Sommaire

 

Applicabilité des recommandations

Avis de l'ANIA, des boulangers et des charcutiers

 

AVIS DE L'ANIA (10 janvier 2002)


L’AFSSA va sortir d’ici fin janvier 2002 le rapport de son groupe de travail sur le sel
et émettra un avis début mars 2002. L’ANIA a participé activement aux travaux de ce
groupe constitué en mars 2001, dont l’objectif est de proposer des mesures à mettre
en œuvre pour une réduction progressive et réaliste
1.) De la consommation de sodium ;
2.) De la teneur en sodium de certains aliments vecteurs de sel.


L’Industrie Alimentaire dans le cadre des travaux du groupe a plaidé pour :
• Une approche globale de la réduction de la consommation de sel tenant compte
des aliments consommés, des modes de consommation, de l’éducation et de
l’information des consommateurs ;
• Une approche de réduction volontaire ;
• Une politique de réduction au cas par cas (déjà engagée par différents secteurs) ;
• Une prise en compte des contraintes techniques propres à chaque profession ;
• Une prise en compte des démarches mises en place dans les deux dernières
années par les industriels sur la réduction de la teneur en sel des aliments.
Aujourd’hui, l’ANIA se réjouit de voir l’AFSSA émettre des et prendre conscience des
efforts mis en œuvre par les industriels pour une réduction de la teneur en sel des
aliments.
Concrètement, les propositions des entreprises de la charcuterie et la fromagerie ont
été entendues, avec par exemple :
• La proposition d’élaborer un guide de bonne pratique du sel et des conseils aux
professionnels pour remplacer lorsque c’est possible le sel classique par un sel
de substitution;
• Un travail sur la façon de faire baisser les variabilités de teneur en sel sur un
même fromage.
L’ANIA souhaite rappeler à l’occasion du colloque des 11 et 12 janvier de l’AFSSA
quelques points essentiels concernant la problématique générale de la réduction de
la consommation moyenne en sel de la population française.



Pour une approche globale de la réduction de la consommation en sel
L’ANIA rappelle ainsi que l’objectif de réduction de la consommation de sel,
doit s’inscrire dans une approche globale de la nutrition, qui tient compte non
seulement du choix et de la nature des aliments consommés mais aussi, et surtout,
des manières de consommation, comme, par exemple, le choix systématique
d’aliments traditionnellement riches en sel, la présence de la salière sur la table, ou
le fait de saler automatiquement ses mets sans les avoir goûtés au préalable.... A ce
stade des échanges, il nous paraît donc essentiel de mener cette réflexion à la
fois sur l’optimisation de la teneur en sel des produits, mais aussi sur
l’éducation et l’information du consommateur.
Il est important aussi de resituer ce débat dans un contexte beaucoup plus large : la
réduction de la consommation en sel n’est, en effet, que l’un des facteurs qui
peut contribuer au maintien en bonne santé tout comme l’activité physique ou
l’arrêt du tabac. Il faut enfin s’assurer que la communication autour de cet objectif
ne modifiera pas de manière trop drastique des habitudes alimentaires établies, vers
des modes de consommations plus délétères vis-à-vis de la santé des Français, et
actuellement difficiles à envisager.
Dans ce contexte global, l’ANIA continue à s’interroger sur la pertinence de la
réduction de la consommation moyenne de la population générale, alors que
seuls les sujets dont l’hypertension est directement liée à leur consommation
en sodium et les très forts consommateurs, tireraient bénéfice d’une telle
mesure.


Le sel, ingrédient fondamental pour la fabrication et la qualité des produits
Comme les représentants de l’ANIA l’ont souligné en présentant des données
validées sur le contenu en sel et/ou en sodium de leurs aliments ainsi que les
diverses fonctions du sel, celui-ci joue un rôle fondamental pour la qualité des
aliments. Ainsi pour les secteurs de la charcuterie et des fromages, le salage
constitue une étape indispensable dans la fabrication des produits ; de plus, le sel
est essentiel pour assurer la stabilité microbiologique et donc la conservation.
Pour les produits de la boulangerie et de la panification fine, l’adjonction de sel est
nécessaire à la fermentation et à l’homogénéité de la mie. Pour d’autres
secteurs, cette fonction technologique et sanitaire ne revêt pas la même priorité,
mais la fonction organoleptique demeure primordiale comme dans l’ensemble des
produits.
Toute modification de la teneur en sel des aliments doit donc faire l’objet d’une
analyse approfondie par catégorie de produits et produit par produit pour en
évaluer les conséquences sur le maintien de cette qualité.

Pour une étude au cas par cas de la part de l’industrie agroalimentaire
Compte tenu de la diversité des produits dans les différents secteurs et des
rôles variés que le sel exerce, seule une analyse au cas par cas lors du
développement ou de la révision des recettes permettrait de connaître la
faisabilité et la pertinence d’une éventuelle diminution de la teneur en sel des
produits, d’en préciser notamment son degré et le temps nécessaire pour y
parvenir. Il s’agit d’un travail lourd faisant intervenir des nutritionnistes, des
technologues et des analystes sensoriels, démarche qui ne peut être entreprise que
progressivement par les entreprises et pour les produits qu’elles auraient déterminés.
Des actions de cette nature ont, d’ailleurs, déjà été menées dans ce sens par
différents secteurs et/ou entreprises. Certaines d’entre elles (ex. secteur du pain)
ont été présentées lors des réunions AFSSA. Ces actions se poursuivent et l’ANIA
s’engage à maintenir la motivation des secteurs dans ce sens. Une participation de
la recherche publique dans ce domaine serait sans doute également à encourager.
L’ANIA rappelle aussi qu’il existe actuellement sur le marché national, toute
une gamme de produits, dont des produits à teneur réduite en sodium pour les
consommateurs désireux de contrôler leur apport en sodium. Ces derniers
produits répondent à des objectifs de santé publique. Les allégations nutritionnelles
portées par ces produits – réduit en, pauvre ou faible, très faible, exempt, sont
conformes à l’arrêté du 20 Juillet 1977, la Directive du CODEX de 1997 et à l’avis de
la CEDAP du 8 juillet 1998.
Dans une optique de santé publique, l’ANIA exprime aussi son souhait de
pouvoir utiliser du sel iodé dans les produits transformés, comme cela existe
dans divers pays de la Communauté européenne ; cette mesure dans le contexte
d’une diminution de la consommation en sel des Français permettrait de couvrir de
manière plus optimale les besoins nutritionnels en iode de la population générale et
réduirait la discrimination dont les professionnels français de l’agroalimentaire font
l’objet lors de leurs exportations.
Informer et éduquer le consommateur, une démarche conjointe essentielle
Si dans une certaine mesure, il est envisageable de participer à travers ces
propositions à l’éducation pour un goût moins salé du consommateur, il est
essentiel de rappeler que le goût, en général, résulte de facteurs complexes,
diversifiés et individualisés qui rendent toute normalisation en la matière
longue et difficile.
Pour participer à l’information du consommateur, l’étiquetage des aliments,
notamment, constitue un moyen efficace. Comme cela a été souligné à diverses
reprises, l’ANIA est en faveur d’un étiquetage volontaire. A ce jour, les dispositions
réglementaires en la matière sont complexes et ne répondent pas correctement à
cet objectif d’information sur la teneur en sel. Il importe d’examiner, avec les
autorités compétentes, dans un cadre européen, les modalités d’information
les plus adaptées afin de répondre aux objectifs de politiques nutritionnelles.
Comme cela a été mentionné en introduction, l’ANIA considère aussi que les
mesures accompagnant cette proposition de réduction de consommation du
sel doivent mettre en œuvre des communications (et recommandations),
notamment de la part des Pouvoirs publics, indiquant clairement les diverses
voies pour atteindre cet objectif. L’évolution à la baisse de la teneur en sodium
des catégories des produits les plus contributeurs à cet apport, ne peut à elle- seule
permettre d’atteindre cet objectif sans une éducation et une responsabilisation des
consommateurs visant à une modification de leurs comportements à table, en
particulier (usage excessif de la salière, par exemple). Des mentions du type « La
teneur en sel (ou en sodium) de cet aliment a été étudiée avec soin, il est inutile de
rajouter du sel » portées sur les produits, pourraient accompagner cet effort
d’éducation. Une réflexion devrait aussi porter sur les produits non-emballés.
Ce n’est, en effet, que dans ce contexte global, que les mesures concernant la
diminution de la teneur en sel des produits réalisée et mise en avant par les
professionnels de l’agroalimentaire, sous leur pleine responsabilité et avec des
modalités de communication personnalisées, pourront être efficaces.
Au vu de ce constat, les représentants de l’ANIA, dans le cadre des réunions
AFSSA, continuent de soutenir une approche ouverte, responsable et
volontariste, quant à l’optimisation de la teneur en sel de leurs produits par
rapport à une approche plus stricte et réglementaire.
L’Industrie Alimentaire respectera les recommandations des
pouvoirs publics établis sur la base du rapport de l’AFSSA et les
mettra en œuvre.

SECTEUR DE LA BOULANGERIE Version de "Filière Gourmande"


1. Le pain, un produit salé ?
2.Faisabilité de la diminution de sel dans le pain
3. La préservation du goût
4.Les conséquences possibles des recommandations de l'AFSSA

 

Le pain, un produit salé ?

Au goût, nous avons tous l'impression que le pain est un produit peu salé et il l'est effectivement beaucoup moins que certains autres produits alimentaires, mais le fait que sa consommation soit régulière en fait un important vecteur de sel.
Reprenons les chiffres avec des valeurs courantes aujourd'hui, soit 35 g de sel par litre et un taux d'hydratation de 62 %, on obtient 13,4 g de sel/kg de pâte et après cuisson 19 g/kg de pain. En prenant comme base une consommation de 150 g de pain par jour, on obtient un apport de sel de 2,8 g soit 28 % de l'apport journalier moyen qui est d'environ 10 g.
On ne peut nier l'importance du pain dans la consommation de sodium. Une simulation faite par l'Observatoire des consommations alimentaires de l'AFSSA sur la base de l'enquête INCA, a montré qu'une baisse de 25 % du sel ajouté dans le pain conduirait à une baisse de consommation globale de 6 %. De plus, les plus gros consommateurs de sel seraient également les plus concernés par cette action. Pour autant, les recommandations de l'AFSSA sont-elles réalistes (- 25 % en 5 ans) ?


Faisabilité de la diminution de la dose de sel dans le pain

En prenant une base moyenne de 24 g/kg de farine pour tenir compte des habitudes de l'ensemble de la filière (environ 22 g dans l'artisanat et jusqu'à 28 g dans certains pâtons surgelés), une baisse de 25 % conduirait à réduire la quantité de sel ajoutée à 18 g/kg de farine. C'est-à-dire qu'on reviendrait à une dose proche de celle utilisée dans les années 1950 que beaucoup de boulangers ont connus. Un industriel spécialisé dans le précuit a d'ailleurs anticipé la baisse en ramenant la dose de sel à 19 g/kg de farine, en prévoyant de passer très bientôt à 18 g.
Pour définir une dose moyenne, il conviendra de déterminer si le calcul s'établit par rapport au kg de farine ou au litre d'eau.
En effet, à la faveur des variations du taux d'hydratation, on peut aboutir, à partir d'un dosage unitaire identique, à des différences notables du degré de salage du pain.
On peut passer, lorsque l'hydratation varie de 58 à 68 % et pour 35 g au litre, d'un minimum de 18,10 g/kg de pain à un maximum de 20,53 g, soit 13,45 % en plus.
Sur le plan technologique, cette baisse n'a pas d'incidence. Tout au plus, faudra-t-il apporter quelques corrections minimes sur les temps de fermentations. Par ailleurs, elle inciterait l'ensemble de la profession à mettre en place des procédés pour favoriser la production des arômes naturels du pain pour compenser la diminution du goût salé.


La préservation du goût

Qu'en est-il maintenant sur le plan de l'acceptabilité sensorielle ?
Les études actuellement disponibles sur la perception salée chez l'homme tendent à prouver une bonne acceptabilité des produits alimentaires moins salés. Les personnes qui ont été habituée à manger moins salé trouvent même désagréable les produits plus salés. Toutefois, la perception salée varie beaucoup d'un aliment à un autre. Par ailleurs, une baisse progressive, en l'occurrence 5 % par an, est pratiquement indétectable (5 % correspondent environ à 1,2 g de sel en moins par kg de farine).
Un résultat encourageant a été obtenu lors d'un test consommateur réalisé par la revue Que choisir en mars 2001 (n° 380). Il a consisté à faire goûter à 62 hommes et femmes d'âges variés des baguettes avec des doses différentes de sel et fabriquées avec des processus courts (pétrissage intensifié, fermentation courte) ou longs (pétrissage amélioré, fermentations longues). C'est la baguette dont le taux de sel avait été diminué de 21 % et obtenue par une fabrication longue qui a reçu la meilleure note.
Cet essai demande à être confirmé, car il ne faudrait pas qu'une diminution du goût salé du pain entraîne un transfert vers d'autres aliments dont l'intérêt nutritionnel serait moindre. Il conviendrait donc de valider par analyse sensorielle que cette diminution est bien vécue par le consommateur avant toute action.
Une autre voie est possible et fait aujourd'hui l'objet d'études. Il est envisageable de remplacer partiellement le chlorure de sodium par du chlorure de potassium (E 508). Inconvénient : outre une légère modification du goût et son prix élevé, ce changement de produit serait sans doute jugé par le consommateur comme moins " naturel " que le sel de cuisine.


Les conséquences possibles des recommandations de l'AFSSA

Compte tenu de l'hétérogénéité de la production du pain, l'AFSSA serait favorable à la voie réglementaire pour faire baisser progressivement la quantité de sel. L'obligation légale serait complétée par un devoir d'information du consommateur.
Il existe déjà une réglementation sur les produits appauvris en sodium. Les allégations suivantes sont autorisées :
- à teneur réduite en sodium" si la teneur du produit en sodium est diminuée d'au moins 50 % par rapport au produit de référence ;
- pauvre ou faible en sodium" inferieur ou = 102 mg pour 100 g ;
- très faible en sodium" inferieur ou = 40 mg pour 100 g
- exempt de sodium" inferieur ou = 5 mg pour 100 g.
Il s'agit plutôt ici d'une réglementation destinée à des produits diététiques.
Dans ses recommandations, l'AFSSA préconise pour l'ensemble des produits, un étiquetage systématique de la teneur en sodium en g par 100 g.
Elle précise que la teneur en sel des produits de boulangerie (ou la fourchette de valeur) calculée à partir de la quantité de sel ajoutée à la farine devrait être affichée à défaut d'étiquetage pour des produits non préemballés.
Elle ajoute par ailleurs que compte tenu du mode de production du pain, les modalités d'information du consommateur devraient faire l'objet d'une concertation large avec les professionnels et les consommateurs.
A titre d'exemple, en Finlande, un étiquetage pour l'ensemble des produits a été mis en place. Les produits à forte teneur doivent porter l'indication " A forte teneur en sel ". Pour le pain, c'est le cas au-dessus d'une teneur de 1,3 %.
La législation permet aussi l'allégation " faible teneur en sodium " si la quantité de sel ne dépasse pas certaines valeurs spécifiées produits par produits.
Par ailleurs, le label " pansalt " indique une teneur en sodium réduite et une teneur en potassium et magnésium plus élevée sans modification du goût.
Enfin, l'association de cardiologie finlandaise a lancé un label " meilleur choix " pour les produits à teneur réduite en sel et en graisses saturées.
La Grande-Bretagne a lancé une politique de diminution volontaire des quantités de sel utilisées dans l'industrie agro-alimentaire. Lors d'un colloque organisé par la Food Standarts Agency (FSA) le 29 janvier 2002, le président a rappelé l'importance de la diminution de l'apport en sel pour prévenir les maladies cardio-vasculaires, une des premières causes de mortalité en Grande-Bretagne. Il a cité l'exemple des boulangers qui, sur la base d'une démarche volontaire, ont fait baisser la quantité de sel dans le pain qui a diminué de 21 % entre 1998 et 2001.


SECTEUR DE LA CHARCUTERIE

Selon les professionnels de la charcuterie, les doses d'emploi actuelles sont optimisées pour concilier les
différentes attentes vis-à-vis du sel : fonctionnalités technologiques, stabilité microbiologique
et demande organoleptique du consommateur.

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