La position des mineurs au sein du débat public à Salsigne est en train de connaître une évolution significative. Cette évolution concerne d'une part la forme de la participation au débat, et d'autre part le point de vue des mineurs quant à leur rôle dans l'avenir du bassin de Salsigne.
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L'étude de la reconversion |
Les mineurs ont l'habitude de faire connaître leurs revendications par des manifestations et "coups d'éclat". La poursuite de l'activité industrielle est une cause qui les a entraînés à faire entendre leur voix de cette manière. A l'heure actuelle, l'acceptation progressive de l'inéluctabilité de la fermeture de la mine fait que les modalités de la participation des mineurs au débat commencent à évoluer. La C.G.T., syndicat le plus représenté parmi les mineurs de Salsigne travaille actuellement avec un bureau d'étude, et examine les possibilités de reconversion de la mine en site touristique. La discussion est organisée par le syndicat, et tient compte de l'avis de personnes extérieures au site susceptibles de donner un éclairage utile. M. Frédéric Ogé et M. Jean Moulin ont ainsi participé à une réunion le 30 avril 2003, au cours de laquelle les modalités de la transformation de la mine en musée ont été étudiées.
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Une "inversion du discours" |
L'évolution à mettre en place de la participation des mineurs au débat est liée pour M. Jean Moulin, spécialiste des risques industriels à la C.G.T. à une "inversion du discours", dans la mesure où il ne s'agira plus pour les mineurs de défendre l'activité industrielle quelles qu'en puissent être les conséquences, mais d'imposer aux dirigeants de l'entreprise et à l'Etat le respect de normes de sécurité pendant l'activité, puis un travail correct de dépollution ainsi qu'une mise en place de possibilités de requalification après l'arrêt de l'activité industrielle. Il y a "inversion du discours" car dans cette optique, les ouvriers n'ont pas à s'opposer à la population locale - comme ils l'ont fait jusqu'alors à Salsigne- en défendant l'exploitant industriel, et en lui autorisant implicitement de polluer à condition qu'ils fournissent des emplois. Au contraire, l'enjeu réside dans le respect imposé de l'environnement et de la sécurité.
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Un changement de mentalités |
Ce changement des formes de participation des mineurs est inséparable d'une profonde évolution du point de vue des mineurs à l'égard de leur perception du site. Cette évolution est actuellement en cours et a tout juste débuté, à présent que l'activité industrielle minière est condamnée. Il s'agit maintenant de cesser le combat pour conserver à tout prix - conséquences environnementales, conséquences sanitaires pour les ouvriers eux-mêmes - l'exploitation de la mine, et de définir un nouveau statut dans le cadre de l'avenir du site. Ceci est compliqué par le fait que cet avenir est encore très incertain ; cependant les travaux actuels liés à une reconversion touristique de la mine donnent un exemple plausible dans la mesure où cette possibilité est loin d'être la plus improbable, et révélateur quant à ce changement de point de vue.
Bâtir un musée de la mine à Salsigne en utilisant les galeries et la mine à ciel ouvert donnerait aux mineurs une possibilités de reconversion, mais suppose la reconnaissance des activités passées comme atout touristique pour la région. La transformation sera radicale car il s'agira de parler de ce qu'on taisait : les conditions de travail à la mine, avec pour conséquences les plus graves des cancers du poumons, mais aussi les pollutions occasionnées. Si bien que les mineurs devront assumer les erreurs passées, mais aussi accepter de ne plus évoluer dans un univers industriel.