Quels sont les gagnants ?

Les répercussions sur les énergéticiens

Les Certificats d’Économie d’Énergie sont le fer de lance de la politique de soutien à la rénovation énergétique, avec des objectifs triennaux toujours plus ambitieux [7]. C’est une politique majoritairement incitative, qui requiert peu d’efforts de la part des pouvoirs publics. Si certains acteurs tels que l’UFC-que-choisir ou certains obligés blâment les pouvoirs publics pour ce manque d’implication apparent [1]. L’ADEME et la DGEC quand à elles revendiquent cette force, car elle place les énergéticiens au centre de la question de l’efficacité énergétique, et minimise l’apport de l’argent du contribuable tout en réalisant des économies d’énergie [20].

L’UFC-que-choisir, recontextualise le problème [1]. Si ce dispositif est de prime abord payé par les vendeurs d’énergie rachetant les CEE, dans les faits ces coûts sont répercutés sur les factures d’énergie des consommateurs. L’ATEE, qui contribue à conseiller les pouvoirs publics sur le pilotage du dispositif, soutient qu’il n’est pas systématiquement possible pour les obligés de compenser le coût des CEE dans le prix de l’énergie. On a bien observé ce phénomène avec les gilets jaunes qui ont protesté dès qu’on a voulu augmenter la taxe carbone.

De plus, l’enjeu financier important crispe les énergéticiens. Le dispositif coûte cher pour eux et risque de coûter même plus cher s’ils ne parviennent pas à atteindre les objectifs. Ce n’est pas avantageux pour eux car ils ont du mal à répercuter leur investissement dans le système de CEE, dans le prix de l’énergie.

Entretien avec un membre de l’ATEE

Plus qu’un enjeu financier

Et si seuls quelques uns en profitent, et le prix de toutes ces opérations se répercute sur la facture énergétique du contribuable, il faut se débarrasser de conceptions égoïstes rappelle un journaliste engagé écologiquement . [11] En effet, le but réel est plutôt d’encourager un passage vers une énergie plus verte, donc des économies de CO2, que de faire des économies d’énergies financières, car le système des CEE est fait de telle sorte que le prix de l’électricité continue d’augmenter du fait des efforts que doivent fournir les énergéticiens pour remplir leurs objectifs.

L’intérêt du particulier

L’avantage est au particulier, et plus précisément ceux en situation de précarité qui peuvent bénéficier de rénovations pour la somme symbolique d’un euro. La presse salut ce geste et beaucoup témoignent de leur satisfaction et de leur gratitude [6]. Des personnes âgées qui font refaire leurs combles, des précaires qui n’ont pas les moyens de changer de chaudière ou d’isoler leur maison… chacun y trouve son compte.

Seulement, ce système de rénovation à 1€ est si attractif que les particuliers ne réfléchissent pas longtemps avant d’accepter de faire des travaux chez eux, ce qui est une porte d’entrée aux entreprises frauduleuses qui ne cherchent que la prime de l’État [14]. L’ATEE s’en est rendue compte et explique que les artisans embauchent des personnes souvent pour faire du porte à porte et effectuer des travaux à la va-vite, pour en faire le plus possible. Le travail est bâclé, les travaux ne sont pas contrôlés, et le client ne verra pas forcément de changement sur sa facture énergétique.

Elles ne font pas les travaux dans les règles de l’art ce qui souvent pose un problème sur la qualité des travaux car elles ne respectent pas du tout les normes.

Entretien avec un membre de l’ATEE, sur les rénovations à 1€

Ce problème pourrait être résolu en instaurant plus de contrôles comme le suggère l’UFC que choisir, et dans ce cas il serait vraiment bénéfique pour les précaires et grands précaires. La DGEC soutient que si on ne donne pas la gratuité à ces gens, il ne feront jamais les rénovations. Il semble donc s’agir d’un vrai sacrifice financier en faveur des précaires. En parallèle, c’est une bonne chose pour l’environnement car ces travaux sont faits dans des bâtiments qui ont des notations écologiques exécrables et qui auraient été laissés en l’état sans le dispositif des CEE.

Un impact global positif et des conséquences bien réparties

Philipe Quirion, dans son rapport pour l’Institut Français de l’Énergie avait prédit dès 2004, soit 2 ans avant le lancement des CEE, ces comportements [24]. Les supports suivants montrent que le dispositif CEE engendre un coût important pour les énergéticiens, compensé en partie par une augmentation du prix de l’énergie. Les vrais gagnants, financièrement, sont pour eux les délégataires, qui de plus se font une place importante sur le marché des rénovations. Et finalement, les clients quant à eux bénéficient bien évidemment des primes CEE.

 

Finalement, chacun y trouve un peu son compte, sauf les énergéticiens eux-mêmes qui ont du mal à atteindre leurs objectifs. L’impact pour le particulier est moindre que s’il avait été directement taxé.

Avant on avait une facture d’électricité qui était à 1,5 million d’euros par an et aujourd’hui on est à 1,2 – 1,3 millions, grâce aux économies d’énergie, ça fait quand même des sous, ça en vaut la peine.

Responsable CEE d’une grande entreprise

La taxe en soit est intelligente : le contribuable s’en rend un peu compte sur sa facture énergétique, mais sans se dire que c’est à cause des travaux, c’est une forme de prêt lentement remboursé (l’état avance l’argent au moment des travaux et le contribuable le paie peu à peu). Et les gens le plus dans le besoin (i.e précarité énergétique) en profitent le plus.

Niveau écologique, l’objectif est vraisemblablement atteint vu que les nouvelles installations sont sensées (si travaux bien effectués) moins consommer et utiliser moins d’énergie à gaz à effet de serre.