en-tête

Conclusion

Lorsqu’on porte une vue d’ensemble sur l’enquête réalisée, il apparaît que toutes ces crises ont été l’occasion de mettre en cause l’utilisation des mathématiques financières dans les salles de marché. Pourtant, malgré ces périodes de questionnement, cet outil perdure et gagne en envergure de par son utilisation sur toutes les places financières de la planète. Cette longévité peut s’expliquer en partie par le fait que les mathématiques répondent fondamentalement à une demande de la part des acteurs financiers. Ce qui a été réalisé depuis un peu plus d’un demi siècle et les proportions qu’a pris la finance dans le système économique mondial n’ont été possible que grâce à la théorie des mathématiques et aux outils informatiques. Cette légitimation des mathématiques rend la question de leur présence au sein du système financier peu pertinente.

On peut alors s’interroger sur les formes que prennent les mathématiques financières dans leur utilisation courante, et plus particulièrement sur la prédominance de la formule de Black & Scholes depuis l’apparition des modèles mathématiques financiers. Effectivement, au cours de notre enquête, il ressort que les crises sont autant d’occasion pour remettre en cause ce modèle, et pour ses détracteurs, de se faire entendre. Ces événements donnent aussi lieu à la proposition d’autres modèles tels que celui de Mandelbrot publié en 1961. Basé sur la géométrie des fractales, cette approche est plus performante en période de crise, puisqu’elle est plus sensible aux variations extrêmes du marché. Pourtant, elle a été mise de côté à cause de sa complexité, et son utilisation est infime comparée à celle de la formule de Black & Scholes.

Cet épisode nous amène à nous questionner sur les attentes qu’ont les acteurs financiers d’un modèle mathématiques. Dans ce domaine particulier, il est nécessaire que le modèle soit simple autant dans ses résultats, analytiques et utilisables au plus vite, que dans son utilisation. Par ailleurs, si l’on établit un parallèle avec les modèles physiques, il semble important qu’il décrive le plus parfaitement possible la réalité. Mais dans le cas de la finance, les rapports entre le modèle utilisé et la réalité qu’il décrit sont tout autre. En effet, c’est parce que le modèle de Black & Scholes est utilisé de façon presque unilatérale qu’il est aussi pertinent sur la réalité financière : l’utilisation même du modèle façonne les cours du marché à son image. Cette réciprocité implique que l’introduction d’autres modèles pour concurrencer celui de Black & Scholes remettrait considérablement en cause sa pertinence et son efficacité, puisque, de fait, le modèle s’éloignerait de la « réalité ». S’interroger sur la pertinence d’un modèle en finance en se basant sur de tels critères n’a donc pas de sens, et c’est cette réciprocité qui rend la question de la place de la formule de Black & Scholes dans les mathématiques financières si délicate.

Controverse Mathématiques & Finance. Haut de page.
GILLET, LETOURNEAU, MAGNIEN, MARCILHACY, VYARAVANH-GIRARD