Dopage » La Performance à la source du dopage http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress Sport de haut niveau et Transformation physique Sun, 28 Apr 2013 22:15:14 +0000 fr-FR hourly 1 http://wordpress.org/?v=3.5.1 Nouvelles substances et méthodes dopantes http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=470 http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=470#comments Mon, 15 Apr 2013 14:04:00 +0000 laguittemh http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=470 Vers plus de performance, sans entraînement ?

Pour Gérald Darmanin, Député UMP, ancien chef de cabinet de David Douillet alors ministre des Sports : « Un grand sportif, même s’il est dopé, reste un grand sportif parce que le dopage améliore sa capacité de travail et ne la remplace pas. »1

Cependant, une étude publiée en 2008 dans la revue américaine de biologie cellulaire Cell a eu un impact non-négligeable dans le monde du sport et du dopage2. Des chercheurs prétendent avoir mis au point une simple pilule qui, lorsqu’administrée par voie orale à des souris durant une période de 4 semaines, a amélioré considérablement l’endurance de ces dernières, même sans entraînement aucun ! Ceci s’oppose frontalement avec la vision d’un dopage qui ne saurait se substituer à l’entraînement.

Les molécules sont efficaces sur des souris de laboratoire

Les molécules sont efficaces sur des souris de laboratoire

 

Dans cette pilule, deux substances -baptisées AICAR et GW1516- agissent au niveau des muscles squelettiques. L’action de cette pilule a fait l’objet d’une table ronde lors du 13ème colloque sur la lutte et la prévention contre le dopage, le 5 avril 2013.

Les chercheurs qui ont mis au point ces nouveaux produits ont déjà alerté l’Agence Mondiale Antidopage (AMA) sur le danger qu’ils représentent pour le sport de haut niveau. Bien que les produits n’ont pas encore été testés sur des êtres humains, il semble que les risques que des athlètes utilisent déjà ces substances sont bien réels car elles sont d’ores et déjà en vente sur internet3. Elles pourraient bien être à l’origine de performances nouvelles, uniques et hors normes.

À travers ces exemples, on comprend que l’émergence de nouvelles substances dopantes est un processus continu. Les progrès thérapeutiques considérables de ces dernières années, et ceux à venir, vont encore permettre le détournement de substances actives au profit de dopage.

Tout comme notre controverse qui évolue sans cesse, la course poursuite entre dopeur et instances de lutte contre le dopage est de type « proie-prédateur », dans laquelle le dopeur semble toujours avoir « une molécule d’avance ». « On ne peut pas faire un choix entre le travail, le talent ou le dopage. Malheureusement, ce sont souvent les trois réunis et nous sommes un peu dans la configuration des policiers et des voleurs. Les solutions utilisées  par ceux qui organisent les filières de dopage, sont toujours en avance. »4

  1. DARMANIN Gérald. Un grand sportif, même s’il est dopé, reste un grand sportif [en ligne] Disponible sur : http://www.newsring.fr/sport/autres/1903/32641-un-grand-sportif-meme-sil-est-dope-reste-un-grand-sportif
  2. NARKAR Vihang. AMPK and PPARδ Agonists Are Exercise Mimetics. CELL, Volume 134, Issue 3, 8 August 2008, Pages 405–415 Disponible sur : http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0092867408008386
  3. Recherches Google : « buy aicar » https://www.google.fr/search?newwindow=1&client=firefox-a&hs=YqZ&rls=org.mozilla:fr:official&channel=fflb&q=buy%20aicar&um=1&hl=fr&authuser=0&biw=1366&bih=665&ie=UTF-8&sa=N&tab=iw&ei=8Bx7UeCLE8POhAfF44CQAg et « buy GW1516″ https://www.google.fr/search?newwindow=1&client=firefox-a&hs=LWu&rls=org.mozilla%3Afr%3Aofficial&channel=fflb&hl=fr&authuser=0&biw=1366&bih=665&q=buy++GW1516&oq=buy++GW1516&gs_l=serp.3..0i19l2j0i30i19l3j0i8i30i19.64040.64040.0.65147.1.1.0.0.0.0.57.57.1.1.0…0.0…1c.1.11.serp.qjzdCkzOc_Q
  4. DARMANIN Gérald. Un grand sportif, même s’il est dopé, reste un grand sportif [en ligne] Disponible sur : http://www.newsring.fr/sport/autres/1903/32641-un-grand-sportif-meme-sil-est-dope-reste-un-grand-sportif
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Les limites de la performance http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=466 http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=466#comments Mon, 15 Apr 2013 14:00:25 +0000 laguittemh http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=466

Le dopage est l’expression d’un paradoxe humain : bien que limité, l’homme rêve d’un progrès infini. Faut-il voir le dopage comme une avancée qui permettrait à l’homme de s’affranchir de ses limites ?

Les philosophes comme Isabelle Queval le disent : notre société est marquée par le progrès. D’après elle, le dépassement de soi est une utopie collective caractéristique de notre civilisation post-Renaissance. L’homme du 17ème siècle s’affranchit par la science des lois naturelles et s’ouvre l’espoir d’un progrès infini. Il est naturel qu’il l’envisage pour ses propres limites physiques.1

La controverse du dopage prend actuellement le virage de la transformation physique et de l’amélioration humaine (human enhancement). Ces questions occupent de plus en plus de place dans le débat sur le dopage. Le graphe de quantification suivant réalisé à l’aide de la base de données Scopus le montre bien. Nous avons recherché parmi les publications dont le titre, le résumé ou les mots clés contenaient « Doping » AND  « Human enhancement », pour mettre en évidence l’émergence de cette problématique il y a une dizaine d’années. L’amélioration des performances de l’homme est alors devenue une question centrale dans notre société.

Nombre de documents concernant Human Enhancement en fonction du temps

Nombre de documents concernant Human Enhancement en fonction du temps

 

Et pourtant, les records, qui constituent la mesure absolue des performances du corps humain, plafonnent. L’IRMES annonce même la fin des records !

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« Les records du monde, au delà de leur signification à l’échelle de l’histoire du sport, sont aussi sources de controverse scientifique en ce qu’ils génèrent les indicateurs des limites physiologiques humaines. »

L’équipe de l’IRMES, Institut de Recherche bioMédicale et d’Epidémiologie du Sport, vient d’analyser l’ensemble des 3263 records du monde homologués des 5 disciplines olympiques quantifiées (athlétisme, natation, cyclisme, patinage de vitesse, haltérophilie) établis entre 1896, année des premiers Jeux olympiques de l’ère moderne, et aujourd’hui. Ils concluent qu’en 2027 la moitié des records du monde ne sera plus améliorable de façon significative.

Plusieurs exemples d’ajustements exponentiels ont été publiés dans la revue PLoS One datée du 6 février 2012.2

Modèles mathématiques de l'IRMES qui montrent la convergence des performances vers des limites

Modèles mathématiques de l’IRMES qui montrent la convergence des performances vers des limites

Malgré certains facteurs extra-biologiques, comme l’amélioration des conditions d’entraînement ou bien le fait que certains sportifs soupçonnés ou convaincus de dopage détiennent des records, le débat sur les limites émerge nettement, et ce quelles que soient les voies métaboliques en jeu. En effet, le modèle mathématique proposé s’applique aussi bien pour des épreuves sportives qui font appel aux capacités aérobies (10000m en patinage de vitesse) qu’anaérobies (haltérophilie), mobilisant des groupes musculaires des membres inférieurs (cyclisme) ou supérieurs (lancer du poids), avec des efforts explosifs (saut en hauteur) ou de durée très longue (50 km marche), chez les hommes comme chez les femmes, ainsi que pour les performances collectives établies lors des relais.

 

C’est alors que surgit la question du dopage. Un dopage pour s’affranchir de nos limites. La lutte anti-dopage elle-même a intégré les limites du corps humain dans ses programmes. Le projet de passeport biométrique, qui consiste à cartographier les capacités intrinsèques de chaque athlète, accusera de dopage tout athlète capable de dépasser ses limites. Mais si le dopage est perçu comme une forme de progrès, comment peut-on l’interdire ? Il est en effet absurde de s’opposer à une forme de progrès, même au nom de valeurs sportives !

 

Le médecin-chercheur en physiologie et biologie musculaire André-Xavier Bigard, répond à cette question en trois temps.3

On n’interdit pas le progrès, on le circonscrit : le dopage est un détournement des propriétés de certaines molécules à des fins de tricherie dans le sport. Si de tels produits peuvent être prescrits à des fins thérapeutiques, ils constituent une pratique dopante et sont interdits s’ils sont utilisés pour augmenter ses performances.

Le transhumanisme est un problème éthique qui dépasse le sport : des problèmes similaires apparaissent dans notre société. Les traders subissent des pressions financières très importantes et doivent améliorer leur performance pour répondre aux exigences économiques. Il n’y a aucun code d’encadrement, laissant la porte ouverte à des pratiques peu scrupuleuses. On est là très proche du sport-confrontation, où ce qui importe est d’être plus fort que l’adversaire.

Les limitations existent pour protéger les sportifs : dépasser ses limites est particulièrement dangereux pour la Santé. Tous les produits ne sont pas utilisés dans de bonnes conditions et certains n’ont été testés que sur des animaux.

 

Cependant, toute la communauté scientifique n’est pas nécessairement de cet avis. Ellis Cashmore, professeur à l’Université de Staffordshire (Grande-Bretagne) et auteur de « Making Sense of Sports », prend position en faveur de la légalisation du dopage dans le sport de haut-niveau en vertu de la recherche constante du dépassement des limites. « In a culture that encourages the constant search for the limits of human achievement, we, the fans, the consumers of popular sports entertainment, revel in record-breaking, gravity-defying, barely believable feats on the field of play. Promoters, leagues, sponsors, advertisers and a miscellany of other interested parties dangle incentives »4

Il soutient par ailleurs qu’ouvrir le monde du sport aux pratiques dopantes apporterait plus de sécurité aux athlètes qui ne seraient plus contraints d’utiliser des produits clandestinement.

 

  1. QUEVAL Isabelle, S’accomplir ou se dépasser. Essai sur le sport contemporain, Gallimard, 2004.
  2. Institute for Biomedical Research and Sports Epidemiology (IRMES). The citius end: world records progression announces the completion of a brief ultra-physiological quest. PLoS One. 2008 Feb 6;3(2):e1552. doi: 10.1371/journal.pone.0001552. [en ligne] Disponible sur : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18253499
  3. Propos recueillis lors du 13ème colloque national de lutte contre le dopage
  4. CASHMORE Ellis. « Opinion : It’s time to allow doping in sport » – CNN.com. Mis à jour le 24 Octobre 2012. Disponible sur : http://edition.cnn.com/2012/10/23/opinion/cashmore-time-to-allow-doping-in-sport/index.html
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Qu’est-ce que la performance? http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=459 http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=459#comments Mon, 15 Apr 2013 13:58:44 +0000 laguittemh http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=459

La performance est-elle le moteur d’un sport-spectacle ou faut-il la considérer comme subsidiaire ?

Prise dans son sens anglo-saxon, la performance ouvre vers une autre dimension fondamentale du sport contemporain, celle du spectacle : une bonne partie du sport, est une activité qui se déroule devant des spectateurs. Le côté artificiel du jeu sportif qui tourne au spectacle est sans doute favorable à l’ouverture au dopage.

Dans ce débat1 s’opposent Michel Rieu, conseiller scientifique de l’Agence française de lutte contre le dopage, et Gérard Dine, médecin spécialiste du dopage, chercheur à l’Institut biotechnologique de Troyes.

Gérard Dine revendique la performance comme moteur du sport-spectacle. On demande au corps humain plus de performance, c’est une nécessité qui est devenue incontournable. Face à cela, les sports olympiques, qui ont sans cesse recherché la performance, se sont laissés entraîner dans l’engrenage. La natation, sport initialement à la marge des autres activités olympiques, a récemment focalisé l’attention médiatique et a fait basculer l’intérêt du public grâce à la pulvérisation de nombreux records à chaque rendez-vous majeur.

Aux yeux de Michel Rieu, le sport ne consiste qu’en une confrontation, où seule la victoire importe. La performance est subsidiaire. De plus, il distingue deux types de performance : la performance mesurable d’une part, la victoire dans la confrontation d’autre part. La performance mesurable est dénuée de sens : « Si je veux faire le 100m en 9s, je prends ma moto ». Et pourtant, malgré ce vide de sens, c’est à cette acception de la performance que le dopage est intimement lié.

  1. débat télévisé « le dopage des sportifs est-il inéluctable ? », Réalisation : Sylvie Allonneau ; Production : Universcience ; Durée : 31 min 26 s ; Diffusion : 2010. http://www.universcience.tv/video-le-dopage-des-sportifs-est-il-ineluctable–5039.html
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L’amélioration de la Performance, comme critère du dopage http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=464 http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=464#comments Tue, 09 Apr 2013 13:59:18 +0000 laguittemh http://www.controverses-minesparistech-7.fr/wordpress/?p=464 Nous avons pu voir que la définition même de la performance est complexe. Dans ce contexte, peut-on définir des critères pertinents pour déterminer si une substance doit être prohibée ?

Une des pierres angulaires du code mondial antidopage est la liste des substances interdites.1 Il s’agit d’un standard international identifiant les substances et méthodes interdites en et hors compétition, parfois spécifiques pour chaque sport. Puisque de nouvelles molécules voient régulièrement le jour en matière de dopage il incombe à l’AMA de mettre à jour cette liste annuellement.

Jusqu’à présent, pour qu’un produit se voit inscrit sur cette liste, il devait remplir deux des trois critères suivants :

- La preuve médicale ou scientifique, l’effet pharmacologique ou l’expérience démontrant que la substance ou la méthode, seule ou combinée à d’autres substances ou méthodes, a le potentiel d’améliorer ou améliore effectivement la performance sportive

- La preuve médicale ou scientifique, l’effet pharmacologique ou l’expérience démontrant que l’usage de la substance ou de la méthode présente un risque avéré ou potentiel pour la santé du sportif

- La détermination par l’AMA que l’usage de la substance ou de la méthode est contraire à l’esprit sportif tel que décrit dans l’introduction du Code mondial antidopage.

Cependant, dans la version révisée du code prévue pour 2015, l’AMA compte supprimer les deux derniers critères.

 

Est-ce que seule l’amélioration de la performance peut compter ?

La récente proposition de l’AMA de réduire les critères qui déterminent si une substance est prohibée ou non, fait débat. Nous avons rencontré au 13ème colloque national de lutte contre le dopage des voix qui s’élevaient contre cette décision.

Pour Michel Rieu (conseiller scientifique de l’Agence Française de Lutte contre le Dopage) cette décision est dangereuse. « L’augmentation de la performance » reste une dénomination très vague. Les premières victimes de ce flou seront d’ailleurs les études cliniques visant à incriminer certaines substances. Les designs d’études cliniques nécessaires pour prouver une amélioration de la performance sont en effet très complexes. Car si une molécule peut améliorer tel métabolisme, son influence sur la performance globale peut être beaucoup moins évidente.2

Pour Jean-Marc Julien (pharmacien rattaché au Ministère des Sports), le flou autour de la définition de performance compliquera également la tâche de la lutte antidopage. Celui-ci ouvre en effet la porte aux contestations de tous les sportifs soupçonnés de dopage. Un doute sera possible si la prise de produits n’a pas entrainer une hausse des performances. Auparavant, du moment qu’un produit était prohibé, sa prise suffisait pour être dopé. On voit là que ce changement de critère engage également un débat sur la définition même du dopage.3

Enfin, cette décision consacre la performance comme but ultime du sport. Elle la place même au-dessus de la Santé du sportif. Si des mesures protégeant les athlètes ne sont pas prises de concert avec la décision de l’AMA de ne considérer que la performance comme critère de prohibition, cette dernière représente un danger pour l’athlète. Comme le dit le Dr Alain Lacoste, médecin du sport membre de la fédération internationale d’aviron, “Tout le monde dit que le dopage est un problème de Santé Publique, alors prenons des mesures sanitaires. »4

 

  1. Liste des substances et méthodes interdites 2013. Code mondial antidopage. http://list.wada-ama.org/fr/
  2. RIEU Michel. Existe-t-il des critères permettant de définir les substances comme ergogéniques ? Propos recueillis lors du 13ème colloque national de lutte contre le dopage
  3. JULIEN Jean-Marc. Application aux glucocorticoïdes. Propos recueillis lors du 13ème colloque national de lutte contre le dopage
  4. Propos recueillis lors du 13ème colloque national de lutte contre le dopage
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