Xavier Préel

Les points clés de l’interview de Xavier Préel

 

Nous avons rencontré Xavier Préel, Vice Président Business Strategy, France Exploration & Production chez Total.

Pour plus de détails nous vous invitons à lire l’intégralité de l’interview.

 

Nous avons voulu explorer avec lui trois axes : détermination des réserves à l’échelle du champ, détermination des réserves à l’échelle mondiale et l’estimation du temps avant la fin de l’ère du pétrole ou avant le peak oil.

Voici quelques unes des idées clés que cet entretien a permis de mettre en lumière.

Les incertitudes font partie intégrante du métier de Total et des autres compagnies. Et ce pour plusieurs raisons :

Inconnues à l’échelle d’un champ :

  • Les profondeurs auxquelles se trouve le pétrole se situent entre 2000 et 7000 m sous terre.
  • Les champs pétroliers ne sont pas des cuves souterraines mais des microgouttelettes de pétrole qui sont intimement liés à la roche elle-même.
  • On se sait pas comment va évoluer le taux de récupération du pétrole dans l’avenir (pour l’instant il est de 35% environ).
  • Il y a les inconnues de l’exploitation, on prévoit un certain taux, puis on découvre des choses au fur et à mesure qui changent nos données. (Exemple une faille non détectée dans le gisement).

Inconnues à l’échelle du monde :

  • Total n’a une bonne connaissance (et encore avec les incertitudes qui ont déjà été détaillées) que de ses gisements pas de ceux des autres (Total : 2% de la production du pétrole mondial et les 5 majors : 15%). Pour une estimation globale Total se réfère à la littérature agrémentée d’un peu de bon sens et de feeling (sources : Oil and Gaz journal, BP Statistical review, IHS)
  • Les enjeux politiques jouent un rôle important dans la modification des données, on peut nommer l’augmentation assez phénoménale des réserves pétrolières notamment à la fin des années 80, parce que les quotas de l’OPEP étaient déterminés en fonction des réserves des pays. Attention à ne pas tomber dans l’excès inverse : tous les chiffres ne sont pas faux.

Inconnues dans l’estimation du temps (se projeter dans le futur) :

  • Il est beaucoup plus difficile d’estimer ce qui peut encore être découvert et d’estimer la quantité de pétrole qui sera exploitable dans le futur (amélioration des techniques d’exploitation, exploitation de certains types de pétroles non conventionnels) que d’estimer la quantité de pétrole exploitable aujourd’hui.
  • Total mise globalement peu dans les énergies renouvelables. Il s’agit d’un choix fait par l’entreprise : il y a suffisamment à faire avec le pétrole et le gaz pour ne pas aller se développer dans des secteurs où Total n’a pas l’expérience. Ces décisions politiques sont évidemment à recouper avec les réserves de pétrole existantes : pourquoi ne pas retourner à l’exploitation du charbon en le rendant moins polluant ?
  • Problèmes politiques et technologiques : Total parle de contrôler la hausse de la demande. Cela passe par des améliorations technologiques et des choix politiques. Regardons le choix français lors du premier choc pétrolier : augmentation massive de l’utilisation du nucléaire et recherches dans le domaine automobile pour produire des véhicules à basses consommation.
  • Prise en compte de la consommation des pays émergeants : la technologie existe. Il serait bon que ces pays fassent les choix profitables à tous et à eux en premier. C’est le cas de la Chine qui a choisit des véhicules à basse consommation.
  • Attention aux constantes de temps : Quand on regarde un peu tous les problèmes énergétiques, on est sur des constantes de temps extrêmement longues. Il y a beaucoup de recherches qui sont faites aujourd’hui sur les centrales électriques propres au charbon par exemple et on pense que ça va prendre 15 à 20 ans avant que ça produise ses effets.

 Les points qui font voir l’avenir en rose : .

  • Avoir un taux de récupération de 35% du pétrole est plutôt un facteur d’optimisme. En effet, cela signifie qu’il peut être amélioré grâce à la technologie et du pétrole inexploitable pourra le devenir.
  • Pour diminuer les incertitudes à l’échelle d’un champ Total fait appel à de nombreux spécialistes du secteur parapétrolier. Total préfère travailler sur ce qu’il connaît bien : exploration et production.
  • Le gaz présent dans les champs actuellement exploités pour leur pétrole ne peut être récupéré car il permet de maintenir la pression dans le réservoir. Mais il s’agit de réserves qui seront accessibles plus tard.
  • Avant de décider comment exploiter le champ, les investisseurs prennent le temps pour faire un maximum d’études : 3-4 ans
  • Les incertitudes grandes au niveau d’un champ sont globalement compensées au niveau mondial (loi des grands nombres).
  • Il y a 20 ans, on parlait des huiles lourdes du Canada comme de quelque chose de vraiment étrange, et maintenant les huiles lourdes deviennent vraiment exploitables et rentables…
  • Le charbon n’est pas mort parce qu’il n’y avait plus de charbon… Ce sera pareil pour le pétrole. Le pétrole a pris sa place parce que c’est un carburant qui a des qualités absolument extraordinaires : facilité d’exploitation, coût d’exploitation, c’est une ressource qui a naturellement trouvé sa place…
  • Pour limiter une éventuelle crise, il faut contrôler la croissance de la consommation.
  • « Je ne crois pas à la fin du pétrole. Je crois qu’il y aura une spécificité de plus en plus grande du pétrole qui sera réservé à ce que j’appelle les usages nobles du pétrole : essentiellement le transport et puis la pétrochimie… Et puis de l’autre coté, cet usage sera prolongé parce qu’on va faire des efforts dans les aspects énergétiques, dans les automobiles, dans les avions, dans tous les domaines ou l’énergie va être utilisée de manière à ce que le contenu énergétique soit le plus faible. »
  • « N’importe quel industriel vous dirait c’est une bonne nouvelle que d’avoir un produit d’une valeur qui va en augmentant. » « On va passer de la cueillette à l’agriculture. On va commencer à entrer dans un processus je crois beaucoup plus intéressant pour des ingénieurs et pour des industriels. »
  • Le peak oil est un « raccourci abusif » : il n’y aura pas de fin de pétrole d’un coup du jour au lendemain. « Et le monde n’est pas fait que de courbes de Gauss contrairement à ce que pense Mr Hubbert. »
  • On vit quand même avec un baril à 60$ et la transition a été assez brutale (2-3 ans) mais globalement les économies occidentales ont absorbé assez facilement ce choc là.
  • L’argent du pétrole ne disparaît pas… il part dans les économies émergentes et puis il revient sous forme de commandes. Il y a une espèce de fluidité du système international

Un avis sur la position de l’ASPO :

« Dans l’ASPO, il n’y a pas forcément que des pessimistes mais enfin, si on va à l’ASPO, c’est qu’on a envie de raconter autre chose que les discours officiels. Il y a beaucoup de catastrophisme. […] A force de trop vouloir crier au feu, on risque de ne plus trop les entendre. » Qui serait le « on » de « on devrait s’occuper du problème pétrole » ?

 

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