Les subventions agricoles
Bien qu’il soit largement employé en économie, le terme "subvention"
est rarement défini. Souvent, il est utilisé comme un antonyme du mot
taxe, désignant un transfert d’argent des pouvoirs publics à une entité
du secteur privé. Tel est le cas, par exemple, dans le dictionnaire
Oxford en ligne, où une subvention est définie comme une "somme
d’argent accordée au moyen de fonds publics pour aider un secteur ou
une entreprise à maintenir le prix d’un produit ou d’un service à un
niveau peu élevé". Mais beaucoup feraient valoir que les allégements
fiscaux sont aussi une forme de subventionnement. En fait, pour les
destinataires, cela ne fait peut-être guère de différence de recevoir
de l’argent ou de payer moins d’impôts. Les deux formes d'assistance
représentent aussi un transfert financier des pouvoirs publics. En
revanche, la protection à la frontière, par exemple par les droits de
douane, n’implique pas un tel transfert financier mais se traduit
plutôt par des recettes budgétaires. Or, on pourrait faire valoir que
l’imposition d’un droit de douane représente une forme de
subventionnement pour les secteurs qui concurrencent les importations
et qui sont ainsi protégés contre la concurrence étrangère. Par
conséquent, la définition des subventions en tant que transferts des
pouvoirs publics ou dépenses budgétaires n’est pas nécessairement
complète.
Subvention à la production
Dans le diagramme ci-dessous, l’offre intérieure est représentée par
S0, la demande intérieure par D0 et le prix mondial du produit par P*.
Comme le prix mondial est inférieur au prix qui assurerait l’équilibre
du marché intérieur, la demande totale du produit OQd est satisfaite
par OQ0 unités de produits nationaux et Q0Qd unités de produits
importés.
Si,
pour des raisons politiques ou de redistribution, le gouvernement
décide que le niveau de la production intérieure devrait être OQ1 au
lieu de OQ0, il doit décider de recourir à un droit de douane ou à une
subvention pour accroître la production. S’il recourt à une subvention,
et à supposer qu’il ne puisse pas influer sur le prix mondial, l’offre
intérieure passera de S0 à S1, de sorte que la production intérieure
augmentera jusqu’au niveau souhaité et les importations diminueront de
Q0Q1.
Avant la subvention, la production intérieure était
au point Q0. Comme il serait moins coûteux d’obtenir sur le marché
mondial la production supplémentaire au-delà de ce niveau, le
gouvernement aura atteint le niveau de production souhaité, mais les
incidences en termes de ressources pour l’économie seront négatives. Le
coût additionnel pour l’économie est représenté par la zone abc.
Subvention à l’exportation
Une subvention à l’exportation incite les producteurs à produire pour
l’exportation plutôt que pour le marché intérieur. La réduction de
l’offre sur le marché intérieur entraîne une hausse des prix
intérieurs. Mais comme l’offre sur le marché mondial augmente, les prix
mondiaux baissent. S’il n’est pas possible de réimporter des produits
sur le marché intérieur un écart apparaît entre le prix intérieur et le
prix mondial.
Au
prix mondial initial P*, le niveau des exportations du pays considéré
dans le diagramme ci-dessus correspond à la distance ab. Le marché
mondial est équilibré parce que le pays étranger (censé représenter le
reste du monde) importe la même quantité. Si une subvention à
l’exportation est accordée aux producteurs nationaux, une partie de
leur production est détournée vers le marché d’exportation, ce qui fait
monter le prix du produit dans le pays (au niveau Pd dans le
diagramme). Toutefois, l’accroissement de l’offre sur le marché mondial
fait baisser le prix mondial sur le marché étranger (au niveau Pf dans
le diagramme). Le nouveau niveau des exportations du pays considéré
correspond à la distance cd, qui représente le niveau des importations
dans le pays étranger.
L’incidence globale de la
subvention à l’exportation dans le pays considéré est nettement
négative. Les consommateurs nationaux paient plus cher pour un produit
qu’il leur est impossible d’acquérir à un prix inférieur sur le marché
mondial, ce qui se traduit pour eux par une perte de bien-être. Les
producteurs nationaux sont les bénéficiaires directs de la politique,
car leur production s’est accrue grâce à la subvention.
Les
consommateurs du pays étranger profitent de la baisse des prix
mondiaux. Toutefois, les producteurs étrangers subissent une perte
nette, car ils doivent désormais faire face à la concurrence à des prix
plus bas. Les producteurs non compétitifs seront évincés du secteur.
Mais globalement, le pays y gagne puisque le gain pour les
consommateurs compense la perte pour les producteurs.
Présentation et objectifs
Tous
les pays subventionnent leur agriculture.
Cependant, la part du revenu assuré par ces subventions varie
énormément d'un
pays à l'autre :
- Pays qui subventionnent faiblement :
Australie, Brésil, Argentine... Dans ces
pays, l'estimation du soutien aux producteurs (ESP) varie de 0,2
(Brésil) à
10%. Parmi ces pays on trouve notamment les pays du
Groupe de Cairns et
du G20.
Groupe du Cairns
Il réunit la plupart des pays en développement qui sont
agro-exportateurs (exportateurs de biens agricoles).
Le Groupe de Cairns se compose de 19 pays : Australie, Afrique du Sud,
Argentine, Brésil, Colombie, Costa Rica, Bolivie, Canada, Chili,
Indonésie, Malaisie, Guatemala, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Paraguay,
Pérou, Philippines, Thaïlande, Uruguay.
Pays du G20
- Pays
qui subventionnent fortement leur agriculture : É.-U., UE. L'ESP
(Estimation du Soutien aux Producteurs) est de
17% pour les premiers et de 34% pour les seconds. Comme ces ensembles
représentent un poids très important leurs subventions sont très
critiquées,
notamment car ces états sont exportateurs nets de denrées agricoles.
- Pays
importateurs nets protectionnistes. Certains pays importateurs de
denrées
agricoles maintiennent des niveaux de soutien très élevés (estimations
supérieures à 40%) pour sauvegarder une agriculture dans leurs
frontières. Ces
pays sont groupés dans le G10 : Suisse, Japon, Norvège, Corée du Sud...
L'objectif
de ces subventions est variable :
- maintien
d'une production agricole dans certains pays (Japon) ou régions
(politique de handicap naturels de l'UE).
- soutenir
le revenu des agriculteurs, par des aides directes et des prix
garantis.
- stabiliser
les prix sur les marchés intérieurs.
- assurer
l'indépendance alimentaire.
- permettre
l'export de denrées agricoles (viande bovine européenne par ex).
- favoriser
la modernisation, la réorientation des exploitations agricoles
(exemple des CTE).
Différents types de subventions
Il
s'agit principalement :
- soit d'aides sur les prix de vente
permettant notamment d'exporter à des prix
inférieurs aux prix de revient, c'est le cas notamment des restitutions
aux
exportations européennes.
- soit
d'aides pour l'écoulement des produits (aides à la commercialisation de
beurre en UE, aides alimentaires américaines).
- soit
d'aides directes aux exploitants, à la surface ou par tête de bétail ou
encore pour la réalisation de mesures agro-environnementales
- soit
subventions et taux d'intérêts bonifiés pour les investissements.
Ces différentes aides jouent un rôle important dans la controverse, certaines ayant des effets plus directement visibles que d'autres.