Le diagnostic
pré-implantatoire

       
Entretien avec le docteur Stéphane Viville
Laure-Emmanuelle Carra, Jean-Baptiste Petit
   

        Jean-Baptiste Petit et moi-même (Laure-Emmanuelle Carra) avons réussi à joindre par téléphone le professeur Stéphane Viville, en partie pour demander des précisions médicales en ce qui concerne la probabilité que la polypose dégénère en cancer.

        Il est intéressant de noter qu'avant même que j'aie pu poser ma première question, M. Viville m'a interrompue en me disant : 

      « Laissez-moi d'abord vous poser une question, avez-vous eu connaissance de l'affaire par l'article de Jean-Yves Nau du journal « Le Monde »? »

Laure-Emmanuelle : « en partie, oui, mais nous avons eu d'autres sources. »

Stéphane Viville : «  Alors laissez-moi vous dire que cet article est bourré d'erreurs, notamment scientifiques, il s'agit d'une véritable manipulation de la part du journaliste. Jean-Yves Nau évoque une extension du DPI pour le cancer du côlon alors qu'il n'y a aucune extension puisqu'il s'agit de dépister une maladie génétique, donc qui entre dans le cadre de la loi de bioéthique. Il a utilisé le mot prédisposition, qui est un mauvais mot puisqu'il peut très bien désigner une probabilité de 0,1% comme une probabilité de 95%. » J'ai plusieurs fois insisté sur le fait que nous ne recherchions pas de prédispositions au cancer du côlon, puisque l'on sait que la maladie entraîne nécessairement un cancer.

 

Laure-Emmanuelle : « Vous souhaitez utiliser le DPI pour diagnostiquer la polypose familiale colique ; cette maladie est-elle une des formes du cancer du côlon ou s'agit-il d'une maladie, caractérisée par l'apparition de nombreux polypes, ayant une très forte probabilité d'entraîner un cancer du côlon ? Dans ce dernier cas, quelle est la probabilité qu'au moins un polype, en l'absence de traitement ou d'intervention, dégénère en cancer ? »

Stéphane Viville :  « Il s'agit effectivement de la polypose familiale que l'on dépiste et non pas du cancer à proprement parler, de plus cette maladie dégénère toujours en cancer en l'absence d'intervention. »

Laure-Emmanuelle« Peut on considérer la polypose familiale comme une maladie « incurable » (l'un des critères pour qu'elle soit diagnostiquée par DPI), sachant que des interventions chirurgicales sont possibles ? »

Stéphane Viville : « Oui, car même après une intervention il y a des risques que le cancer réapparaisse ; même si l'on pratique une ablation du côlon, le cancer peut se propager plus haut, dans l'estomac, le pancréas... »

 

Laure-Emmanuelle : « La loi de 2004 sur le bébé-médicament et sur l'extension du DPI donne-t-elle plus de liberté aux médecins, ou au contraire est-elle plus contraignante ? »

Stéphane Viville : « Elle donne évidemment plus de libertés car on élargit l'utilisation du DPI, notamment pour le bébé médicament. »

 

            A la fin de l'entretien le docteur Viville nous a ensuite informé que Jean-Yves Nau avait demandé à ce qu'une commission détermine si ses travaux étaient conformes à la loi. Ce groupe de travail est dirigé par le médecin Dominique Stoppa-Lyonnet et implique l'Agence de la Biomédecine et l'Institut National du Cancer.