1. Petits sondages...
Nous avons demandé aux élèves d'une école primaire (L'école primaire Libermann à Illkirch) "A quoi vous fait penser le loup?". Les réponses des enfants sont éloquentes et surprenantes.
" Les loups sont méchants"
" Le loup chasse les hommes"
" Les chasseurs tuent les loups avec des fusils"
" Le loup mange de la salade"...Nous avons interrogé des classes de CE1, CE2 et CM2 et nous avons noté que les enfants les plus âgés avaient une meilleure connaissance du prédateur mais le loup est diabolisé par au moins un quart des élèves dans chaque classe.
Des contes récents font apparaître chez les enfants une image peu traditionnelle: ainsi, pour certains, le loup mange des yaourts!!!!
Petite anecdote au passage, une institutrice donna sa langue au chat lorsque deux enfants l'interrogèrent pour savoir si le loup garou existait.Si on interroge les adultes en leur demandant s'ils seraient prêts à se promener seuls dans une forêt où habite une meute de loup, la plupart répond non sans hésiter.
D’où vient cette image négative?
2. Contes et légendes
Les contes et légendes ont eu, dans notre enfance, un rôle primordial. Ils nous ont captivés et ont ainsi influencé notre représentation du monde. Ils constituent une sorte d’inconscient collectif commun à l’humanité entière. Si l’on se penche sur ces contes et légendes, il est assez clair que le loup n’y joue pas un rôle très positif hormis dans quelques pays (nous y reviendrons par la suite). Ainsi chacun se souvient du petit chaperon rouge et de son « grand méchant loup », ou encore de certaines fables de La Fontaine (le loup et l’agneau) que nous avons tous apprises à l’école. Ces textes utilisent le loup comme élément négatif et dangereux (cruel, primitif, jaloux, colérique, impulsif, maléfique...) et transmet de cette façon une vision unilatérale du loup dans son scénario le plus noir et romancé.
Il est d’ailleurs important de noter que les loups, en particulier leurs hurlements nocturnes, sont également utilisés dans la plus grande littérature (Shakespeare…) afin de créer des atmosphères inquiétantes. Selon Marie-Louise von Franz, disciple de Jung, les contes de fées seraient une représentation de l’inconscient : « Les contes de fées expriment de façon extrêmement sobre et directe les processus psychiques de l’inconscient collectif ». Notre inconscient collectif renferme donc indéniablement une certaine appréhension par rapport aux loups qui persiste souvent par manque d’information complète sur ces derniers.
3. Chasses, traques, pièges d’autrefois
Le loup a toujours été craint par l’homme qui n’a eu de cesse d’inventer des moyens pour chasser cette "bête maléfique" au cours de l’Histoire. Les pièges tels que des trous recouverts de branchages, l’utilisation de fusils (au XVIIIe siècle, presque chaque ferme disposait des ces deux équipements), le recours régulier aux battues munies de fourches et de fusils constituaient la majeure partie de ces moyens. Les battues durèrent au moins jusqu’en 1880. La capture d’un loup était doublement bénéfique : le cadavre de la bête ramené au village permettait à son chasseur d’être récompensé par une prime attribuée par le conseil municipal et allant jusqu’à 12F (12 fois le salaire d’un paysan). C'était aussi pour tout le village une bonne raison de faire la fête.
4. Où la légende frôle la réalité
De 1764 à 1767, les gens du Gévaudan vécurent un véritable cauchemar: environ 100 personnes furent tuées à moitié dévorées. La bête de Gevaudan soulève encore les passions. D'ailleurs, de nombreux ouvrages lui ont été consacrés mais les auteurs ne sont pas toujours d'accord.
Dans les Vosges une bête mystérieuse attaque également des dizaines de moutons…
Amala et Kamala, deux petites indiennes ont été découvertes en 1920 dans la tanière d'une louve où vivait une portée de louveteaux. Ces deux enfants loups furent le sujet de beaucoup de recherche et d'interrogation.
5. Le poids des motsLa langue française non plus n’épargne pas les loups. Certains linguistes, comme Noam Chowski, défendent l’hypothèse selon laquelle le langage préfigure la pensée. Dès lors il ne faut pas s’étonner de l’attitude des hommes envers les loups. Voici quelques exemples d’expressions illustrant tout à fait la mauvaise posture du loup dans notre langue :
« Se jeter dans la gueule du loup »
« L’homme est un loup pour l’homme »
« Avoir une faim de loup »
« La faim fait sortir le loup du bois »...Ces phrases illustrent bien l’aspect agressif et cruel que l’homme prête au loup et traduisent un état d’esprit général.
1. Un retour à la nature
Le sondage SOFRES datant de 1995 montre que 75 % de la population est favorable au retour du loup en France.
Pour les français qui ne sont pas impliqués dans la controverse, le retour du loup prouve que la faune et la flore de nos forêts vont bien. Le loup représente la nature retrouvée, la chaîne alimentaire complétée….
D'ailleurs on note un engouement du public pour les parcs présentant des loups en captivité (parc du Gévaudan, parc de St Croix de Rhodes, zoo d'Amnéville...)
Le loup fascine, effraie, intrigue, surprend… mais ne laisse personne indifférent.2. Les autres pays
La présence du loup est beaucoup moins problématique en Espagne ou en Italie, preuve qu’un avenir meilleur serait possible pour le loup en France. Il est cependant important de signaler quelques différences fondamentales entre ces pays et la France :
« en Espagne et en Italie, les loups n’ont jamais totalement disparus, l’habitude de protéger les troupeaux a donc été gardée, et les bergers s’accusent eux-mêmes de leur manque d’attention si un mouton meurt. De plus, l’image du loup est très positive dans l’histoire de ces pays (les loups sont à l’origine de la création de Rome en Italie) contrairement à la France où les loups ont toujours été vampirisés (loup=diable pour la religion et les contes enfantins) » selon Stéphanie Morelle, déjà citée précédemment.
En effet, non seulement les Italiens et Espagnols n’ont jamais cessé de vivre avec les loups, mais en plus ces derniers sont à l’origine de la création de Rome à travers le mythe de Remus et Romulus.