Ré-évaluation des deux risques et enquête publique (2/2)
2. Prise en compte de la ré-évaluation au niveau politique et juridique
Comment cette ré-évaluation est-elle prise en compte au niveau politique et juridique ? Sur ce point, la loi du 30 décembre 1991, abrogée puis modernisée en loi du 28 juin 2006 (incluse au Code de l’Environnement), est cruciale et de portée très générale même si elle a été formulée à l’origine dans le contexte d’une polémique sur la solution de l’enfouissement géologique des déchets nucléaires.
Voici un lien vers le texte de loi, disponible sur Legifrance.
Les points importants relatifs à la prise de décision de l’Etat sur la continuation ou le support de la recherche en matière de déchets radioactifs, et de risque nucléaire sont dans les articles 2,3,4,6 et 9 (points importants en rouge dans le texte) :
Article 2
L'
Article L. 542-1 du code de
l'environnement est ainsi rédigé :
«
Art. L. 542-1. - La gestion durable des matières et des
déchets radioactifs de toute nature, résultant
notamment de l'exploitation ou du démantèlement
d'installations utilisant des sources ou des matières
radioactives, est assurée dans le respect de la protection de
la santé des personnes, de la sécurité et de
l'environnement.
«
La recherche et la mise en oeuvre des moyens nécessaires à
la mise en sécurité définitive des déchets
radioactifs sont entreprises afin de prévenir ou de limiter
les charges qui seront supportées par les générations
futures. »
«
Les producteurs de combustibles usés et de déchets
radioactifs sont responsables de ces substances, sans préjudice
de la responsabilité de leurs détenteurs en tant que
responsables d'activités nucléaires. »
Article 3
Pour
assurer, dans le respect des principes énoncés à
l'article L. 542-1 du code de l'environnement, la gestion des déchets
radioactifs à vie longue de haute ou de moyenne activité,
les recherches et études
relatives à ces déchets sont poursuivies selon les
trois axes complémentaires suivants :
1° La séparation et la transmutation des éléments
radioactifs à vie longue. Les études et recherches
correspondantes sont conduites en relation avec celles menées
sur les nouvelles générations de réacteurs
nucléaires mentionnés à l'article 5 de la loi n°
2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de
la politique énergétique ainsi que sur les réacteurs
pilotés par accélérateur dédiés à
la transmutation des déchets, afin de disposer, en 2012, d'une
évaluation des perspectives industrielles de ces filières
et de mettre en exploitation un prototype d'installation avant le 31
décembre 2020 ;
2°
Le stockage réversible en couche géologique profonde.
Les études et recherches correspondantes sont conduites en vue
de choisir un site et de concevoir un centre de stockage de sorte
que, au vu des résultats des études conduites, la
demande de son autorisation prévue à l'article L.
542-10-1 du code de l'environnement puisse être instruite en
2015 et, sous réserve de cette autorisation, le centre mis en
exploitation en 2025 ;
3°
L'entreposage. Les études et les recherches correspondantes
sont conduites en vue, au plus tard en 2015, de créer de
nouvelles installations d'entreposage ou de modifier des
installations existantes, pour répondre aux besoins, notamment
en termes de capacité et de durée, recensés par
le plan prévu à l'article L. 542-1-2 du code de
l'environnement.
Article 4
Pour
assurer, dans le respect des principes énoncés à
l'article L. 542-1 du code de l'environnement, la gestion des
matières et des déchets radioactifs autres que ceux
mentionnés à l'article 3 de la présente loi, il
est institué un programme de recherche et d'études dont
les objectifs sont les suivants :
1°
La mise au point de solutions de stockage pour les déchets
graphites et les déchets radifères, de sorte que le
centre de stockage correspondant puisse être mis en service en
2013 ;
2°
La mise au point pour 2008 de solutions d'entreposage des déchets
contenant du tritium permettant la réduction de leur
radioactivité avant leur stockage en surface ou à
faible profondeur ;
3°
La finalisation pour 2008 de procédés permettant le
stockage des sources scellées usagées dans des centres
existants ou à construire ;
4°
Un bilan en 2009 des solutions de gestion à court et à
long terme des déchets à radioactivité naturelle
renforcée, proposant, s'il y a lieu, de nouvelles solutions ;
5°
Un bilan en 2008 de l'impact à long terme des sites de
stockage de résidus miniers d'uranium et la mise en oeuvre
d'un plan de surveillance radiologique renforcée de ces sites.
Article 6
I.
- Après l'article L. 542-1 du code de l'environnement, il est
inséré un article L. 542-1-2 ainsi rédigé
:
«
Art. L. 542-1-2. - I. - Un plan national de gestion des matières
et des déchets radioactifs dresse le bilan des modes de
gestion existants des matières et des déchets
radioactifs, recense les besoins prévisibles d'installations
d'entreposage ou de stockage, précise les capacités
nécessaires pour ces installations et les durées
d'entreposage et, pour les déchets radioactifs qui ne font pas
encore l'objet d'un mode de gestion définitif, détermine
les objectifs à atteindre.
«
Conformément aux orientations définies aux articles 3
et 4 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative
à la gestion durable des matières et des déchets
radioactifs, le plan national
organise la mise en œuvre des recherches et études sur la
gestion des matières et des déchets radioactifs en
fixant des échéances pour la mise en œuvre de nouveaux
modes de gestion, la création d'installations ou la
modification des installations existantes de nature à répondre
aux besoins et aux objectifs définis au premier alinéa.
«
Il comporte, en annexe, une synthèse des réalisations
et des recherches conduites dans les pays étrangers.
«
II. - Le plan national et le décret qui en établit les
prescriptions respectent les orientations suivantes :
«
1° La réduction de la quantité et de la nocivité
des déchets radioactifs est recherchée notamment par le
traitement des combustibles usés et le traitement et le
conditionnement des déchets radioactifs ;
«
2° Les matières radioactives en attente de traitement et
les déchets radioactifs ultimes en attente d'un stockage sont
entreposés dans des installations spécialement
aménagées à cet usage ;
«
3° Après entreposage, les déchets radioactifs
ultimes ne pouvant pour des raisons de sûreté nucléaire
ou de radioprotection être stockés en surface ou en
faible profondeur font l'objet d'un stockage en couche géologique
profonde.
« III. - Le plan national est établi et mis à jour tous les trois ans par le Gouvernement. Il est transmis au Parlement, qui en saisit pour évaluation l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, et rendu public.
« IV. - Les décisions prises par les autorités administratives, notamment les autorisations mentionnées à l'article L. 1333-4 du code de la santé publique, doivent être compatibles avec les prescriptions du décret prévu au II du présent article. »
II. - Le plan national prévu à l'article L. 542-1-2 du code de l'environnement est établi pour la première fois avant le 31 décembre 2006.
Article 9
I.
- L'article L. 542-3 du code de l'environnement est ainsi modifié
:
1°
Les I à V sont abrogés ;
2°
Le premier alinéa du VI est remplacé par deux alinéas
ainsi rédigés :
«
Une commission nationale est chargée
d'évaluer annuellement l'état d'avancement des
recherches et études
relatives à la gestion des matières et des déchets
radioactifs par référence aux orientations fixées
par le plan national prévu à l'article L. 542-1-2.
Cette évaluation donne lieu à un rapport annuel qui
fait également état des recherches effectuées à
l'étranger. Il est transmis au Parlement, qui en saisit
l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et
technologiques, et il est rendu public.»
«
La commission est composée des membres suivants, nommés
pour six ans : »
3°
Dans le 2° du même VI, les mots : « sur proposition
de Conseil supérieur de la sûreté et de
l'information nucléaires » sont remplacés par les
mots : « sur proposition de l'Académie des sciences
morales et politiques » ;
4°
Dans le dernier alinéa du même VI, après les mots
: « experts scientifiques », sont insérés
les mots : « , dont au moins un expert international » ;
5°
Le même VI est complété par cinq alinéas
ainsi rédigés :
«
Le mandat des membres de la commission est renouvelable une fois.
«
La commission est renouvelée par moitié tous les trois
ans. Pour la constitution initiale de la commission, le mandat de six
de ses membres, désignés par tirage au sort, est fixé
à trois ans.
«
Le président de la commission est élu par les membres
de celle-ci lors de chaque renouvellement triennal.
«
Les membres de la commission exercent leurs fonctions en toute
impartialité. Ils ne peuvent, directement ou indirectement,
exercer de fonctions ni recevoir d'honoraires au sein ou en
provenance des organismes évalués et des entreprises ou
établissements producteurs ou détenteurs de déchets.
«
Les organismes de recherche fournissent à la commission tout
document nécessaire à sa mission. »
II. - La commission nationale mentionnée à l'article L. 542-3 du code de l'environnement établit son premier rapport avant le 30 juin 2007.
L’objectif de cette loi est de retarder la prise de décision, afin de prendre le temps de trouver le juste compromis entre faisabilité technique et acceptabilité sociale : il s’agit de retarder l’écartement de voies de recherche, et d’éviter que la recherche de compromis sociaux ait lieu après la mise en place des solutions d’ingénierie technique, qu’il est coûteux de mettre en place et d’autant plus coûteux, d’écarter. D’éviter, en somme, que les objections arrivent systématiquement trop tôt, ou trop tard, et ainsi d’optimiser leur impact en terme d’évaluation acceptable – techniquement et socialement – du risque.
Le rôle de la politique dans ce domaine est ainsi non pas de trancher quant à la solution à adopter, mais plutôt de promouvoir une prise de décision relevant d’un consensus éclairé plutôt que d’un secret d’Etat.