Le rôle des associations de malades du SFC ne peut pas être réduit à celui de simples témoins, qui viendraient décrire leur expérience, en laissant l’étude de la maladie aux médecins. En effet, les associations ne se contentent pas de soutenir moralement les familles de patients ; elles militent pour la lutte contre le SFC, n’hésitant pas à s’opposer aux médecins et aux chercheurs. Elles cherchent à imposer leur définition de la maladie.
Les associations : qui sont-elles ?
Il existe dans de nombreux pays (France, Canada, Australie, Grande-Bretagne, États-Unis…) une association des malades du SFC.
En France, l’AFSFCF, c’est-à-dire l’Association Française du Syndrome de la Fatigue Chronique et de la Fibromyalgie, est composée de malades du SFC et/ou de la fibromyalgie, et d’un conseil scientifique constitué de professeurs et de médecins de spécialisations différentes.
Au Canada, l’AQEM (Association Québécoise de l’Encéphalomyélite Myalgique) a pour mission de faire connaître et reconnaître l’EM/SFC. Elle est composée de dix personnes, et est administrée par un conseil d’administration.
Leurs objectifs
Sur son site, l’AFSFCF décrit très clairement ses objectifs en sept points. Le premier est d’accueillir et d’informer les malades et leur entourage sur le SFC. Les points suivants sont beaucoup moins neutres.
Certains points concernent les médecins : l’association indique aux malades quels médecins aller voir : « orienter les malades vers les médecins et services compétents de leur région afin d’obtenir un diagnostic fiable ».
D’autres sont liés aux démarches administratives : « orienter les malades vers les services administratifs compétents pour la prise en charge et la reconnaissance de leur maladie », ou encore « favoriser des échanges ou des partenariats avec d’autres associations susceptibles de les aider dans leurs démarches administratives ».
Les points suivants concernent la recherche et les publications : « donner accès aux adhérents à toutes les informations ou avancées médicales ayant fait l’objet de publications fiables, susceptibles de les aider dans leurs parcours médical. » et « participer, grâce aux adhésions et à de généreux donateurs à des travaux de recherche ».
Enfin l’association s’engage à « alerter les pouvoirs publics sur les problèmes rencontrés par les malades pour la reconnaissance de leur maladie ».
Dans la description de son rôle sur son site, l’AQEM est moins explicite. Elle se donne pour mission d’informer et de sensibiliser le public, et d’aider les personnes atteintes. De plus, un encadré présent sur toutes les pages précise que l’AQEM est un service communautaire qui ne saurait se substituer aux professionnels de la santé. Cependant, son but reste de faire reconnaître la maladie, et donc elle oriente également les patients vers des services qui reconnaissent l’origine organique du SFC.
De manière générale, les associations préfèrent l’origine organique de la maladie, et se battent contre les médecins qui préfèrent voir le SFC comme un trouble de l’humeur, un problème comportemental ou psychosomatique. Même si aucun fondement biologique n’a été démontré, croire en une cause biologique est une manière de déresponsabiliser les malades, d’où le refus total de la part des associations de toute explication « psy ».
Leurs moyens d’actions
Les membres des associations se réunissent régulièrement dans différentes villes. Des intervenants, médecins ou malades, viennent parler du SFC, ou aborder un thème particulier : « Que faire face à l’emprise de la douleur ? », ou encore « Principes d’indemnisations en cas d’invalidité ».
L’AQEM publie une revue, Le Ruban Bleu (ainsi nommée pour rappeler le ruban bleu, symbole de l’EM/SFC introduit en Grande-Bretagne en 1995). Elle distribue également des dépliants de l’association, des affiches et des signets dans les milieux médicaux. Elle collabore avec les médias (presse écrite, radio, télévision), et entre autres avec des journaux scientifiques, et avec le ministère de la Santé.
La spécificité des associations de malades du SFC
Les associations de patients du SFC ont une réelle influence. On peut les comparer aux associations de lutte contre le SIDA : elles sont plus qu’un simple rassemblement de malades ; elles militent et s’opposent à certains scientifiques pour faire valoir leur vision, même scientifique, de la maladie. Ces associations peuvent être :
- Auxiliaires : elles aident les médecins et chercheurs grâce au lobbying, à la collecte d’information etc.
- Partenaires : elles parlent d’égal à égal avec les chercheurs, acquièrent des connaissances scientifiques pour pouvoir comprendre la recherche.
- Opposants : elles s’opposent à certains médecins en remettant en cause leurs théories.
Dans tous les cas, elles cherchent à imposer au pouvoir politique qu’il reconnaisse la maladie, subventionne la recherche et prenne en charge les soins.
Elles font également la distinction entre les bons médecins et les mauvais médecins : elles « orientent » les malades vers les bons médecins, et leur fournissent sujets et fonds pour leur recherche. Par exemple, le professeur Peter Behan est souvent cité sur les sites anglais ; ses articles et conférences sont constamment repris et résumés.
Les associations de malades du SFC se distinguent des associations de malades classiques. Plus que de simples témoins, elles constituent l’acteur principal de cette controverse, s’opposant volontiers aux médecins, qu’il s’agisse des causes de la maladie, de sa définition ou encore de son nom.