Présentation de l’Ecopôle
L’Ecopôle est un projet qui a été réalisé par la FRAPNA (Fédération Rhône Alpes de Protection de la Nature) qui est une association loi 1901, avec l’appui d’un certains nombre de partenaires que sont l’Union Européenne, l’Etat Français, le Conseil Général, le Conseil Régional, mais aussi des exploitants de granulats, St Etienne métropole, WWF, le Crédit Agricole… Beaucoup de gens ont participé à l’élaboration de ce projet. A partir de 1987, l’association a commencé à monter un projet au niveau de l’Europe et a acheté des terrains en 1990 pour les réaménager. L’Ecopôle, situé entre Moron et Feurs, sur le lit du fleuve, reçoit 90 000 visiteurs par an, sensibilisés au problèmes de l’incision du lit de la Loire dans la Plaine du Forez, problème qui devrait être un enjeu majeur dans la région (présence dans les débats politiques locaux par exemple).
Les problèmes actuels
L’Ecopôle est situé sur une portion du lit fortement dégradé pour différentes raisons. D’abord à cause d’un manque important de sédiments dans le lit mineur lié à un transfert moins important, un blocage du transfert par le barrage de Grangent et une extraction de granulats dans le lit mineur jusque dans les années 80. L’extraction de granulats se fait encore dans le lit majeur (qui recoupe une zone extrêmement vaste) et dépend du schéma départemental des carrières (zones définies selon un certain nombre de critères permettant ou non l’extraction). Un autre problème est ensuite lié à ce qu’ont pu devenir les exploitations dans ce qui correspond maintenant à l’espace de liberté (espace de divagation première du fleuve) : certaines ont été laissées en état, d’autres ont parfois été rebouchées avec n’importe quoi (réfrigérateurs, téléviseurs,…). Actuellement, les exploitations contemporaines de granulats dans le lit majeur ne posent plus de problèmes concernant l’enfoncement du lit.
L’incision du lit est environ de deux à trois mètres dans la zone du lit mineur. Il y a de plus des problèmes de déconnexions de bras morts et de zones de fraye pour le poisson, mais aussi une baisse du niveau des nappes phréatiques. C’est un cercle vicieux : plus le niveau baisse, plus il va falloir pomper pour pouvoir assurer une alimentation en eau aux riverains. Plus on pompe, plus le niveau baisse.
Le fonctionnement du barrage de Grangent est lié à une demande électrique et ne correspond donc pas aux nécessités géologiques et biologiques du fleuve. Il fonctionne par lâchés d’eau, c'est-à-dire que la hauteur d’eau fluctue de plus de 80 centimètres au cours de la journée. L’incision du lit a provoqué l’apparition de plaques de marne qui se retrouve donc continuellement immergées puis émergées. Lorsque l’ensoleillement est fort, la marne va subir un délitage. Ainsi lors des crues on peut retrouver des blocs de marnes de 80 centimètres d’épaisseur qui sont partis d’un coup, ce qui correspond donc à un enfoncement brutal du lit de 80 centimètres. De plus la marne devient très lisse et le peu de sédiments transportés par le fleuve ne s’y fixe plus. En ce qui concerne les digues, si elles favorisent l’érosion, il se pose un problème de sécurité publique qui doit bien sûr être pris en compte.
La problématique actuelle est donc d’augmenter le volume de sédiments transportés mais aussi de fixer ces sédiments.
La Loire est un fleuve qui est sensé méandrer. A l’heure actuelle, plus l’incision est importante, plus le lit se fige. Le fleuve se comporte donc de moins en moins comme un fleuve sauvage, mais plus comme un chenal. Ainsi la Loire est loin d’être le dernier fleuve sauvage d’Europe comme on l’entend souvent.
Toutes les espèces qui sont liées à des milieux temporaires de grèves et à la variabilité des habitats sont menacées car elles ne peuvent plus se reproduire (cas de la sterne par exemple ou d’espèces végétales). Aujourd’hui beaucoup de grèves sont remplacées par des plaques de marnes argileuses. Beaucoup de forêts alluviales ont disparues du fait de la baisse du niveau des nappes phréatiques. De plus la fixation du fleuve limite son « nettoyage » (nitrates, micro-organismes…).
A l’heure actuelle, les poissons migrateurs ne frayent plus dans la zone car ils sont bloqués par tous les barrages de la Loire, non équipés en ascenseurs à poissons qui ne rentraient pas en ligne de compte lors de leurs constructions dans les années 50.
Les solutions apportées et envisagées
L’enfoncement du lit a pu être déterminée par un stagiaire il y a deux ans en comparant les relevés de 1870 et les relevés actuels.
Sur l’aspect biologique, un certain nombre d’oiseaux sont actuellement présents sur le site de l’Ecopôle et notamment des sternes et des mouettes qui viennent nicher ici. Au niveau de la biodiversité cela constitue un plus car l’association a réaménagé le milieu en prenant exemple sur la nature en faisant rapidement ce qu’elle aurait mis plusieurs siècles à faire. Aujourd’hui, sur quinze kilomètres de berges, la situation s’est nettement améliorée.
En revanche l’incision du lit n’a pas évoluée, au contraire, elle s’accentue de plus en plus. Il y a une grosse demande de la part de la FRAPNA, de l’école des Mines de St Etienne et du monde de la pêche pour que l’on remédie à ce problème. Les demandes de financement sont adressées à l’Etat, au Conseils Régional et Général mais aussi à des partenaires privés. Il est possible de proposer un projet à l’intérieur du Plan Loire, et toutes les études réalisées sont montées dans ce cadre là. Une SAGE ( Schéma d'Aménagement pour la Gestion de l’Eau) est en train d’être mise en place.
« Remonter » le lit de la
Loire à son niveau originel (soit deux mètres en moyenne
ici) demande une masse de sédiments phénoménale.
Environ 4 ou 5 millions de mètres cubes sont situés en
amont du barrage de Grangent. Une solution serait donc de leur faire
« sauter » le barrage (en utilisant une suceuse
qui met en mouvement la boue). Mais il faut faire attention à la
manière dont on dépose cette boue car il peut y avoir des
problèmes de colmatage des ouïes des poissons et des puits
de captage. On peut par exemple déposer les sédiments en
tas sur le coté et attendre qu’une crue les emporte.
Le gros problème est que ces sédiments sont très
pollués (métaux lourds) car ils sont situés en
aval de la vallée de l’Ondaine qui a été le
siège pendant un siècle de nombreuses activités de
fonderie et de mine. Un prélèvement des sédiments
juste en amont du barrage nécessite donc un nettoyage avant
dépôt (ce qui permettrait au passage de dépolluer
la zone). Ce n’est pas irréaliste mais difficilement
réalisable d’un point de vue financier. Il faut savoir ce
que l’on veut laisser aux générations futures et le
comparer par rapport au prix d’une autoroute ou d’un
aéroport par exemple.
Une autre solution consisterait à récupérer les sédiments (propres) situés en amont de l’endroit où se jette l’Ondaine pour les redéposer en aval du barrage. Cela peut se faire par tapis roulant, par camions… mais sur un trajet, à vol d’oiseaux de plus de quinze kilomètres. Vu la masse de sédiments à transporter cela parait difficilement réalisable.
Actuellement le gros besoin concerne la mise en place d’une étude approfondie concernant le chiffrage (aspect physique et financier) des solutions envisagées. Beaucoup disent que les aménagements sont trop chers alors que rien n’est chiffré. Ce chiffrage ne peut pas être effectué par la FRAPNA dont ce n’est pas le rôle. Il faudrait faire appel à un bureau d’études ou voir ce qui se fait ailleurs (aux Etats-Unis, beaucoup de personnes se poseraient moins de question sur la réalité du barrage), car l’incision des lit de fleuve est un problème international. Le maintient du barrage n’est pas due aux intérêts économiques des communes sur lesquelles il est implanté mais plus à un lobbying d’EDF.
Certains ont envisagés la solution de démonter le barrage et de le reconstruire de manière à ce qu’il soit « transparent » pour les sédiments charriés par la Loire, au moins de manière périodique. Mais démonter le barrage nécessite de savoir quoi faire du « mur de boue » qui est présent au fond du lac.
La communication et la sensibilisation
Au niveau de la communication du problème à la population, des progrès sont à réaliser. Il faut que les gens soient bien conscients que les menaces concernant la faune piscicole de la zone sont du principalement à l’incision du lit et aux lâchés d’eau. Un brochet par exemple qui a besoin d’une hauteur d’eau d’un mètre pour se reproduire ne pourra plus le faire dans des zones ou les fluctuations de la hauteur de l’eau sont journalières, son lieu de ponte se retrouvant successivement à sec puis à l’eau. De même les étangs à poissons sont de moins en moins connectés au fleuve.
On trouve beaucoup de gens motivés pour mettre en avant les problèmes de la Loire dans la Plaine du forez, mais très peu d’actions sont menées.