Role et bilan de l'ONFSH

 

I/ Le rôle de l’ONFSH

Avant tout autre chose, il convient de rappeler l’article qui fonde l’existence même de l’Observatoire, extrait de la directive européenne " Oiseaux "

 

Directive européenne 79-409 - Article 7.4. " Les états membres s'assurent que la pratique de la chasse, y compris le cas échéant la fauconnerie telle qu'elle découle de l'application des mesures nationales en vigueur, respecte les principes d'une utilisation raisonnée et d'une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d'oiseaux concernées, et que cette pratique soit compatible, en ce qui concerne la population de ces espèces, notamment des espèces migratrices avec les dispositions découlant de l'article 2. Ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification. Les états membres transmettent à la Commission toutes les informations utiles concernant l'application pratique de leur législation de la chasse ".

Le but premier de l’observatoire, selon son secrétaire général Pierre Migot, directeur adjoint des études et de la recherche à l’ONCFS, est donc clairement de " bien faire le point sur les périodes de nidification et de migration prénuptiale pour les oiseaux chassables (en particulier, les espèces migratrices) afin que la réglementation prise en France pour les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse des oiseaux migrateurs puisse être conforme à l’article 7.4 de la Directive 79-409. "

Concrètement, il s’agit, pour les membres de l’Observatoire de se renseigner sur les périodes de nidification ou de migration prénuptiale d’une manière purement scientifique. Pierre Migot résume ainsi le travail qui est mené au sein de l’observatoire : " Le travail de l’Observatoire est un travail d’experts, consistant à faire le point sur l’état des connaissances scientifiques en rapport avec les questions posées par le MEDD [Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable] et donnant des avis scientifiques. Il s’appuie sur les connaissances disponibles : publications scientifiques, rapports (dès lors qu’ils ont une partie " méthodes " et qu’ils sont considérés comme pouvant être pris en compte par les 11 membres) et présentations de travaux en cours par des scientifiques invités aux réunions. Le Secrétariat propose des documents sur lesquels s’appuiera la discussion, mais les 11 membres sont invités à faire part de toutes connaissances utiles pour le débat. Les travaux des associations naturalistes ou fédérations des chasseurs peuvent être proposés par les scientifiques nommés respectivement sur proposition de la Ligue pour la Protection des oiseaux ou de la Fédération nationale des chasseurs. Si les travaux présentés, ne sont pas des publications scientifiques, ils sont discutés pour s’assurer de la pertinence et de la limite des résultats sur un plan scientifique, avant d’être pris en compte.

Quelque fois, il est difficile de répondre aux questions posées par le MEDD, faute de travaux scientifiques spécifiques disponibles. L’Observatoire rend compte de cela et fait part des recherches qu’il conviendrait de susciter auprès par les organismes compétents. "

Pour résumer un peu brièvement, on peut dire que l’Observatoire donne des avis purement scientifiques pour satisfaire à des critères purement juridiques fixés par la Commission européenne, et ne concernant que les périodes de nidification et de migration prénuptiale des espèces concernées.

Cependant, il semble que le rôle de l’ONFSH ait légèrement évolué depuis sa création dans la mesure où le Ministère interroge l’Observatoire sur les méthodes d’évaluation du statut de conservation des espèces. Pour pouvoir se prononcer, il doit alors avoir connaissance des effectifs totaux d’une population, de sa répartition, et de l’évolution temporelle de ces populations (ou sous populations). Pour cela, il dispose d’un certain nombre d’indices d’abondance, et de données sur l’évolution des paramètres démographiques (reproduction, mortalité). Il se base entre autres sur des comptages ou autres méthodes mis en œuvre par différentes organisations jugées scientifiquement crédibles par les membres de l’Observatoire.

Ainsi, en fonction des données récoltées, l’Observatoire peut proposer au gouvernement des dispositions quand à la réduction éventuelle de la période de chasses de telle ou telle espèce : " Selon la situation démographique de la population d’une espèce chassable, les modalités de gestion de la population peuvent être variables, mais ce qu’il convient d’ajuster, c’est le niveau d’animaux prélevés par la chasse (qui dépend de la taille absolue de la population chassée - pas toujours facile à estimer pour des espèces migratrices qui nichent ailleurs qu’en France- et du taux annuel d’accroissement de la population – lié au rapport mortalités/naissances). Pour mettre en œuvre le plan de prélèvement ainsi adapté à une espèce donnée, certains proposent de moduler la durée de la période de chasse, mais on peut aussi limiter les prélèvements par chasseur au cours de la période de chasse (définie pour partie sur d’autres critères que ceux de gestion). "

Ainsi, lors des réunions de l’Observatoire, sont aussi abordées les questions d’effectif et d’évolution spatio-temporelle des populations, et plus uniquement de période de nidification.

 

II/ Bilan de l’action de l’ONFSH après trois ans d’action

 

L’Observatoire a publié son troisième rapport cette année (pour 2005), il est possible de les consulter sur ce site (rapports 1,2 et 3). Les recommandations fournies par ces trois premiers rapports ont pour l’instant été suivies par le gouvernement. Pierre Migot affirme : " Il me semble que l’Observatoire a été efficace par rapport au dossier " dates de chasse des oiseaux migrateurs ". A ma connaissance, les rapports et avis de l’Observatoire n’ont pas été remis en cause sur un plan scientifique par d’autres scientifiques et les dispositions prises par le Gouvernement n’ont pas été pas contraires aux avis de l’Observatoire. "

Il n’y donc pas de problème d’un point de vue juridique, comme l’a confirmé le Conseil d’Etat : " Les rapports scientifiques de l’Observatoire n°1, 2 et 3 ont été pris en compte dans l’élaboration des textes réglementaires relatifs aux dates de fermeture et d’ouverture de la chasse. […] Sur un plan juridique les dispositions prises (conformément aux travaux de l’Observatoire), n’ont pas été remises en cause par le Conseil d’Etat. "

Quant à l’accueil de ces rapports par les organisations de chasseurs et d’environnementalistes : " Les dispositions réglementaires prises ne satisfont pas complètement chasseurs et protecteurs (ou certains d’entre eux au moins) ", mais Pierre Migot est tout de même confiant dans l’avenir et satisfait du travail de l’Observatoire : " Des progrès ont été fait entre chasseurs et environnementalistes (quand ils sont de bonne volonté des deux bords) pour sortir de cette bataille de 15 ans. Les associations de protection de la nature n’ont pas attaqués le dernier arrêté d’ouverture de la chasse des migrateurs (saison 2004-2005) par exemple.

Il y a aussi volonté d’arriver à ce consensus au niveau européen (voir charte entre la fédération des chasseurs européens " Face " et Birdlife international sur la Directive Oiseaux).

Dans l’article 7.4 de la Directive, il y une dimension éthique (on ne chasse pas des oiseaux qui se reproduisent ou qui vont bientôt se reproduire) partagée par tous y compris les chasseurs et leurs représentants qui acceptent ce principe. Mais certains (qui n’aiment pas la chasse) souhaitent une réduction maximale de la chasse et ont demandé une application stricte de la Directive (protection totale de tous les individus), alors qu’une approche plus statistique plus logique et réaliste au plan biologique aurait permis de concilier la dimension éthique et la protection des espèces tout en respectant la chasse (qui intrinsèquement n’est pas incompatible avec la conservation des espèces – il est toujours possible de mettre en place des dispositifs réglementaires ou techniques ajustant les prélèvements à ce que permet la situation démographique des populations chassées ".