Le projet HISAC
Le projet HISAC est un projet Européen mené par Dassault-Aviation, aux côtés de trente-sept autres partenaires, visant à établir la faisabilité d'un avion d'affaires supersonique respectant à la fois des contraintes environnementales (tant au niveau de la pollution sonore que des émissions de gaz nocifs), économiques, et techniques.
Le projet fut pensé en 2003 bien qu'il n'ait vu officiellement le jour qu'en 2005, et s'achèvera en octobre 2009, après le salon du Bourget.
Ce projet ne vise en aucun cas à développer un avion supersonique qui serait ensuite mis sur le marché. Il s'agit uniquement de définir dans quelles conditions il serait possible de concevoir, dans le futur, un petit avion, acceptable sur le plan environnemental (à prendre ici, et dans la suite, au sens du bruit). En effet, en ce qui concerne la consommation il n'existe aucune réglementation claire, seule une régulation des émissions est aujourd'hui en vigueur. Dans le cas présent, les objectifs ont été définis par rapport à des extrapolations de ce que pourraient être les pires avions subsoniques de 2020, le but étant de ne pas faire moins bien.
Il faut savoir que, contrairement à Concorde, il n'est pas question ici d'avoir une dérogation de vol, mais bien de pouvoir voler en accord avec la législation internationale au moment de l'arrivée de l'appareil sur le marché.
Le projet en lui même se décompose en trois objectifs :
Le premier objectif du projet est de développer un avion qui se conformerait aux contraintes environnementales, techniques et de marché suivantes :
- Réduction du bruit extérieur (8dB en dessous des recommandations de l'ICAO).
- Réduire les émissions de NOx (inférieures à 5g par kilogramme de kérosène brûlé).
- Les émissions au décollage et à l'atterrissage doivent être comparables à celles d'avions subsoniques volant en 2020.
- Réduire le bang sonique tout en conservant de bonnes performances.
- Rayon d'action de 4000 nautiques minimum.
- De 8 à 16 passagers.
Un second objectif pour HISAC est de définir des normes, de créer un précédent. Les normes, ainsi que l'ensemble des législations produites par l'ICAO ne sont pas empiriques, mais suivent les évolutions techniques des constructeurs. Aujourd'hui aucun projet n'étant encore sur le marché, il est impossible de définir des règles pour le supersonique civil. Or, ce vide dans la législation empêche les constructeurs de se lancer dans certains projets, ou d'oser certaines innovations, de peur d'essuyer des interdictions par la suite.
Enfin, le projet HISAC est porteur de progrès dans des domaines critiques, tel que l'optimisation multi-critères, qui pourront être réemployés dans de futurs projets. Le schéma suivant récapitule de manière simple les trois objectifs de Dassault-Aviation et de ses partenaires :
Le projet HISAC est une étude permettant une « veille technologique », afin d'être présent sur un marché incertain, et de pouvoir participer, document et expérience à l'appui, à la conception d'un Supersonic Business Jet (SSBJ).
Les conclusions de Dassault-Aviation, concernant un format possible de SSBJ suite à ce premier projet sont tout de même très intéressantes :
- Contrairement à Aerion, qui se penche sur la faisabilité d'un avion supersonique pouvant voler, sous la législation actuelle, au dessus des zones habitées, HISAC a clairement été mené dans un cadre de survol subsonique des terres. L'avion devra donc être optimisé pour deux configurations : le vol à un certain Mach plus grand que 1 (sans doute aux alentours de M1.6 ou M1.8 afin d'éviter trop de problèmes de chaleur et de consommation) et un Mach inférieur à 1.
- Cet avion serait deux à trois fois plus cher à développer qu'un Jet subsonique. La plus grosse inconnue reste encore la motorisation. En effet, l'ensemble des simulations, et l'expérience de Dassault-Aviation en matière de supersonique militaire leur confère un savoir précieux en aérodynamique et en résistance des structures (vibrations, chaleur...). En revanche, les moteurs militaires ont un point de fonctionnement très différent de celui d'un SSBJ. En effet les avions militaires accélèrent vite mais restent très peu longtemps à vitesse supersonique. Au contraire, le point de fonctionnement visé des moteurs de SSBJ serait d'accélérer en douceur, et de maintenir pendant plusieurs heures une certaine allure. C'est pourquoi les moteurs du Rafale M88 ne sont pas adaptables pour le projet, et donc ceux-ci devront être entièrement repensés.
- La géométrie finale n'a quant à elle pas été définitivement choisie. Même si des orientations ont été prises (cf photo ci-dessous), la géométrie variable ou les « quiet spikes » (étudiées respectivement par Sukhoi et Gulfstream) ont également été envisagés.

Le design à "faible bang"
- Ceci étant, il reste encore un certain nombre de points non étudiés. Les sondages au près des populations montrent que les nuisances ressenties se classent de la sorte : au premier plan, l'effet de surprise produit par un bruit intense et soudain. Puis viennent les vibrations (cf ci-dessous), et enfin le bruit en lui-même. Cependant les dirigeants du projet n'ont menée aucune étude de sophrologie, ni d'impact de tels appareils sur les populations. Il n 'y eu également aucune étude de marché à proprement parler. Certains aspects techniques n'ont également pas été pris en compte, et notamment l'étude des vibrations occasionnées par la partie inaudible de l'onde de choc. Un bang supersonique a la forme d'un N :

Forme du bang sonique
- On distingue deux parties du signal : deux pics, de fréquence proche du kHertz, audible, et qui n'affectent donc pas les bâtiments (les bâtiments ne sont sensibles qu'aux basses fréquences). En revanche la décroissance médiane a une fréquence de l'ordre de la dizaine de hertz, qui correspond à la résonance de la plupart des constructions civiles. C'est l'atténuation de cette partie de l'onde qui n'a pas été envisagée.
Enfin, il est clair que Dassault ne se destine pas à la réalisation d'un « liner », mais bien d'un Business Jet. La possibilité de développer à nouveau un Liner est d'ailleurs étudiée aujourd'hui par la JAXA, malgré le scepticisme de la majorité des autres avionneurs.
Nous vous invitons également à consulter le résumé des réponses d'Aerion à nos questions.