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(1) Compte rendu d’entretien, Alain Biseau, Responsable de la cellule de coordination des expertises halieutiques de l'Ifremer
(2) Site internet de l’Ifremer
(3) ALAIN BISEAU, Situation en 2011 des ressources exploitées par les flottilles françaises, 2011, disponible sur cette page
(4) Report of the ICES Advisory Committee, 2011, disponible sur cette page.
(5) Site Internet de la Commission Européenne
Biomasse : Masse totale de poissons vivant dans l’espace (biotope) considéré.
Recrutement: Arrivée dans le stock de petits poissons ayant atteint une taille suffisante pour être capturés ; ceux-ci sont appelés recrues.
Rendement Maximal Durable (RMD) : en anglais MSY (maximum sustainable yield) ; c’est la plus grande quantité de biomasse que l’on peut extraire en moyenne et à long terme d’un stock halieutique dans les conditions environnementales existantes sans affecter le processus de reproduction.
Si la mortalité par pêche est trop importante, le stock décline, et ne peut donc pas être exploité durablement. Si au contraire l’effort de pêche est faible, l’exploitation du stock n’est pas rentable. L’objectif de la gestion des ressources halieutiques est donc d’atteindre le RMD, qui permet un effort de pêche minimum pour un maximum de captures. Deux facteurs permettent d’obtenir ce résultat: la réduction de l’effort de pêche et l’augmentation de la sélectivité.
CIEM :
Le CIEM est le Comité International pour l’Exploration de la Mer. Créé en 1885, son but est de promouvoir et d’assurer la coordination de la recherche sur les ressources halieutiques en Atlantique Nord.
Il permet d’encourager des campagnes scientifiques puis de regrouper leurs résultats. Ces campagnes étant menées par divers instituts de nationalités différentes, le CIEM permet de créer une véritable base de données sur les ressources halieutiques à grande échelle, sans entacher les résultats d’un quelconque parti pris politique. Ces données représentent la principale matière première à partir de laquelle la Commission décide chaque année des niveaux de TAC à fixer.
Vingt « états-membres » participent activement à son fonctionnement. Ce sont eux qui financent les projets menés par le CIEM. De plus, chaque état-membre a deux délégués nationaux qui le représentent au Comité. Ces délégués décident ensuite ensemble des mesures à prendre au sein du CIEM.
Le CIEM regroupe 1600 scientifiques de nationalités différentes travaillant dans 200 instituts à travers le monde. Chaque année, leurs activités font l’objet d’un rapport détaillant les diverses recherches effectuées sur l’année, ainsi que les avis des scientifiques quant aux mesures qu’il faudrait prendre pour améliorer le sort des stocks.
CSTEP :
Le CSTEP est le Comité Scientifique, Technique et Economique de la Pêche. Ce comité permet de conseiller la Commission Européenne quant aux mesures qui devraient être prises pour assurer la sauvegarde des ressources halieutiques et la pérennité du secteur de la pêche dans le cadre de la PCP. Le comité la conseille particulièrement au moment de la fixation annuelle des quotas par zone de l’UE et par espèce de poisson: les TAC.
Ce comité est constitué de 30 à 35 membres désignés pour un mandat de trois ans par la Commission Européenne. Ces membres sont spécialisés dans des domaines très variés (biologie, écologie, science de la pêche, économie, statistiques…) afin d’offrir une analyse complète des problématiques liées à la pêche.
Les chercheurs du CSTEP s’organisent en groupes de travail qui étudient les problématiques liées à la pêche et l’impact des mesures prises par Bruxelles sur la filière poisson. Ces recherches aboutissent chaque année à la publication de deux rapports:
Commission Européenne : Organe exécutif de l'Union Européenne représentant les intérêts de l'Union dans son ensemble (et non les intérêts particuliers des états membres).(5)
Ifremer :
L’IFREMER est l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer. Cet institut est placé sous la tutelle des Ministères de l’écologie et de l’agriculture.
Ses fonctions sont d’étudier, d’évaluer et de mettre en valeur les ressources halieutiques et permettre leur exploitation durable. L’IFREMER effectue également des recherches pour améliorer les méthodes de surveillance existantes ainsi que celles permettant l’évaluation de la biomasse des stocks et leur évolution. L’institut cherche donc principalement à protéger efficacement les ressources ; mais il cherche aussi à favoriser le développement économique de la pêche.
L’institut regroupe quatre départements scientifiques et cinq centres de recherche répartis sur la côte française.
La première étape de l’établissement des quotas consiste à déterminer l’état des stocks halieutiques actuels, puis à prévoir leur évolution. Les organismes scientifiques sont les principaux acteurs de cette étape; néanmoins, certains organismes prennent également en compte des considérations économiques pour déterminer la proposition de quotas de pêche qui sera faite à la Commission Européenne.
En France, c’est l’Ifremer qui réalise les études servant de base à l’établissement des quotas ; celles-ci sont ensuite croisées avec des études réalisées par d’autres organismes européens, pour aboutir à un rapport européen des scientifiques sur les recommandations de quotas, réalisé par le CIEM. Ce rapport est ensuite complété par des considérations économiques au sein du CSTEP.
Notre référence en terme de démarche scientifique est ici l'Ifremer, car c'est l'organisme que nous avons contacté. Néanmoins, la démarche utilisée par les autres organismes scientifiques européens est très similaire.
Pour pouvoir prévoir l’évolution des stocks halieutiques, les chercheurs de l’Ifremer ont besoin de connaître le mieux possible la population de poissons existante. Deux sources d’informations s’offrent à eux pour la déterminer:
Les principales données biologiques des poissons prises en compte sont:
Le principal problème auquel sont confrontés les scientifiques lors de l'acquisition de ces données est celui des rejets (voir la page correspondante). En effet, ceux-ci sont rarement déclarés, et faussent donc les estimations des scientifiques en ce qui concerne le volume de poisson pêché.
Les facteurs influençant l’évolution d’un stock sont représentés sur le schéma suivant:
Si les entrées (recrutement et croissance) sont supérieures aux sorties (mortalité naturelle et par pêche), le stock augmente; dans le cas contraire, il diminue. Les données collectées permettent de déterminer ces flux entrant et sortant, qui sont ensuite introduits dans des modèles pour prévoir l'évolution du stock.
On distingue plusieurs types de modèles d’évolution:
Ces modèles doivent permettre de prévoir l’évolution des populations; néanmoins, les données sont toujours antérieures d’un an au moment où les modèles sont utilisés ; ainsi, à partir des données de l’année 2011, les chercheurs font des hypothèses sur les populations halieutiques de 2012, puis sur l’évolution des populations en 2013-2014.
Les modèles les plus sophistiqués utilisés par l’Ifremer permettent d’étudier l’évolution de différentes catégories de poisson (âge et taille), et tiennent compte du type de flotte et des techniques utilisées pour la pêche, ainsi que de paramètres économiques comme le prix du poisson, le coût de l’effort de pêche ou l’investissement en navires.
Un modèle plus complexe est par définition plus réaliste, mais n’est pas nécessairement plus fiable, dans la mesure où il n’est pas toujours possible de connaître avec précision l’ensemble des paramètres utilisés. Il est alors possible d’utiliser des modèles dits stochastiques, qui fournissent plusieurs réponses possibles, à partir desquelles on peut déterminer des seuils de risque.
Ces modèles permettent en pratique de tester l’effet des mesures envisagées sur l’évolution de la biomasse; bien que les résultats d’une telle simulation ne soient pas absolument fiables, ils donnent des indications sur leurs conséquences (néfastes ou positives) et leur viabilité économique.
A partir de ses modélisations, l’Ifremer peut évaluer l’évolution des populations halieutiques sur les prochaines années, et faire des recommandations sur la quantité de poisson à pêcher. Pour cela, il définit deux indicateurs principaux(3):
L’Ifremer réalise alors un rapport comparant ces deux indicateurs avec des valeurs cibles, obtenues grâce aux modélisations, comme le montre le tableau ci-dessous:
L’indice « pa » dans le tableau représente un seuil de précaution ; il permet d’assurer le maintien du stock, mais ne constitue pas des objectifs durables de sa gestion. Pour cela, il faut se référer à l’indice « msy », qui correspond au Rendement Maximal Durable.
Ces données sont mises en commun avec les différents organismes scientifiques européens réunis au sein du CIEM. Celui-ci publie un rapport destiné à la Commission européenne présentant les recommandations pour les quotas de l’année à venir.
En cas de manque de données, il arrive souvent que le conseil donné soit la réduction du quota, par précaution.
Ce rapport passe ensuite entre les mains du CSTEP, qui, sur les bases des recommandations des scientifiques, ajoute à celles-ci des considérations économiques et sociales. La Commission européenne se base sur les deux rapports pour élaborer les TACs.