Le Régime sans gluten, un effet de mode ? http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20 Une étude de controverse Tue, 07 Jun 2016 22:28:53 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.4.2 http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/wp-content/uploads/2016/05/cropped-3780639911_096714c09b_b-32x32.jpg Le Régime sans gluten, un effet de mode ? http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20 32 32 Professionnels de la santé, chercheurs et groupes de chercheurs http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/2016/05/16/140/ http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/2016/05/16/140/#respond Mon, 16 May 2016 16:13:32 +0000 http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/?p=140 Continue reading ]]> Catherine Bourron – Normand

Nous avons réalisé ce travail suite à notre entretien avec elle en février 2016.

Catherine Bourron-Normand est une diététicienne diplômée de l’Etat en 1982, spécialiste de l’alimentation de l’enfant.

Elle a exercé son métier à l’hôpital de Montreuil pendant trois ans puis plus d’une quinzaine d’années à l’hôpital d’enfants Antoine Trousseau (Paris). Depuis 2003, elleprend en charge des consultations au Centre Médical Spécialisé de l’Enfant et de l’Adolescent (CMSEA) à Paris, avec des enfants atteints de pathologies de la nutrition.

Elle est l’auteur de plusieurs ouvrages de conseils nutritionnels pour les enfants, co-écrits avec Béatrice Vigot-Lagandre, auteure et journaliste culinaire:

  • 115 recettes gourmandes pour allergiques, petits et grands paru aux Editions Solar en février 2009
  • L’alimentation de nos petits, paru aux Editions Solar en octobre 2009
  • 120 recettes pour allergiques et intolérants au lait, paru aux Editions Le Sureau en juillet 2013
  • L’alimentation des tout-petits, paru aux Editions Solar en février 2015

Implication dans la controverse

Catherine Bourron-Normand était présente lors de l’évènement « Because fait sauter les clichés #sansgluten au BHV Marais » le 1er février dernier. A cette occasion nous avons pu la rencontrer une première fois et convenir d’un entretien que nous avons réalisé dans les semaines suivantes, durant lequel nous avons pu recueillir ses opinions à propos du régime sans gluten.

Pour Catherine Bourron-Normand, il faut distinguer la maladie cœliaque et les patients diagnostiqués, des individus qui suivent un régime sans gluten (il manque une précision). La maladie cœliaque ne fait pas l’objet d’une controverse, « tout le monde est d’accord » nous dit-elle. On a des critères objectifs : amaigrissement, carences. La diététicienne pense que « la controverse c’est l’hypersensibilité au gluten ou tous les individus qui disent « j’ai retiré le gluten et je me suis mis à mincir » ». 

Pour elle, le problème du régime sans gluten dans le cas des hypersensibles au gluten est qu’ « il peut y avoir des niveaux de tolérance [au gluten], c’est-à-dire que ce n’est pas forcément zéro gluten », ce qui pose la question du niveau d’exclusion du gluten dans l’alimentation.

La diététicienne affirme que « l’effet placebo des régimes peut se voir, clairement ». Elle distingue deux cas: « si on est sur un terrain psychologique difficile, de gens stressés, on peut aussi avoir des troubles du transit, on sait qu’il y a des liens très forts. Donc […] le régime sera un régime d’épreuve : ralentir un peu les fibres, le gluten, le lait », c’est ce qui est appelé le côlon irritable, ou « régime d’épargne digestive » dans le langage hospitalier. Par ailleurs, elle défend l’idée qu’il y a « une fraction de la population qui, quand elle se met au régime sans gluten, va plus s’occuper d’elle-même », ce qui explique selon elle que certains observent des résultats bénéfiques du régime sans gluten. . Ces derniers perdraient en effet en qualité gustative. Donc les effets bénéfiques du sans gluten chez les patients sains seraient selon elle plus psychologiques que liés au gluten. « L’effet de mode, il est là dessus: « c’est côlLa diététicienne n’a pas constaté, au sein de sa patientelle, une augmentation du nombred’intolérants au gluten (« dans les milieux médicaux on ne dit pas qu’on a une énorme augmentation des hypersensibles »),  mais elle souligne qu’il y a une demande accrue en produits sans gluten: « on voit bien quand même dans les boutiques bio qu’il y a du potentiel pour des produits sans gluten et pour des gens qui ne sont pas cœliaques ». Le régime sans gluten serait pour elle plus une polémique, elle fait référence au débat sur le lactose quelques années auparavant (aulequel elle a aussi pris part, puisqu’elle a publié en 2009 le livre de cuisine 120 recettes pour allergiques et intolérants au lait): « C’est un peu la même polémique que celle sur le lait, c’est-à-dire que aujourd’hui on est au sans gluten mais il y a cinq, six ans en arrière, on avait la même chose avec le lait de vache ». Selon elle, « on n’a pas de raison, si on n’a pas de pathologies associées, de ne pas digérer [le gluten] ».

            Catherine Bourron-Normand suggère que la réelle question autour du régime sans gluten serait finalement: « Si on n’est pas cœliaque, si on n’est pas hypersensible, et qu’on se met au régime sans gluten, est-ce que c’est utile ? » Pour elle, on ne se pose pas assez la question du bien-être des individus. Même s’il s’agit d’une tendance, le régime sans gluten inscrit dans une logique du « je prends du temps pour moi », aurait des effets bénéfiques. « On sait très bien aujourd’hui que ce n’est pas du scientifique pur, mais ça a un impact sur la digestion, sur l’état nutritionnel en général ». Et le régime sans gluten n’est pas carencé: « dans le blé, il n’y pas la vitamine ou le minéral qu’on ne trouverait que dans ce produit là, donc si on retire le gluten et qu’on remplace par d’autres produits céréaliers, il n’y a pas de souci». Ainsi le régime sans gluten peut être bénéfique, puisqu’il pousse les individus à prendre du temps pour soi. Le problème résiderait plus selon elle dans la réintroduction du gluten après un régime: « c’est plutôt la réintroduction qui pose problème, parce qu’on n’a plus les enzymes digestives qui vont devoir digérer le gluten, c’est plutôt la réadaptation au gluten et est-ce qu’on peut déclencher des allergies parce qu’on n’a plus consommé de blé par exemple, la question pour l’instant reste ouverte ».

Et elle rappelle que dans le cas d’une hypersensibilité au gluten, le manque de connaissances scientifiques fait du régime sans gluten un « régime d’épreuve », comme outil de diagnostic d’une pathologie pas forcément liée exclusivement au gluten. Elle dit : « Quand on parle des hypersensibles au gluten, il ne faut pas oublier qu’il n’y a pas que le point de vue gluten, il y aussi les fibres, et puis encore des personnalités psychologiques particulières  ».

Pour la diététicienne, les points de tension à propos du régime sans gluten au sein de la sphère scientifique résident dans des divergences entre « médecins traditionnels » et « médecins naturopathes – homéopathes ». Elle explique que « dans la médecine traditionnelle, on va aboutir à un régime d’exclusion que si on a des critères objectifs pour le faire » alors que la médecine « moins traditionnelle » va avoir recours plus spontanément au régime sans gluten selon elle. Le régime sans gluten aurait gagné en légitimité ces dernières années : les médecins traditionnels auraient découverts qu’« il y avait quand même certains patients qui allaient mieux en étant sans gluten et avec un régime pauvre en FODMAP » et elle nous explique que l’hypersensibilité au gluten  aurait été traitée  par le Docteur Lemale, lors d’un congrès en octobre dernier, ce qui « était la première fois ». Cependant, lorsque nous lui demandons si l’intérêt récent pour le sans gluten ne serait pas du fait d’une importance accrue accordée à des maux qui n’étaient pas considérés comme pénibles auparavant, elle nous répond que « dans les milieux fermés, non ouverts aux journalistes, oui c’est un peu ce qu’on dit, clairement c’est ça ».

Catherine Bourron-Normand ne s’oppose pas à la production industrielle de produits sans gluten: « l’agroalimentaire a tout intérêt à proposer des choses. De toute façon il y avait un gros manque, le fait qu’il y ait les hypersensibles qui sont arrivés, l’effet de mode du sans gluten, du coup ça fait plus de monde […] je pense que c’est vraiment des choses qui ont été développées parce qu’il y avait un marché en augmentation ». En réaction à un article paru dans le numéro de février 2016 du mensuel 60 millions de consommateurs, qui critique la dimension non naturelle des produits industriels sans gluten, Catherine Bourron-Normand rappelle que: « il y a quelques conservateurs [dans les produits], ça me parait normal, comme dans tous les produits tout prêts il y a des conservateurs sinon ça s’appelle de l’artisanat et on ne les conserve pas dans ses placards ». Elle s’oppose à l’idée d’une industrie agroalimentaire « responsable de tous nos maux »: pour elle, « chacun est responsable vraiment de son alimentation », « je ne vois pas pourquoi l’agroalimentaire ne surferait pas sur la vague et ne proposerait pas des produits sans gluten ».

La diététicienne a participé à l’évènement du site Because Gus au BHV Marais à la demande des blogeuses, mais elle n’est pas attaché à une association liée au sans gluten: pour elle « c’est compliqué d’être à la fois professionnel et dans une association, parce qu’il y a des partis pris qui se font et qui ne sont pas toujours de l’ordre du professionnel ». En particulier, elle critique la démarche de l’AFDIAG, qui tendrait à « victimiser tous les cœliaques » : « Je comprends, mais je trouve que la façon de présenter les choses pose problème. Beaucoup de patients n’adhèrent pas à l’AFDIAG pour ces raisons là parce que c’est un peu lourd, il y a un petit côté victime un peu désagréable ». Cependant, elle ne nie pas l’importance d’associations de ce type, « il y a des problèmes sociaux, c’est le rôle de l’association de les traiter pour essayer de faire qu’il y ait plus de produits […] ils font quand même un travail intéressant, le fait qu’ils soient une association avec des patients actifs permet de faire aussi progresser les choses dans les restaurants par exemple ».

Christophe Cellier

Christophe Cellier est professeur gastro-entérologue à l’Hôpital Européen Georges Pompidou, où il dirige le service d’hépato-gastro-entérologie et d’endoscopie digestive. Il a été Président de la Société Française d’Endoscopie Digestive du 28 mars 2011 au 20 mars 2013 . Il travaille sur la prévention et le dépistage du cancer colorectal.Le Professeur Cellier travaille sur le syndrome du côlon irritable et effectue des tests de détection de la maladie cœliaque. Il est impliqué dans la controverse car il travaille sur les mécanismes de l’hypersensibilité, dans l’objectif de parvenir à la détecter clairement. Ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui.

Implication dans la controverse

Christophe Cellier insiste sur le manque de connaissances sur l’hypersensibilité. «L’hypersensibilité au gluten est un concept plus récent, un peu fourre-tout, dont on ne connaît pas les mécanismes ni les véritables causes. » « Pour la maladie cœliaque on a des outils pour poser le diagnostic de façon objective. Chez les hypersensibles, c’est juste le fait de supprimer le gluten qui les améliore et de le réintroduire qui ré-déclenche les symptômes. On n’en connait pas les mécanismes et on est en train de travailler dessus… On n’a pas d’outils comme on en a dans la maladie cœliaque ». Selon lui, dans le cas de l’hypersensibilité, « le régime sans gluten est probablement moins vital » que dans le cas de patients cœliaques. Le seul cas où l’on peut affirmer que le gluten est dangereux est celui des patients cœliaques car on connait les mécanismes qui entrent en jeu dans leur corps en cas d’ingestion de gluten. Dans le cas de l’hypersensibilité, le manque de connaissance des mécanismes ne permet pas de conclure sur le gluten. Il cite une enquête australienne de 2013 et dit qu’il y aurait: « Peut-être une autre piste pour expliquer l’hypersensibilité. »

Il n’est pas opposé au fait de commencer un régime sans gluten, si cela permet à la personne de se sentir mieux. Cependant, il souligne le risque de passer à côté de la détection d’une maladie cœliaque, dont le suivi doit être très rigoureux. « Si on a commencé un régime sans gluten, c’est compliqué d’arriver au diagnostic, alors que c’est relativement important d’avoir un diagnostic clair au départ ».

Le Professeur Cellier affirme ne pas comprendre l’engouement pour le régime sans gluten chez les personnes non diagnostiquées cœliaques. « Je n’ai aucune explication rationnelle à donner, je ne comprends pas cette mode des régimes d’exclusion. Le gluten n’a aucune valeur nutritive : en consommer ou non n’apporte rien de plus, rien de moins. Le «zéro gluten» est indispensable pour les malades mais pour le reste, je pense que c’est surtout un argument marketing». «Le régime sans gluten est par ailleurs particulièrement coûteux, ce qui peut mettre certaines personnes en difficulté, sans compter le risque d’isolement social lorsqu’il devient difficile de manger ailleurs que chez soi».

Jean-Michel Lecerf

Jean-Michel Lecerf

Jean-Michel Lecerf est médecin spécialiste en endocrinologie et maladies métaboliques. Il travaille actuellement sur les maladies métaboliques au Centre Hospitalier Régional Universitaire de Lille en tant que praticien, et dirige une équipe de recherche en nutrition à l’Institut Pasteur de Lille. Il a participé à plus de 250 articles scientifiques dans des revues à comité de lecture et à plus de 400 publications dans des revues médicales et/ou scientifiques. Il a fondé Nutrinvest, un centre d’études en nutrition où des expériences sont menées pour comprendre les mécanismes nutritionnels. Il a travaillé sur les questions de nutrition dans les pays défavorisés et est spécialiste des questions d’obésité. Il est le Président de l’Association Pain Qualité. Enfin, il fait partie de l’Observatoire Cniel des Habitudes Alimentaires (Ocha), qui regroupe des spécialistes des médecins, des anthropologues ou encore des sociologues comme Claude Fischler. Il est l’auteur notamment de A chacun son vrai poids : la santé avant tout, Odile Jacob, Paris (2013). (Sources ?)

Implication dans la controverse

Selon lui, le régime sans gluten répond avant tout à un effet de mode : « C’est une mode qui donne aux magazines quelque chose à se mettre sous la dent !  […] Non seulement il n’y a pas d’études qui démontrent un quelconque bénéfice à arrêter le gluten mais en plus il n’y a aucune raison qu’il y en ait ! »[. Il pointe du doigt un régime d’exclusion auquel de plus en plus de gens adhèrent en voyant les produits se multiplier dans les supermarchés : « À partir du moment où un distributeur se lance dans une gamme sans gluten, on entretient le fait qu’il y a un problème de santé publique majeur. On l’a vu et on le voit avec le sans lactose, le sans aspartame, le sans huile de palme… ».

Il défend l’idée que le sentiment d’amélioration de la santé après l’arrêt de la consommation du gluten est du ressort psychologique : « Effet placebo (ou nocebo). Je vois des gens qui disent avoir arrêté le gluten et du coup se sentent mieux. Pourtant, ils n’ont pas arrêté le pain… ». Il constate que « Ces peurs alimentaires […] n’existent que dans nos pays dits développés ». Selon lui, on prend plus en compte notre bien-être : « on est un peu des enfants gâtés ».

Il remet en cause le fait de pointer l’hypersensibilité comme quelque chose de donné alors qu’on manque d’informations dessus : « Les gens ont inventé l’hypersensibilité au gluten : c’est un machin flou qui n’a rien à voir avec la vraie intolérance et ne repose sur absolument rien. ». Un autre élément par lequel il remet en cause l’engouement pour le régime sans gluten est que la question des Fodmaps est peu connue dans l’opinion publique alors qu’elle serait davantage problématique : « Dans 95 % des cas, ça n’a rien à voir avec le gluten et c’est plutôt une intolérance à des sucres spéciaux qu’on trouve dans le blé mais pas dans le gluten.»[

Il dit que le régime sans gluten est une contrainte et qu’il ne faut pas supprimer le plaisir de manger. « Arrêter le gluten, c’est se compliquer la vie si ça n’est pas une nécessité mais en plus, si on ne fait pas attention, on peut déséquilibrer son alimentation. ».

Jean Michel Lecerf se voit reprocher d’être impliqué avec le lobby du lait et du blé et donc de prendre la parole contre les régimes d’exclusion du lait et du blé pour préserver ses intérêts. C’est notamment le cas de Julien Venesson qui le cite sur son blog dans un article intitulé « Gluten : Liste des médecins qui cachent leurs intérêts », du fait  qu’il est le Président de l’Association Pain Qualité.

Christian Rémésy

Christian Rémésy est un nutritionniste français. Il a été directeur de recherche au sein de l’unité Maladies métaboliques et micronutriments à l’Institut National de Recherche Agronomique (INRA) jusqu’en 2014. Il est l’auteur de plus de 150 articles scientifiques et auteur d’ouvrages comme : Que mangerons-nous demain ?, Alimentation et santé et L’Alimentation durable. Il s’intéresse à la traçabilité de la nourriture, aux conditions d’une alimentation durable en Europe, ainsi qu’à la lutte contre l’obésité. Dès 2013, avec l’apparition de nombreux produits sans gluten et un certain engouement pour le régime « gluten free », il commence à s’exprimer sur le gluten. Il défend la vulgarisation de ce qu’on sait sur le sujet et lie la question du gluten à celle de l’évolution des technologies boulangères. Il a contribué à de nombreux articles dans la presse généraliste, principalement dans Libération (6 depuis 2005) et Le Monde.

Implication dans la controverse

Il parle d’une «phobie du gluten», qui se serait développée du fait d’un manque de vulgarisation sur la question du gluten : « Au niveau sociétal, il est important maintenant de mettre un terme à cette phobie du gluten par une meilleure vulgarisation de cette question afin d’éviter le développement de fausses solutions alimentaires et d’entretenir des peurs inutiles. ». Pour lui, il est important de présenter ce qu’est le gluten, les aliments dans lesquels on en trouve et ceux qui peuvent poser des problèmes de digestibilité pour les patients hypersensibles. « Si la prévention de la maladie cœliaque requiert l’exclusion de toutes les sources de gluten, une mesure diététique aussi drastique n’est sans doute pas nécessaire dans le cas de l’hypersensibilité au gluten, et seuls certains aliments pourraient poser problème. Or, en l’absence de vulgarisation claire sur ce sujet, les patients concernés excluent indistinctement tous les aliments contenant du gluten de blé, de seigle, d’orge ».

Pour lui, le cœur de la question sur la nocivité du gluten se trouve dans l’évolution des techniques boulangères. L’aspect gonflé, que les acteurs de la « filière blé-pain », cherchent à donner au pain passe par une sélection spéciale : « Afin de faciliter la panification, le blé a été sélectionné pour donner des glutens très performants, avec ces fameuses gluténines de très haut poids moléculaire.» Or cette sélection rend le pain moins digeste du fait des conséquences d’un gluten lourd dans les étapes de pétrissage et de fermentation : « Le pétrissage, même s’il est peu intensif comme dans le pain de tradition française, crée un véritable film viscoélastique séparé des grains d’amidon, ce qui accentuerait la difficulté des enzymes pancréatiques à scinder le gluten, obligeant la paroi intestinale à prendre un relais difficile. L’enrichissement fréquent des farines en gluten exogène ou en acide ascorbique augmente la résistance du film glutineux pour piéger le CO2, ce qui entraîne un surcroît de travail pour la digestion pancréatique. ». La question de l’ajout de gluten est encore plus problématique selon lui : « Certes, il existe sans doute une phobie exagérée vis-à-vis du gluten, mais on ne peut nier que le gluten des blés modernes a des propriétés viscoélastiques plus fortes que celui des blés anciens, et pourquoi ajouter du gluten dans des farines qui en sont déjà bien pourvues ? ». Il désigne ce développement technologique (sélection et ajout de gluten) comme un acte de « manque de vigilance » : le développement de la boulangerie s’est fait sans se préoccuper de la digestibilité des glutens et serait à l’origine des symptômes digestifs chez des non-cœliaques. Pour lui, la question majeure autour du glutengluten est donc celle d’un meilleur contrôle de la digestibilité au sein de la filière blé-pain : « Je dirais qu’il faudrait aller pas nécessairement vers moins de gluten mais vers mieux de gluten, c’est-à-dire un gluten qui soit mieux digestible, mieux adapté à notre physiologie intestinale ».

Il souligne qu’il y a une pluralité de glutens, en fonction des aliments, et tous ne posent pas problème. « Le premier biais c’est de mettre tous les aliments, tous les glutens dans le même sac». « A la différence du pain, il n’y a pas formation dans les pâtes d’un film de gluten séparé des grains d’amidon (le gluten continue à enchâsser les grains d’amidon, les empêchant ainsi de coller). De plus, leur cuisson en milieu très hydraté facilite la dénaturation du gluten et sa digestibilité. Les pâtes ne sont à interdire que pour les cœliaque car elles sont parfaitement digestibles par tous». En revanche, le pain peut poser problème : « C’est dans le pain courant que le gluten peut poser le plus de problèmes ». De plus, même pour le pain où le gluten présente des risques pour la digestibilité, il reste encore majoritairement digéré par les personnes : « Malgré les dérives actuelles de la sélection du blé et des techniques de panification, le pain demeure un aliment digestible et bien toléré par une très grande majorité de personnes ».

Christian Rémésy prône un contrôle de la digestibilité des pains et propose plusieurs solutions. « Nous savons déjà que la panification au levain est une solution satisfaisante, en amorçant une dégradation précoce du gluten par l’acidification de la pâte.». Selon lui, la vague du sans-gluten doit être un signal pour la filière blé-pain qu’il est temps de se renouveler  et de se préoccuper de sa durabilité : « Le secteur de la boulangerie gagnerait maintenant à s’orienter vers cette nouvelle approche de la panification et à la pérenniser dans un nouveau cahier des charges ».

Dans le cas des sportifs qui passent au « sans gluten », il parle de « recettes magiques : si le gluten ne pose pas de problèmes particuliers, arrêter d’en consommer n’est pas une méthode fiable pour améliorer ses performances. De manière plus large, il dit « qu’il y a dans cette phobie du gluten une part de rumeur et d’effet de mode».

Société Nationale Française de Gastro-Entérologie (SNFGE)

Cette société se présente comme la société savante des maladies et cancers de l’appareil digestif sur son site officiel. Elle a été fondée en 1947, c’est une association loi 1901. Cette société est composée de plus de 2200 membres qui sont des médecins, chirurgiens, chercheurs et internes, Charlotte Fafart-Touzard en est le directeur exécutif. Cette association a pour objectif, selon son site internet, d’améliorer les connaissances médicales en « hépato-gastroentérologie et oncologie digestive », d’organiser des formations continues du corps médical, d’évaluer les pratiques et de favoriser la recherche ainsi que les échanges entre médecins français et étrangers dans ce domaine, et enfin de promouvoir  « la discipline et sa lisibilité auprès des institutions, des tutelles, du corps de santé et du public »
.

Représentation de l’association :

Charlotte Fafart-Touzard est donc le directeur exécutif de cette association. Mais plus précisément, nous remarquons que le Professeur Philippe Ducrotté a rédigé un article dans la rubrique GastroScoop du site internet de La SNFGE. Ce professeur travaille dans le service d’hépato-gastroentérologie et de nutrition de l’hôpital Charles Nicolle, à Rouen.

Implication dans la controverse :

Le Professeur Philippe Ducrotté rédige pour la SNFGE un article en ce basant sur un article de la revue Gastroenterology et explique que le régime sans gluten ne semble pas directement utile pour l’amélioration de la santé de certains individus atteints d’un syndrome de l’intestin irritable (SII). En effet, le principal problème de ces individus serait les FODMAP (qui sont certains sucres comme les oligosaccharides, disacharrides et monosaccharides fermentescibles et polyols). Il évoque clairement les incertitudes quant aux bienfaits d’un régime sans gluten pour les individus qui ne sont pas atteints de la maladie cœliaque mais qui ont des troubles digestifs : « L’effet du gluten dans la 2eme partie de cette étude est plus difficile à interpréter car, manifestement à la surprise des auteurs, l’introduction de faibles ou de fortes doses de gluten mais également de placebo (protéines du petit lait) s’est soldée par une dégradation symptomatique progressive que les auteurs attribuent à un phénomène d’anticipation des symptômes. Des études supplémentaires sont donc nécessaires pour définir la place d’un régime appauvri en gluten dans la stratégie thérapeutique du SII ».

]]> http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/2016/05/16/140/feed/ 0 Associations http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/2016/05/11/note-dintention/ http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/2016/05/11/note-dintention/#respond Wed, 11 May 2016 21:15:05 +0000 http://www.controverses-minesparistech-4.fr/~groupe20/?p=76 Continue reading ]]> L’Association Française Des Intolérants Au Gluten (AFDIAG)

Cette association, créée en 1978, a pour but de défendre les intérêts des individus intolérants au gluten et notamment les individus atteints de la maladie cœliaque. Elle souhaite faciliter et étendre les diagnostics de la maladie et proposer plus de possibilités d’alimentation pour les gens qui se retrouvent obligés de réaliser un régime sans gluten. (Source ?)

Représentation de l’association :

Brigitte Jolivet, la présidente de l’AFDIAG, représente l’association et cette dernière s’exprime  dans la presse : elle explique que l’on trouve de plus en plus de produits adaptés aux intolérants au gluten et l’association s’est longtemps battue pour ça. Elle met par contre en garde : « Aujourd’hui, le message important est de ne pas débuter de régime sans gluten avant d’avoir fait une recherche diagnostique de maladie cœliaque avec les bons examens (une simple prise de sang pour rechercher les anticorps spécifiques IgA anti-transglutaminase et une analyse de biopsies intestinales, remboursées par la Sécurité Sociale) ». Elle regrette également, dans cet article, que seulement 10 à 20% des individus cœliaques soient réellement diagnostiqués.

Catherine Remilleux-Rest est l’une des vice-présidentes de l’association et elle s’exprime notamment dans l’article « La vogue du sans gluten brouille les cartes ». Elle y déplore l’apparition d’une « fièvre anti-gluten » et explique que « le régime sans gluten est souvent assimilé à un régime d’agrément et pas toujours pris au sérieux ». De plus, elle constate l’apparition de nombreux restaurants qui proposent des produits « sans gluten » alors même que ces derniers sont souvent contaminés dans les cuisines et que cela représente un véritable souci pour les cœliaques. Pour avertir davantage, Catherine Remilleux-Rest  organisait un colloque sur le sujet le 31 janvier 2015 à Marseille.

Implication dans la controverse

L’AFDIAG est une association qui concerne seulement les intolérants au gluten et non la sensibilité au gluten. Elle se donne trois objectifs principaux : « Informer, aider et défendre les intérêts des intolérants au gluten. Collaborer avec les professions médicales, les instances gouvernementales, les industriels de l’agroalimentaire, les fabricants et distributeurs de produits diététiques sans gluten, les professionnels de la restauration, etc. Soutenir la Recherche sous forme de dons (bourses de recherche sélectionnées par un Comité scientifique indépendant) ». L’association agit pour améliorer les conditions de vie des malades cœliaques : « l’AFDIAG lutte quotidiennement pour une bonne réglementation de l’étiquetage des produits alimentaires, pour l’augmentation du remboursement des produits sans gluten et pour le développement de l’alimentation sans gluten dans les collectivités ». Sur son site internet, on trouve un grand nombre d’informations sur cette association qui comporte aujourd’hui plus de 6000 familles adhérentes. Elle intervient ainsi régulièrement dans les débats et notamment dans des quotidiens nationaux et est citée dans des émissions de radios. En effet, même si « du côté des malades, ce phénomène (d’augmentation du nombre de produits sans gluten disponibles) est vu d’un très bon œil » et que l’AFDIAG soutient ainsi les initiatives des industriels, elle regrette la banalisation du régime sans gluten et le grand nombre d’individus qui débutent un tel régime sans avoir été diagnostiqués. L’AFDIAG pointe sur son site internet un véritable « paradoxe du gluten »  : en effet il y a un paradoxe entre le 1% de la population touché par la maladie cœliaque, le grand nombre de personnes, au sein de ce pourcentage, qui ne sont ni détectées, ni traitées et enfin le nombre toujours grandissant de gens s’adonnant à un régime sans gluten, défendant un meilleur état de santé lorsqu’ils suppriment cette protéine de leur alimentation (alors même qu’ils ne sont pas cœliaques).

Il apparaît aussi que cette association ne soit pas toujours appréciée, même par les malades. En effet, en nous rendant à la conférence sur le sans gluten, à l’occasion de la chandeleur, le 1er février au BHV Marais à Paris. L’intervenante Jeanne (écrivaine d’un livre de recettes sur le sans gluten et malade cœliaque) explique qu’elle trouve que l’AFDIAG associe trop les malades à des victimes alors même qu’elle n’avait, elle, pas envie d’être considérée comme telle. Ce point de vue semblait également partagé par la diététicienne Catherine Bourron-Normand (voir sa fiche acteur).

L’association « Salé Sucré » : le site glutenfreeinparis.com

L’association « Salé Sucré » est une association visant à faciliter et populariser les régimes alimentaires pour les personnes souffrant d’intolérances alimentaires, notamment le gluten. Elle est à l’origine d’un site web consacré essentiellement au régime sans gluten: glutenfreeinparis.com

L’objectif du site web de l’association est de « promouvoir une alimentation saine et savoureuse, par le biais de différentes activités culinaires »[1]. Il se déclare comme « Site d’informations des lieux sans gluten et sans allergènes à Paris »[2].

Le site web s’adresse principalement aux Parisiens. Il regroupe de nombreuses adresses parisiennes proposant des produits sans gluten, sans allergènes et vegan (végétariens). Il propose aussi des conseils nutritionnistes, et des critiques de livres sur les régimes alimentaires sans gluten. Le site web possède aussi une page Facebook au nom de Gluten Free in Paris, une page twitter au nom de Semaine Sans Gluten, et une page Pinterest.

L’association propose aussi des cours de cuisine sans gluten à domicile et du « coaching culinaire » dans la région parisienne.

Représentation de l’association :

Soraya Aouidad : Créatrice du site web glutenfreeinparis.com. Elle est l’auteure des articles publiés sur le site. Intolérante au blé et au riz, elle est coach culinaire et donne des cours de cuisine.

Implication dans la controverse :

La date de création du site n’est pas donnée sur le site (toute lien ‘plan du site’ est introuvable) mais le premier article publié disponible remonte au 14 mai 2014. Cette période coïncide avec le pic de publication d’articles au sujet de notre controverse observé sur Gargantext.

Le site et l’association à l’origine de celui-ci soutiennent les régimes sans gluten, et luttent pour améliorer les connaissances à propos des intolérances au gluten. Ils défendent l’idée que l’intolérance au gluten est un mal encore trop peu connu par les individus, et souhaitent rendre plus facile l’accès aux produits gluten-free.

L’Association Française Des Intolérants Au Gluten (AFDIAG) est mentionnée sur le site glutenfreeinparis.com, ce qui laisse supposer que l’association « Sucré Salé » soutiendrait le discours de l’AFDIAG. Les articles font souvent référence à l’association. Par exemple, dans l’article Manger sans gluten, une mode? paru le 23 juin 2014 (peu de temps après la création du site web) rédigé par Soraya Aouidad, celle-ci écrit « Pour toute question à ce sujet, ne pas hésiter à contacter l’AFDIAG, l’Association Française Des Intolérants Au Gluten. » suivi des coordonnées de l’association.

Le site glutenfreeinparis.com est aussi à l’initiative de la « Semaine du Sans Gluten », organisée du 16 au 22 novembre dernier à Paris. Lors de cette semaine, plusieurs intervenants, professionnels ou amateurs du gluten-free ont été mobilisés lors d’ateliers, de conférences et de rencontre dans le but de sensibiliser les participants aux intolérances alimentaires et au régime sans gluten.

La semaine sans gluten :

Organisée au nom du site glutenfreeinparis.com la Semaine du Sans Gluten, l’évènement est présenté sur le site web: lasemainedusansgluten.com

Plusieurs conférences ont été proposées, ainsi que des ateliers-rencontres et des jeux concours dans le but d’informer sur les intolérances au gluten principalement, et les alternatives alimentaires proposées à Paris. Il s’agissait « d’informer sur les intolérances alimentaires et découvrir de belles adresses sans gluten à Paris ».

Les évènements organisés à cette occasion ont eu lieu dans des restaurants et magasins spécialisés dans l’alimentation sans gluten: le restaurant Bears & Raccoons: « café – fast food – restaurant sans gluten », Les nouveaux Robinson, « premier supermarché de produits biologiques sur la région parisienne », le salon de thé Gâté destiné aux « allergiques au gluten… mais pas à la gourmandise », dans les locaux Chez Nata, spécialisé dans « le yoga, la méditation et la cuisine végétarienne », et le Biosphère Café, un « restaurant bio sans gluten ».

Intervenants :

– Soraya Aouidad : Organisatrice de la semaine du sans gluten

– Stéphane Tétard : Co-organisateur de la semaine du sans gluten.

Il est naturopathe, à l’origine journaliste, spécialisé dans les intolérances alimentaires, l’intoxication aux métaux lourds et la détoxification. Il est aussi atteint d’intolérances alimentaires.

  • Le docteur Marc Ducarre : il a théorisé notamment un lien entre la prise de poids et les intolérances alimentaires, qu’il présente dans le livre Kilos en trop: Et si c’était une intolérance alimentaire?

Sa thèse était le sujet de la conférence qu’il a tenu au cours de cette semaine sans gluten

  • Plusieurs bloggeuses influentes désignées comme les « Blogueuses du sans Gluten » sur le site glutenfreeinparis.com, qui tiennent un site web proposant des conseils pour les régimes sans gluten et sans allergènes, ont organisé des ateliers ou des séances de dédicaces sous la tutelle de Soraya Aouidad : Laurence responsable du blog C’nola , Alma Rota de C-Sans Gluten, Natacha de Ma cuisine sans gluten, Solène de Sunny Délices (voir fiche acteur sur les blogueuses influentes dans le domaine du sans gluten).
  • Clémentine Muserolle auteur du livre Une année de cuisine familiale sans gluten et du blog: clemsansgluten.com
  • Kevin Fassio, intolérant au gluten et aux produits laitiers, il organise des ateliers de cuisine sans gluten. Il est aussi designer pou homme.

Les thème des conférences proposé étaient:

  • « Kilos en trop, et si c’était une intolérance alimentaire? » par le Dr Ducarre
  • « Qu’est-ce qu’une intolérance et comment en parler à mon médecin? » par Stéphane Tétart
  • « Intolérance au lactose: symptôme et causes » par Stéphane Tétart
  • « J’ai souvent mal au ventre…. Les pistes possibles » par Stéphane Tétart

 

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