Crée au sortir de la deuxième guerre mondiale, ce parc ornithologique est aujourd'hui un des lieux privilégié pour observer les oiseaux migrateurs.
Interview de Ph. Carruette, ornithologue au Parc du Marquenterre
Au cœur de la Réserve naturelle de la Baie de Somme, le Parc Ornithologique du Marquenterre est un espace privilégié pour observer un grand nombre d’oiseaux, dont une grande partie est migratrice et chassable. C’est en effet une halte migratoire pour des milliers d’oiseaux sauvages, de la Spatule blanche au petit bécasseau minute venu de Sibérie. Ce site est tout à fait adapté à l’accueil du public grâce aux différents sentiers tracés qui permettent au mieux et en un temps assez réduit de découvrir des oiseaux aux caractéristiques surprenantes et variées. Ainsi, le premier sentier permet de se familiariser avec les principales espèces d’oiseaux de la Baie de Somme. Deux autres sentiers ponctués d’abris discrets, permettent aux visiteurs d’observer sans les perturber de nombreuses espèces d’oiseaux nicheurs ou en migration, comme : l’Aigrette garzette, l’Huîtrier pie, l’Avocette élégante…
Ce parc est une réserve naturelle d’État, propriété du conservatoire du littoral, et il est géré par le département. Il possède tous les statuts européens destinés à de tels parcs, comme par exemple, Natura 2000. Il est composé d’une partie terrestre de 200 ha, mais il comporte également une grande partie maritime d’environ 3000 ha. De nombreuses personnes travaillent afin de le faire fonctionner, entre autre un grand nombre d’ornithologues ainsi que des pédagogues qui ont pour mission de faire découvrir le parc au grand public. Mais, ce site est loin de n’attirer que des promeneurs : des spécialistes des oiseaux viennent de toute l’Europe afin de découvrir l’extraordinaire richesse inhérente à ce parc. Ces spécialistes étudient notamment le comportement et l’évolution du nombre des oiseaux dans ce territoire assez limité, ce qui, en extrapolant, donne de nombreux indices sur l’état général de certaines espèces d’oiseaux en Europe. Ces personnes se placent dans de petites cabanes en bois, d’où elles peuvent observer avec du matériel de haut niveau les oiseaux, sans nullement les déranger.
Ce parc a été créé par M. Jeanson que nous avons pu interroger :
L’histoire de ce terrain a été très influencée par son action. Dès l’après guerre, il a eu un rôle à jouer sur ce morceau de la côte. En effet, les Allemands, croyant à un débarquement dans cette région, y ont déposé un assez grand nombre de mines. Convaincu du danger que cela pouvait présenter, il a demander de déminer en priorité ce lieu. En effet, le sable arrivant de la mer, les mines auraient été rapidement recouvertes, ce qui aurait rendu l’opération bien plus difficile, et aurait interdit l’accès à cette zone.
Puis, il a voulu utiliser cette côte pour cultiver les bulbes de jacinthe. Cette culture, très rentable, demandait en effet des conditions très strictes, entre autre, du sable et du vent, conditions qui étaient remplies ici. Mais, pour améliorer la plantation, il devait créer des digues sur la mer. Pour cela, il eut de nombreuses difficultés avec les gouvernements pour ce faire accorder le droit de le faire. Même s’il n’a jamais eu le droit de faire quoi que ce soit sur ce terrain, il a pris la responsabilité de modeler le terrain pour en faire ce qu’il voulait.
Cependant, avec la création de l’Europe, il y eut un moment où les taxes douanières dans l’Europe furent supprimées. Or, la grande valeur ajoutée de la plantation de la jacinthe ne venait que du fait que seule la Hollande en produisait. Par conséquent, dès l’ouverture des frontière, il n’y eut plus aucun intérêt à continuer ce genre de culture, d’où son abandon.
Cependant, il trouva vite une nouvelle utilisation à ces digues : il transforma ce terrain en parc naturel pour oiseaux. En fait, il faut savoir que la région de la Baie de la Somme est une région avec un grand nombre de chasseurs, ainsi que des contrebandiers. Avec ces personnes, les oiseaux migrateurs étaient assez rare.
Cependant, la réalisation de cette zone plantation a changé beaucoup de chose. Les chasseurs croyaient en effet que ces zone de culture appartenait à M. Jeanson, même si ce n’était pas vrai. Ainsi, ils refusaient de chasser sur ce territoire, par crainte d’un procès. C’est à partir de là que de plus en plus d’oiseaux migrateurs sont passés par cette côte au cours de leur migration.
Ce n’est qu’à partir de là qu’il a eu l’idée de construire un parc naturel. Sa construction n’a donc rien à voir avec la volonté de créer une réserve pour protéger les oiseaux. Dès le début, le parc a connu un succès extraordinaire, bien au delà de toutes les espérances. Et le nombre de visiteur ne cesse de croître depuis.
C’est ainsi qu’a été fondé ce parc, le premier de la sorte en France.