Des cultures pour capturer l’azote

Les CIPAN: Capturer l’azote du sol

Parmi cette interconnexion de flux que le lecteur est en train de parcourir, il en est bien sûr un qu’il faut à tout prix chercher à diminuer, à savoir ceux des nitrates percolant dans le sol pour polluer les eaux…Ce type de perte, une solution existe pour la contrôler en partie. Ce sont les CIPAN. Leur utilisation est préconisée et réglementée par la Directive Nitrates et par les programmes d’action nationale. Aussi, en marge de la mise en place du 5ème programme d’action nationale (en vigueur depuis 2013), les ministères de l’Agriculture et de l’Écologie ont commandé à l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA), un rapport “Réduire les fuites de nitrate au moyen des cultures intermédiaires”, synthétisant l’état des connaissances et des références agronomiques à ce sujet à l’heure actuelle. Quelques éléments pour comprendre de quoi il s’agit.

CIPAN, ça veut dire quoi?

Entre deux rotations de cultures, d’une année sur l’autre, comment faire en sorte que l’excédent d’azote n’aille pas se diffuser dans les sols et s’en aller polluer ? Une idée simple : faire une culture intermédiaire qui le fixe.
C’est qu’on appelle une Culture Intermédiaire Piège à Nitrates (CIPAN). C’est une culture de plantes à croissance rapide, semée entre deux saisons, durant la période d’interculture.

A quoi ça sert ?

La CIPAN [1] va jouer un rôle essentiel pour le sol à la sortie d’une culture, où cela va contenir une part d’azote sous forme de nitrates, et du surplus d’azote libéré par les matières organiques épandues. Et ceci, précise le rapport de l’INRA, “même lorsqu’une fertilisation raisonnée de la culture précédente laisse peu de nitrates, puisque la minéralisation des matières organiques produit en continu de l’azote, qui peut être lixivié”.

A la fin de l’été, au terme de la récolte, les sols sont à nu jusqu’au prochain semis (automne ou printemps). Au cours de l’hiver, les pluies drainent l’excédent de nitrates des sols jusque dans les nappes phréatiques. C’est le phénomène de lixiviation[2].

Pour atténuer ce phénomène, on fait appel aux CIPAN. Juste après la récolte est semée cette nouvelle culture, qui va absorber l’excédent d’azote du sol pour sa propre croissance. Avant le prochain semis, la CIPAN est détruite, et ses résidus vont à leur tour libérer, par leur dégradation au printemps, de l’azote qui va bénéficier à la culture suivante.

La CIPAN permet donc de stocker l’azote en surplus d’une saison à l’autre, évitant ainsi perte économique, et pollution.

Qu’utilise-t-on fréquemment comme CIPAN ?

Parmi les CIPAN les plus fréquentes, on peut citer : l’avoine, le ray-grass, la moutarde, la phacélie, le colza fourrager, le seigle…
Le choix de la culture n’est pas sans conséquence. Il est soumis à des contraintes agronomiques, chronologiques, et bien sûr, économique : culture qui va suivre (car certaines cultures se parasitent entre elles), date du prochain semis (la culture doit être suffisamment rapide), facilité de destruction, coût de la semence…

Les nitrates possèdent en outre d’autres fonctions intéressantes :
⁃ lutte contre les mauvaises herbes
⁃ amélioration de la structure du sol par effet racinaire
⁃ lutte contre l’érosion : la couverture végétale diminue l’impact au sol de la pluie
⁃ production de fourrage pour l’élevage, si on opte pour une culture fourragère (luzerne, colza…)
⁃ production d’humus [3]: la décomposition de la culture enrichit la terre en matière organique

Mais pas une solution miracle ?

Une CIPAN, c’est une culture supplémentaire. C’est donc une certaine organisation, la demande de la mobilisation des agriculteurs, et surtout, ça reste un coût pour l’agriculteur. D’après le rapport de l’INRA, “un calcul sur les références techniques disponibles permet d’estimer ce coût entre 54 et 110€ par hectare”. Une solution, donc, relativement onéreuse.

Par ailleurs, les CIPAN ne restent efficaces que si le reliquat d’azote dans les sols reste modéré. Selon l’INRA[4], une situation de départ à 60 kg d’azote par hectare pourra être bien corrigé, en revanche les CIPAN “ne permettent pas de restituer systématiquement une eau de drainage à moins de 50 mgNO3/L”.




 

flux gazeux Epandage engrais industriels engrais organiques nourrir les plantes Lixiviation nappes législation flux échelons eutrophisation eau potable HTML Map

[1]“CIPAN : quand l’outil réglementaire devient un atout agronomique et faunistique”, Faune Sauvage, n°291, 2ème trimestre 2011.
5ème programme d’action national, issu de l’arrêté du 19 décembre 2011 et consolidé par l’arrêté du 23 octobre 2013, texte intégral consulté sur http://draaf.rhonealpes.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/20131101_ArretePANConsolide_cle07fc61.pdf
[2]Source : Actu-Environnement, directionnaire de l’Environnement http://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/lixiviation.php4
[3]Source : Actu-Environnement, directionnaire de l’Environnement http://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/humus.php4
[4]INRA, « Réduire les fuites de nitrates au moyen des cultures intermédiaires », résumé du Rapport commandé par le Ministère de l’Agriculture et le Ministère de l’Écologie, Juin 2012, 8 p.