Le projet à l’international


Le projet Yasuni ITT, qui repose essentiellement sur les fonds internationaux, est largement tributaire des politiques environnementales des pays développés. En effet, l’état équatorien invoque le principe de coresponsabilité environnementale pour justifier ce projet et estime que les pays développés ont une grande responsabilité dans le réchauffement climatique, s’étant enrichis en négligeant l’environnement. Il s’agit alors pour l’état équatorien de légitimer son projet sur la scène internationale, de crédibiliser sa démarche mais surtout de donner des garanties suffisantes aux pays susceptibles de participer au financement du projet. De plus, le projet Yasuni ITT pourrait amener à se développer d’autres initiatives du même genre à travers le monde.


Un projet novateur qui séduit…



Lors de la présentation du projet en Juin 2007, il exposa deux options à la communauté internationale : Option (A) Laisser le pétrole dans le sous-sol en échange de compensations internationales. Option (B) Exploitation pétrolière qui respecte au mieux la nature. A la suite de cette annonce, plusieurs ONG se firent le relais du gouvernement équatorien, en organisant une campagne auprès de personnalités, ou encore en examinant les différentes stratégies de financement du projet. On peut citer, parmi les ONG nationales et internationales qui participent à la campagne Yasuni ITT : Amazon Watch, Save America’s forest, Finding species, Accion Ecologica, World Resource Institute.









Le projet Yasuni, de par son caractère novateur, a très vite suscité beaucoup d’intérêt au sein des gouvernements des pays développés, et plus particulièrement en Europe où la conscience environnementale est la plus développée. Ainsi, la France et l’Allemagne expriment leur souhait de participer au projet Yasuni ITT relativement rapidement (en 2008 et 2009, avant la création du fond fiduciaire).

En 2009, à Copenhague, lors des pourparlers sur les changements climatiques aux Nations unies, le président Correa refusa au dernier moment de ratifier l’accord avec le PNUD (Programme des Nations Unies pour de Développement) concernant le financement du programme. Selon lui, l’accord menaçait la souveraineté du pays. « Nous ne demandons pas la charité, seulement une compensation financière acceptable pour des services environnementaux ». Il voulait ainsi garder un contrôle au conseil d’administration des fonds. On peut légitimer son objection par le fait que la compensation financière ne recouvre que la moitié des gains potentiels du gisement.

En 2010, suite à la nomination de nouveaux émissaires (Ivonne Baki et Lenin Moreno), les EAU, l’Iran et l’OPEP viennent s’ajouter à la France, l’Allemagne, l’Espagne et à la Belgique parmi les soutiens du programme.

En juin 2011, après avoir soutenu le projet Yasuni depuis sa création, l’Allemagne a décidé de se retirer du projet. Le gouvernement a déclaré que le financement de celui-ci aurait des conséquences non désirées pour Berlin. Quant à la france, son soutien s’est traduit par les apports versés à ce fonds de la part du conseil régional de Rhône-Alpes, du Nord-pas-de Calais, d’Ile de France, du Limousin, et du conseil général de Meurthe-et-Moselle en 2011.


Un projet fragile qui manque de garanties…

Le projet, sans précédents, peine à rassurer les investisseurs éventuels concernant les garanties de non exploitation des ressources. En effet, comment garantir que ces réserves resteront inexploitées indéfiniment ?

Une option de paiement et de garantie est les échanges de la dette contre des certificats de garantie Yasuni. Sur près de 500millions$ de dette que possède l’équateur, le gouvernement échangerait des titres de dette contre des certificats de garantie. L’Espagne est favorable à ce mode de paiement.

De nombreuses ONG et plusieurs contributeurs ont dénoncé la mauvaise gestion de l’équateur, notamment la lenteur du projet ou encore le manque de clarté dans la politique de financement. De plus, les revirements politiques du gouvernement équatorien ont discrédité le projet Yasuni ITT. De plus, certains projets pétroliers continuent de se développer dans la région de Yasuni. De telles politiques contradictoires tendent à affaiblir la crédibilité du projet Yasuni ITT sur la scène internationale. D’après Raphael Billé et Romain Pirard,

« La conservation de la zone se justifie pour de nombreuses et bonnes raisons, mais la financer ainsi est une mauvaise idée : les effets négatifs à terme risquent d’être bien supérieurs aux effets positifs. Il s’agit principalement d’une justification erronée de l’usage des ressources financières mises à disposition et donc de leur dilution, d’un ratage prévisible qui pourrait nuire à d’autres solutions innovantes mais plus constructives, et d’une possible surenchère au chantage écologique ».


Enseignements du projet Yasuni ITT, réplicabilité



Le projet Yasuni pourrait amener d’autres pays à emboiter le pas de l’équateur. Mais la reproduction d’un tel projet soulève quelques inquiétudes, notamment l’idée que l’Arabie Saoudite puisse imiter l’équateur, pesant ainsi significativement sur le cours du pétrole mondial. Il s’agit alors de limiter la reproduction de ce modèle à des pays remplissant les conditions suivantes :


1. Pays en développement.
2. Pays mégadivers. (Situé entre les tropiques du cancer et du capricorne, avec une densité de forêt tropicale importante)
3. Pays ayant des réserves de pétroles significatives dans des régions hautement biodiverses.



De nombreux pays remplissent ces critères : Brésil, Colombie, Costa Rica, République démocratique du Congo, Equateur, Inde, Indonésie, Madagascar, Malaisie, Papouasie Nouvelle Guinée, Pérou, Bolivie, Philippines et Venezuela. Map















Yasuni ITT pose les bases d’un Equateur post-extractiviste. Il est novateur par son caractère social. Les fonds étant principalement destinés au développement économique durable de l’équateur, les politiques pétrolières ayant échoué jusqu’alors.

Le projet Yasuni ITT révèle la montée en puissance d’une nouvelle approche du changement climatique par les pays du Sud. Une approche visant à abandonner les politiques extractivistes au profit d’un développement durable. De plus, le Sud s’est fédéré autour d’objectifs de développement et a su développer des réseaux transnationaux lui permettant de solliciter des alliances internationales.