi des agriculteurs hein. Il y a des agriculteurs qui se rendent compte que … Bon ben il faut savoir qu’en protection de la nature et dans d’autres domaines il faut qu’on touche le fond et qu’on se butte la tête contre un mur pour qu’on se rende compte qu’on est en erreur. Ca c’est très net et il y a des agriculteurs aujourd’hui qui replantent des haies exactement à l’endroit où ils les ont arrachées, où leurs grands-parents les ont arrachées… N’importe comment moi je suis…mes grands-parents étaient agriculteurs, un agriculteur n’arrache jamais par plaisir. Tous ceux que j’ai vu, ils savent très bien que c’est une connerie. Mais on peut pas faire autrement parce qu’il faut agrandir la parcelle, parce que les machines ont agrandi, parce qu’il y a x raisons et ils savent très bien que ceux qui les ont plantées ne l’ont pas fait pour rien. Dans le milieu agricole on ne fait rien pour rien, et c’est, et c’est normal aussi parce que c’est une question de rentabilité et d’état d’esprit. Si on creuse un fossé parce qu’on a eu des problèmes d’inondations, le jour où on le rebouche, on sait très bien qu’on fait une connerie mais on le fait quand même. Il y a des tas de choses qu’on fait dans la vie tous les jours où on sait très bien que c’est une connerie mais on les fait quand même. Là c’est un peu pareil. On ne revient pas en arrière, on rechange son fusil d’épaule j’allais dire. Mais on ne revient pas en arrière. Quand on replante une haie, pour moi on ne revient pas en arrière, on revient à une autre forme d’économie ou une autre forme de gestion. Donc c’est vrai que les chasseurs, notamment en plaine, participent pas mal à ce changement de fusil d’épaule justement. Ca dépend des sociétés de chasse, ça dépend des personnes… Ca dépend de l’impulsion que donne le président de la société de chasse. Il y a plein de choses positives qui sont faites.
A : Très bien, merci beaucoup pour tous ces renseignements.