Stabilité des terrains

Les erreurs d’exploitation ont provoqué des mouvements de terrain sous certaines villes. Trois types d’effet en surface ont pu être distingués en Lorraine : le fontis, l’affaissement progressif et l’affaissement brutal.

Le fontis

schéma d'un fontis


Le fontis est l’apparition soudaine en surface d’un trou béant de quelques mètres de rayon et quelques mètres de profondeur. Il n’est généralement pas prévisible. Deux conditions sont nécessaires pour qu’un fontis se produise : d’une part, le toit de la cavité doit subir une rupture et d’autre part, les terrains sus-jacents doivent être relativement peu résistants bien stratifiés et peu épais. Le fontis ne se produira pas si la galerie est suffisamment profonde. En Lorraine, 50 mètres de recouvrement sont considérés comme suffisant.

Ce phénomène a affecté, par exemple, la commune d’Ottange en 2003.


L’affaissement progressif

affaiblissements progressifs


L’affaissement progressif forme en surface une cuvette de quelques dizaines à quelques centaines de mètres de diamètre. Au centre de la cuvette les terrains descendent verticalement. Sur les bords, les terrains se mettent en pente avec un étirement sur les bords extérieurs (ouverture de fracture) et un raccourcissement sur les bords intérieurs (apparition de bourrelets).

L’affaissement de surface est analogue à celui qui est volontairement produit par un dépilage intégral. Il fait suite à la ruine des travaux miniers souterrains suffisamment étendus pour que les effets remontent jusqu’en surface. L’étendue de la cuvette en surface est parfois plus importante que la superficie des terrains effondrés dans le fond. Ceci est du à l'existence de l’angle d’influence (figure ci-dessus).

Les effets sont d’autant plus élevés que l’amplitude de l’affaissement, au centre de la cuvette, est grande et que la profondeur des travaux miniers est faible. L’affaissement de la surface se produit généralement progressivement en quelques jours ou en quelques mois selon une dynamique propre au contexte minier et géologique.

Les bâtiments sont sensibles, surtout lorsqu’ils sont placés en bord de cuvette. Ce phénomène a affecté la commune d’Auboué en 1996. Il a nécessité l’évacuation des habitants et la démolition de 69 propriétés.


maison affectée par un affaisement à Auboué

L’effondrement brutal

Dans certains cas, la ruine de l’édifice minier ne se fait pas progressivement mais on observe l’effondrement en bloc de l’ensemble des terrains compris entre le fond et la surface. L’effondrement se produit alors de manière dynamique, en quelques secondes, et une secousse sismique est ressentie. Les bords de la zone affectée sont plus abrupts en forme de marche d’escalier.

effondrement brutal


Pour qu’un effondrement brutal se produise, deux conditions au moins doivent être remplies :

Parmi les 16 principaux mouvements de surface accidentels dans le bassin ferrifère de Briey Longwy, 8 sont des effondrements brutaux. Aucune victime de surface n’est à déplorer, mais des mineurs sont morts à cause de la chasse d’air.

effondrement brutal


L’ennoyage provoque t il des affaissements ?

Les affaissements de Auboué et de Moutiers (dans le bassin minier Nord) en 1996 et 1997 marquent le début d’une prise de conscience tant par les populations que par les politiques : l’exploitation minière laisse derrière elle des séquelles pérennes, qui se manifestent bien après la fin de l’ère industrielle et provoquent des dommages inacceptables et de véritables traumatismes. Les populations sont humainement touchées par ces mouvements de terrains imprévus et cela provoque un véritable tournant dans le type d’arguments utilisés par les opposants à l’ennoyage qui trouvent là, l’ occasion d’appuyer leur discours. C’est ce changement que rappelle un représentant de la Préfecture :

« Il faut savoir que la question de l’ennoyage par rapport aux mouvements de terrain, à l’origine, c’est une question dont personne ne se préoccupait. Alors la question, finalement, des conséquences de l’ennoyage sur la stabilité du terrain, elle s’est posée postérieurement en définitive à l’arrêté de 98, à partir de, je dirais 99 – 2000. Elle était largement liée d’ailleurs au rattachement que les personnes ont fait entre ennoyage des bassins Centre et Sud et un certain nombre de désordres qui sont apparus dans des communes de Meurthe-et-Moselle comme Auboué et Moutiers. »

La concomitance de l’ennoyage et des affaissements miniers a pu être constatée dans de nombreux cas. Les conditions de stabilité du recouvrement y étaient suffisamment précaires pour expliquer l’évolution de ces zones. L’arrivée de l’eau a représentée un facteur déclenchant. La relation entre ennoyage et affaissement est donc avérée même si certains se refusent à l’admettre. En effet, dans la mission d’expertise internationale, il est écrit :

« En l’état actuel des connaissances, les experts ont considéré qu’il pouvait exister dans le bassin nord des configurations géologiques pour lesquelles l’ennoyage conduirait à des instabilités mécaniques. Ceci justifie la cotation croissante du risque d’effondrement brutal avec le niveau d’ennoyage. »

Dès le début de l’année 2005, les premiers effondrements ont lieu sur le bassin nord … et il s’agit de la répétition du scénario qui s’est déroulé dans le bassin sud, entraînant les conséquences qu’on connaît.

« Toute la Lorraine va s’effondrer, cela prendra du temps, mais un travail de sape s’effectue, c’est irréversible » promet Bernard Boczkowski, président de l’Association de défense d’Ottange-Nondkeil

En conclusion, l’ennoyage ne crée pas le risque d’instabilité de terrain ; il peut déclencher l’affaissement dans une zone dont le processus de dégradation est suffisamment avancé et où l’effondrement se serait produit plus tard en l’absence d’ennoyage. C’est ce que la DRIRE tente de faire entendre aux populations : « On a historiquement, toute une série d’affaissements, d’effondrements, qui se sont produits alors que les mines étaient à sec. Par contre l’ennoyage à un moment donné va concentrer un certain nombre de phénomènes qui autrement se seraient produits étalés dans le temps. »

Les résultats de l’expertise internationale sont fortement controversés en raison de leur interprétation différente selon les acteurs. Si le représentant de la Préfecture interprète ces conclusions comme la confirmation du fait qu’il n’y a pas de « lien de causalité très clairement établi entre l’ennoyage et les mouvements de terrain », les opposants à l’ennoyage ont en tête le fait que l’ « eau va aggraver la situation. »