Avenir du personnel : La reconversion des conducteurs de la RATP

La décision d'automatiser une ligne a d'immenses conséquences du point de vue des ressources humaines. La variation du nombre d'employés sur une ligne est énorme. Actuellement 250 conducteurs sont en fonction sur la ligne 1, en 2010, à la fin du projet d'automatisation il ne restera plus que 100 employés sur la ligne dont une cinquantaine de cadres supérieurs. Face à ce bouleversement social, il est évident que les conducteurs ont des revendications et qu'ils se sont investi dans le processus de décisions.

En première approche l'automatisation peut effrayer les conducteurs, elle est tout de même une menace directe pour leurs emplois. Les premières craintes sont apparues dès la mise en place du pilotage automatique. Ce dernier fait perdre une grande partie de son essence au métier, avec pour conséquences une crise identitaire et une baisse des aptitudes à conduire. La seconde conséquence se ressent particulièrement lors des manoeuvres de terminus, les conducteurs ont perdu la main ce qui a, dans les premières années, provoqué plusieurs incidents.

Pour surmonter cette difficulté la direction des transport exige que les conducteurs effectuent au moins un tour de ligne en conduite manuelle par jour. Le problème de la modification du métier de conducteur s'est estompé face aux avantages du pilotage automatique. Ce dernier permet aux conducteurs de se focaliser sur leur mission de surveillance de l'ouverture et de la fermeture des portes. Par ailleurs il apporte beaucoup de confort au métier pénible de conducteur. De nouvelles revendications des conducteurs ont ressurgi au début des années 2000. En 2002 la décision d'automatiser la ligne 1 est prise et les discussions autour de l'automatisation s'inscrivent dans un grand projet de modernisation du métier de conducteur. La direction de l'automatisation a, tout d'abord, lancé une phase de communication et de sensibilisation auprès de la direction générale, de l'ensemble des conducteurs et des organisations syndicales. Lors d'une entrevue, M.Gerard Churchill, directeur de l'automatisation de la ligne 1, a insisté sur l'importance de l phase d'explication du projet. Suite à ça les discussions se sont déroulées en agoras ouvertes à tous. Elles ont été suivis de plusieurs protocoles d'accord concernant l'automatisation ou non. L'ensemble des conducteurs s'est ainsi prononcé en faveur du projet de modernisation du métro, notamment des station, et surtout en faveur de l'automatisation de la ligne 1 malgré les bouleversements sociaux. En parallèle de ces protocoles, le déroulement de carrière de tous les conducteurs de métro a été repensé, cela passe par une meilleure reconnaissance des expériences précédentes.

Il peut paraître surprenant que le projet d'automatisation ait été voté à la majorité. Analysons les accords passés avec le personnel. Sur toutes les lignes de métro on trouve deux catégories de conducteurs, les conducteurs titulaires et les conducteurs intérimaires qui ont trop peu d'ancienneté pour être titularisés. Ces catégories se distinguent par leurs contrats de travail mais aussi par leurs revendications. De manière générale les anciens conducteurs sont plus attachés à leur ligne de métro. Sur la ligne 1, depuis que le projet a été voté par le STIF, la direction des transports propose aux conducteurs titulaires plusieurs options.

Ils peuvent choisir de partir sur une autre ligne, auquel cas ils recevront une gratification. Ils peuvent choisir de demeurer sur la ligne 1 et d'occuper des postes d'encadrement créés sur la ligne comme le poste de superviseur d'exploitation qui est un équivalent de chef de gare. Enfin certains conducteurs se sont vus proposer des départs anticipés en retraite. En quatre ans, tous les conducteurs titulaires de la ligne ont été réorientés. Pour assurer le service avant l'automatisation complète la direction a recruté des conducteurs intérimaires. Dans leur contrat la ligne à laquelle ils sont affectés n'est pas stipulée. Il seront donc réorientés sans difficulté au fur et à mesure de l'introduction des rames automatiques MP05. Finalement le projet d'automatisation supprime des emplois sur une ligne mais à l'échelle du réseau aucun emploi n'est supprimé, sur certaines lignes des postes ont même été créés. La réorientation des conducteurs répond à une volonté forte de la part de la RATP qui, en tant que service public, s'engage à ne jamais licencier mais aussi à respecter les évolutions de carrière. Aucun conducteur n'a été employé à un poste moins qualifié. Grâce à un travail de communication et de sensibilisation la reconversion du personnel de la ligne s'est effectué sans que la direction n'ait à déplorer de grève. Pour l'anecdote, le STIF a aussi donné son accord pour le projet d'automatisation quasiment à l'unanimité, preuve que l'aspect social du projet reçoit l'appui de la majorité des acteurs.