Petit historique de l'automatisation :

Chaque jours, presque six millions de voyages sont réalisés sur les 211 kilomètres de voies ferrées de la RATP à bord de près de 700 rames. Dans ce réseau dense et chargé, la qualité du transport est sensible à toute perturbation affectant le matériel, le personnel ou les voyageurs. La météo, les manifestations en tout genre ont aussi un effet qu'il faut nécessairement prendre en compte. Pour assurer la sécurité et la qualité de service de ce réseau complexe, la RATP et ses ingénieurs ont très tôt pensé l'automatisation des voies afin d'augmenter la capacité et la flexibilité du réseau dans son ensemble.

Après-guerre, le réseau de métro parisien se trouvait dans le même état qu’avant-guerre, que ce soit au niveau du matériel roulant ou concernant les procédures de conduite et la signalisation. Les rames étaient pilotées manuellement. La signalisation au sol permet au conducteur de savoir s’il peut avancer ou non. Dans les années 1965, un bureau d'étude sur l'automatisation est créé au sein de la RATP. Ce bureau d'étude a pour but de réfléchir sur les solutions pour automatiser chacune des étapes de la marche d’un train.

A la fin des années 1950, une première solution technique est développée pour réguler la vitesse des trains. En cabine, le pilote automatique, mais aussi le conducteur du métro reçoit une information de vitesse limite à ne pas dépasser. Le PA va suivre cette consigne. Cette information est liée à la position du train précédent mais aussi à la position dans le tronçon. A priori dans le réseau métropolitain il existe peu de variables influençant la consigne de vitesse, étant donné que les trains se suivent sur des tronçons dédiés. La mise en équation devient plus complexe lorsqu’il faut tenir compte d’aiguillages, de fourches et de croisement ou quand les lignes ne sont pas dédiées, comme c’est le cas sur le réseau Transilien.

Le 24 janvier 1952, la RATP effectue un premier essai de pilotage automatique sur un métro sur pneu, l'adhérence étant meilleure que sur rail. Au départ les essais sont peu convaincants, on observe un phénomène de pompage assez gênant. La solution viendra des mathématiques, un asservissement du véhicule en accélération permet de surmonter le problème. En 1967, la ligne 11 commence à être équipée d'un système de pilotage automatique, toutes les autres lignes suivront à l’exception de la ligne 10 et de la 3 bis qui sont encore conduites manuellement.

Avec le pilotage automatique, le conducteur est seulement chargé de surveiller l'ouverture et la fermeture des portes. Le rôle du conducteur est limité et modifié. En 1979, avec la mise en place du pilotage automatique (PA)sur la ligne 5, s'achève le processus de modernisation technique du réseau métro commencé en 1965. Très vite les responsables du métro constatent une recrudescence du nombre d‘incidents mettant en évidence un comportement fautif du conducteur: franchissement de signaux fermés, non respect de procédures de marche en situation perturbée, non respect des règles de circulation en arrière gare par exemple. Les conducteurs quant à eux, reprochent à ce système de leur faire perdre leur professionnalisme reconnu et font état d'un sentiment général d'ennui au travail. Sur une ligne équipée de pilotage automatique, un conducteur change nécessairement d'état d'esprit. Il s‘interroge sur son utilité et parle de « baisse de sa qualification». Les services lui paraissent plus longs. L'automatisation totale de la marche du train lui retire nombre de ses prérogatives et son travail consiste de plus en plus en une présence en cas d'anomalie. L'esprit ainsi libéré, le conducteur est immanquablement plus distrait. Les conducteurs demandent donc plus de responsabilité et une nouvelle motivation de leur vigilance. Il fallait néanmoins continuer à sécuriser la conduite manuelle.

La solution finalement retenue est le fruit d‘expérimentations entamées dès 1973 avec l‘essai de couplage de la conduite manuelle contrôlée (CMC) avec le pilotage automatique sur la ligne 6. Elle marque un certain retour en arrière dans la mesure où elle constitue un mode intermédiaire entre celui qui existait antérieurement, celui où aucun système de sécurité automatique n'était intégré, et le pilotage automatique, où le conducteur est réduit, en dehors du service en station, à un rôle passif de surveillance d'un automate. Ce dispositif de conduite matérialise une conception traditionnelle du professionnalisme où la possibilité de faire une faute n‘est a priori pas interdite par un dispositif technique, en particulier pour les dépassements de vitesse qui sont toujours possibles. Les dispositifs automatiques assurent alors seulement la surveillance du respect de la signalisation par les trains et du maintien en état de vigilance du conducteur. La CMC correspond à une reconnaissance par les ingénieurs des limites d'un automatisme non autosuffisant qui suppose de maintenir quelqu'un derrière lui pour le surveiller en permanence et par les syndicalistes d'une légitimité des conducteurs fondée sur leur responsabilité dans la conduite. Ce mode de conduite a été généralisé entre 1979 et 1985. En accord avec les syndicats, les exploitants du métro mettent en place des consignes claires pour l'utilisation de ces deux modes de conduites: le PA est obligatoire quand l'intervalle entre deux rames est inférieur à deux minutes, c'est-à-dire en heures de pointe, tandis que la CMC est obligatoire quand l'intervalle est supérieur à quatre minutes. Des études ont cependant montré que ces consignes ne sont pas toujours respectée par les conducteurs, qui restent les seuls maîtres à bord leur rame choisissant le PA ou la CMC en fonction de leur envie et non forcément de l'intensité du trafic.

Au milieu des années 1970, au moment de la mise en service du RER, la SNCF s’est posée la question de la mise en place d’un pilotage automatique mais cette nouvelle technologie s’adaptait difficilement au matériel lourd et long qui équipe le réseau Transilien. Le développement d’un système adapté posait des problèmes de sécurité et d’investissement pour un réseau nouvellement créé et bien loin de la saturation. En 1989 pour faire face à l’augmentation de la fréquentation de la ligne A du RER la RATP met en place un système d’aide à la conduite, à l’exploitation et à la maintenance (SACEM). Ce dispositif assez similaire au PA installé sur le métro fournit une consigne de vitesse maximale que le conducteur va chercher à atteindre. Il s'appuie sur un système de cantons virtuels associé à une signalisation embarquée. Sur les autres lignes du réseau Transilien, ni la SNCF ni la RATP n’ont développé de PA.

Dans les années 80 le débat sur l'automatisation de la conduite se réveille lorsqu'en mai 1983, Lille inaugure avec succès son métro à petit gabarit et sans conducteur: le VAL (Véhicule Automatique Léger). Progressivement les réflexions se concrétisent suite à la décision prise par le réseau lyonnais, en 1985, de transformer la ligne D en cours de construction en un métro sans conducteurs. La RATP participe humainement et financièrement à ce métro nommé Maggaly (Métro Automatique à Grand Gabarit de l'Agglomération Lyonnaise). La participation des ingénieurs de la RATP au projet Maggaly contribue à définir les options technologiques à retenir pour une ligne sans conducteurs. En particulier, ils ne reprennent pas le choix fait pour la ligne D par les responsables lyonnais qui ont, pour des raisons de coûts, opté pour une solution qui n‘assure pas une étanchéité parfaite entre le quai et la voie. A Paris, les responsables considèrent qu‘ils ne peuvent prendre ce risque : au premier accident voyageur où un métro automatique serait impliqué, la presse se précipiterait sur l‘affaire. Immédiatement les politiques demanderaient des mesures pour que cela ne se reproduise plus. Comme à Lille, des portes palières, installées en bordure des quais, semblent être la seule solution qui assure une protection totale: chaque

année, sur le réseau parisien, il se produit 120 à 130 suicides contre 50 il y a dix ans. Pour ces portes palières, le cahier des charges semble clair: le but des façades de quai est d'isoler totalement le quai de la voie. Pour ce faire, la fermeture du quai doit être réalisée sur toute sa longueur et sur une hauteur suffisante pour éviter que la façade puisse être enjambée. Les façades doivent résister à une poussée de la foule sans déformation ni rupture.

Le gouvernement français adopte le projet METEOR en 1989. Ce projet prévoit la création d'une ligne de métro, celle-ci est à l'origine pensée pour désengorger les lignes 1 et 13. Rapidement la direction de la RATP fait le choix de construire une ligne totalement automatique. Ce choix motivé notamment par la présence de hauts lieux touristiques sur la ligne est largement approuvé par tous les acteurs. Les travaux débutent en juin 1993 et durent jusqu'au premier semestre de l'année 1995. Les voies sont posées entre mars 1995 et mars 1997. La première rame est réceptionnée le 17 mars et les essais débutent le 26 mai. De nombreux essais de conduite manuelle puis automatique sont ainsi pratiqués en 1997 et 1998. Les stations sont aménagées entre janvier 1997 et octobre 1998. La première ligne automatique sans conducteur du réseau est inaugurée en grande pompe le 15 octobre 1998 en présence du chef de l'État, monsieur Jacques Chirac. 100000 voyageurs empruntent chaque jour Météor durant ce mois d'octobre. Le trafic quotidien approche 175 000 voyageurs en 2003 . Cette même année, le trafic est interrompu à plusieurs reprises pour ajouter les équipements permettant de gérer le prolongement entre Madeleine et la gare Saint-Lazare, prolongement qui est inauguré le 16 décembre 2003. Depuis, le trafic ne cesse d'augmenter: 310 000 personnes empruntent cette ligne chaque jour. Les travaux pour une extension de METEOR vers le Sud ont débuté. Fin 2007, la ligne 14 sera prolongée au sud jusqu'à la station Olympiades dans un quartier densément peuplé et encore mal desservi, à l'angle des rues Nationale et de Tolbiac. Ce prolongement a pris du retard en raison de l'effondrement de la cour d'une école sur une des installations souterraines en construction. Au nord, il est prévu que la ligne 14 soit prolongée dans un premier temps jusqu'à la station Place de Clichy, pour y reprendre une des branches de la ligne 13. Au début des années 2000, un grand projet de modernisation du métro voit le jour à la RATP.

En marge de ce projet est décidée l'automatisation de la ligne 1 en 2002. Cette automatisation d'une ligne classique sans interruption de trafic est une première mondiale. Le processus devrait prendre fin en 2011. Dans le même temps, un nouveau système de conduite des trains, le système OURAGAN, a été commandé pour équiper la ligne 13 sans pour autant faire disparaître les conducteurs. Aujourd'hui aucun projet d'automatisation de ligne n'est en projet sur le réseau métropolitain, seuls certains terminus sont en voie d'automatisation pour faciliter le retournement des trains. En revanche le métro automatique est extrêmement populaire dans les projets de Grand Paris et de connexions inter-banlieues notamment pour relier les grands pôles éducatifs, industriels et de recherche d'Ile de France. Concernant les trains de banlieue et les RER, il n'est nullement question de mettre en place ne serait-ce qu'un système de pilotage automatique, la SNCF et la RATP jugent que les besoins sont insuffisants pour justifier une telle évolution. De plus une telle mise en place n’est pas chose aisée. Le matériel roulant est relativement ancien, il n’est pas forcément judicieux d’effectuer des modifications importantes à du matériel commandé avant les années 1990. Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le réseau Transilien, contrairement au réseau métropolitain n’est ni dédié ni protégé. N’importe qui peut s’introduire sur les voies et n’importe quelle entreprise peut obtenir l’autorisation de faire circuler des trains auprès de RFF. Les variables entrant en compte dans la détermination de la consigne de vitesse sont autrement plus nombreuses et plus complexes.