Un protocole de traitement est un plan précis et détaillé pour le diagnostic d’une pathologie ou pour un régime thérapeutique. Dans le deuxième cas, ces protocoles peuvent être ce qu’on appelle un protocole de soins.
Il s’agit d’un formulaire qui ouvre les droits à la prise en charge à 100%. C’est le médecin traitant qui rédige le protocole de soins, définissant l’ensemble des éléments thérapeutiques et mentionnant les médecins et professionnels de santé paramédicaux qui suivront le patient : c’est le parcours de soins coordonnés. Un autre type de protocole de traitement sont les protocoles de coopération qui sont des documents décrivant les activités ou les actes de soins pouvant être transférés d’un professionnel de la santé à l’autre ou la façon dont les professionnels de la santé vont réorganiser leur mode d’intervention auprès du patient dans le but d’optimiser sa prise en charge.
Les principaux organismes responsables de la mise en place des protocoles de traitement sont la HAS (Haute Autorité de Santé) et les ARS (Agences Régionales de Santé). Une commission spécialisée de la Haute Autorité de Santé est chargée d'établir et de diffuser des recommandations et avis médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescription ou de prise en charge les plus efficientes. Cependant, l’organisation de mise en place des protocoles diffère selon le type de protocoles et le domaine concerné. Ainsi en oncologie c’est la Société Française de lutte contre les Cancers et leucémies de l'Enfant et de l'adolescent (SFCE) qui établit la stratégie thérapeutique devant être mise en place.
Pour les protocoles de coopération, l’article 51 de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » (juillet 2009) permet à des professionnels volontaires d’organiser des délégations d’actes ou d’activités à travers des protocoles validés par la HAS et autorisé dans chaque région par l’ARS. La HAS évalue les protocoles transmis par l’ARS avant leur autorisation (cf. figure ci-dessous).
L’Evidence-Based Medecine c’est-à-dire l’épidémiologie clinique qui s’est progressivement imposée depuis les années 1970 comme la formalisation scientifique objective de la pratique soignante optimale a aussi eu des répercussions importantes au niveau de l’exercice de la médecine. La gestion publique actuelle de la santé dans les pays industrialisés tente d’appliquer des méthodes de gestion issues du monde de l’entreprise privée. L’idée centrale est que l’on peut « rationaliser » le soin. L’organisation du travail dans le monde médical a donc évolué vers la promotion de procédures normalisées.
En France, les gouvernements successifs ont donc peu à peu mis en place des outils d’évaluation et introduit les notions de contrôle qualité ou de qualité totale. C’est ainsi que vont apparaître plusieurs institutions successives : l’ANDEM (Agence Nationale pour le Développement de l‘Evaluation Médicale) de 1989 à 1997, chargée d’un travail de documentation dans le domaine de l’évaluation médicale, puis l’ANAES (Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé) de 1997 à 2004 chargée de l’évaluation et de l’accréditation et enfin la HAS qui est depuis 2004 l’institution héritière des réformes initiées en 1987. Ces agences successives vont donner aux articles scientifiques « Evidence-based », synthétisés sous la forme de recommandations pour la pratique clinique ou de conférence de consensus, le statut d’une formalisation théorique objective de la pratique soignante. L’utilisation de ces recommandations en tant que normes de qualité servira ensuite, à travers la Formation médicale continue et l’Évaluation des pratiques professionnelles, à développer un soin normalisé. Cette normalisation du soin est la garante – pour ses promoteurs – d’un égal accès de la population à un soin considéré conforme aux données acquises de la science. Elle permet d’améliorer la prise en charge et la qualité des soins en optimisant le parcours de santé et de soins. Le but est de favoriser l’évolution de l’exercice et des pratiques professionnelles et l’efficience du système de soins. Cette volonté d’homogénéisation se trouve par ailleurs considérablement renforcée par l’évolution procédurière des rapports entre les soignants et leurs malades.
Cependant, le danger d’une protocolisation excessive est que l’autonomie des cliniciens se réduise à l’application de procédures standards et que la pratique clinique soit soumise à une évaluation permanente de conformité avec lesdits standards.
Le consentement éclairé est une notion incontournable de l’éthique médicale, notamment dans la relation médecin-malade, et forme actuellement la base théorique du pacte éthique qui régit cette dernière. Il consiste à ce que le médecin s’engage de présenter au patient tous les risques des différentes conduites thérapeutiques afin de laisser le choix du traitement au patient. Cette notion est apparue pour la première dans le code de Nuremberg en 1947, en réponse aux expérimentations cliniques menées par les nazis sur les prisonniers lors de la Seconde Guerre Mondiale, dénonçant le scandale d’exploiter des individus dans des recherches risquées sans leur consentement, et restituant juridiquement le droit du patient à l’information claire et complète avant de recevoir un traitement. Le consentement éclairé a été repris par la déclaration d’Helsinki en 1963 de l’association mondiale des médecins (cf. Réglementation des Essais).
Il s’agit donc d’une notion assez récente qui a attendu 1996 pour être introduite dans le sermon d’Hippocrate réactualisé : « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions ». Elle coupe manifestement avec l’ancien modèle de la pratique médicale parfois critiqué comme « paternaliste », où le médecin détenait le savoir et se voulait garant de l’intérêt du malade.
Au-delà des cas classiques traités en médecine, et notamment dans des cas moins évidents où la guérison n’est pas garantie, où les traitements sont risqués et douloureux et où les choix peuvent sembler multiples pour les patients, et encore plus dans les cas où d’éventuels essais cliniques entrent en jeu, la notion du consentement éclairé s’avère cruciale pour assurer l’éthique médicale le long du traitement. C’est une règle typique de l’EBM qui s’est progressivement instaurée comme paradigme de la pratique médicale. Selon Emmanuel Hirsch dans son Traité de Bioéthique, alors qu’une tendance générale depuis les années 1970 préconise de plus en plus de normalisation des protocoles médicaux pour gagner en fiabilité des traitements et établir les règles des Bonnes Pratiques Médicales (BPM) sous l’égide de la Haute Autorité de Santé (HAS), l’expérience quotidienne des praticiens favorisent a priori un enrichissement au niveau de l’interaction avec les patients et une prise de conscience du fait que la norme médicale prend en compte le vécu du patient qui contribue à une autre définition du bon état, plus ou moins originale, qu’Emmanuel Hirsch appelle « silence organique », comme définition nouvelle et plus générale de la santé.
C’est dans ce rapport dialectique entre patient et médecin, et dans le dessein de préserver au mieux les rapports humains et éthiques dans la pratique soignante, surtout dans des cas d’incertitude considérable, que s’inscrit la notion du consentement éclairé qui, par des textes régulateurs, vise à assurer l’absence de toute contrainte éprouvé par le patient. Le médecin se doit donc de ne pas imposer son idée de la santé ou du retour à la normale. Il se doit de recommander ce qu’il estime meilleur à son patient tout en prenant le soin de lui présenter d’autres choix s’ils existent. Ainsi, en acceptant la proposition de son médecin, le consentement est d’un côté libre sans contrainte, et informé d’un autre côté.
Quant à Bernard Debré, il estime que les protocoles sont, compte tenu de toutes les données scientifiques, indispensables en chimiothérapie, comme au traitement de bien d’autres pathologies et met donc le point sur l’interaction entre le médecin et la maladie plutôt que sur l’interaction entre le médecin et le malade. Vu la complexité grandissante des médicaments sophistiqués d’aujourd’hui, l’application des protocoles se justifie, selon lui, d’une part par le fait qu’ils ont déjà prouvé une efficacité contre la pathologie en question, et d’autre part par la possibilité de récolter les données le long de leur application, afin d’évaluer et de faire évoluer ces mêmes protocoles au cours du temps. Ainsi pour Bernard Debré, le paternalisme de la protocolisation, cède à la fiabilité de celle-ci et les chances de progrès qu’elle offre. Cette fiabilité se concrétise, bien entendu, en l’absence de tout biais ou dérive des laboratoires qui fournissent le traitement.
Cependant, Bernard Debré n’exclut pas le hors-protocole, c’est-à-dire toute volonté du médecin à prescrire des traitements moins conventionnels, qu’elle soit animée d’une initiative argumentée du médecin, d’un entendement avec le patient ou d’une volonté commune aux deux. Il reconnait donc qu’il ne faut pas toucher au choix du médecin (cf. Indépendance Professionnelle) ou au choix du patient. Le hors-protocole peut être l’expression des actions compassionnelles ou tout simplement le refus des protocoles par le malade, mais ne doit en aucune manière être interdit. Bernard Debré défend qu’il ne faille pas que le système de protocoles soit rigide et rejoint, quoiqu’avec plus de réserves, l’idée de la dialectique du pouvoir normatif entre médecin et patient dans la pratique médicale.
Les essais cliniques sont le choix thérapeutique qui sollicite le plus le respect de cette notion (cf. Définition et Organisation des Essais). L’information doit être donnée préalablement, à la fois oralement et par écrit, par le médecin responsable de l’essai. Il doit informer le patient du but de l’étude et de la durée, lui exposer les risques et les bénéfices liés à la participation dans l’essai, lui décrire les produits qui seront utilisés, y compris, le cas échéant, le placebo, lui expliciter le principe de la randomisation, lui expliquer que la participation est facultative et que le patient peut interrompre sa participation à tout moment sans que le suivi médical ne soit compromis et les risques augmentés en cas d’arrêt avant le terme de l’étude, ainsi que lui expliquer la confidentialité des données.
Sur ce point-là, les docteurs Gérard et Nicole Delépine critiquent le non-respect du consentement éclairé, systématisé par la politique générale qui dirige actuellement la mise en place des essais cliniques. En effet, selon eux, les essais cliniques sont de plus en plus systématisés, dans le sens où ils sont introduits dans les différents schémas de traitement et sont protocolisés comme tout autre traitement éprouvé, en l’occurrence dans le domaine de la cancérologie des tumeurs solides. Cette confusion, qu’on cache aux patients, en leur présentant l’essai comme la meilleure option possible en exploitant leur vulnérabilité et sans trop insister sur le côté éclairé du consentement à faire signer par eux ou par leurs parents dans le cas de patients enfants ou adolescents, est entretenue par la puissance du lobby de l’industrie pharmaceutique et des laboratoires de recherche, qui nourrit cette puissance par les liens d’intérêts qu’elle sème parmi les médecines investigateurs et les comités d’éthique et de contrôle, de façon à ce que la systématisation aboutit, en facilitant, par une dissimulation des faits, la coopération volontaire des patients et le développement rapide des recherches cliniques.
Dans la même lignée, une étude a été menée sur les formulaires de consentement éclairé, signés par les patients pour pouvoir participer à des essais cliniques randomisés avec un bras placebo (essais préventifs et thérapeutiques). L’étude a porté sur l’ensemble des protocoles de recherche soumis au Comité éthique des recherches humaines de Parc de Salut Mar, responsable de plusieurs centres de santé à Barcelone en Espagne, sur une période de 2007 à 2013. Ces essais cliniques étant en grande majorité dirigés par des laboratoires pharmaceutiques, dont une bonne partie encore est formée d’essais internationaux multicentriques. Pour des raisons pratiques, le placebo est défini comme « une substance inerte habituellement préparée dans le but de paraitre aussi semblable que possible au produit actif testé dans l’essai ». L’étude révèle que dans plusieurs cas, le placebo est absent du formulaire du consentement éclairé ou décrit en apparence ou en effet restrictivement. Les cas où le placebo est décrit en apparence et en effet dépassent à peine la moitié de l’ensemble des cas traités. L’étude conclut que le placebo est généralement décrit de façon peu satisfaisante qui n’évoque ni ses avantages (effet placebo) ni ses inconvénients (effet nocebo), puisque cette description fait entre 4 et 8 mots dans les documents.
L’éthique des essais exige donc un consentement plus éclairé sur la question du placebo, mais cela ne va pas sans soulever une controverse sur le degré de compréhension chez les patients et la lucidité de leurs décisions (certains ne comprennent pas pourquoi on leur administre un placebo, d’autres pourraient refuser de participer par peur rationnelle ou pas dès qu’ils apprennent le vrai mode d’emploi du placebo). Selon l’étude, il reste quand-même vrai que l’acceptation ne correspond pas souvent au degré d’information normatif.
En réponse à ce scepticisme, les docteurs Delépine soutiennent qu’il faut remettre en question la façon actuelle, mécanique selon eux, d’obtenir les consentements des participants aux essais. Ils croient que le patient est en toute mesure de décider de son sort à partir du moment où on lui explique explicitement les choix thérapeutiques qui s’offrent à lui au moment de l’échec ou de l’incertitude sur l’efficacité d’un traitement de référence. Gérard Delépine déclare à haute voix:
Il critique par-là ce qu’il appelle la déshumanisation de la médecine, dans la mesure où elle devient régie par la pensée unique et par les protocoles préétablis et automatisés vis-à-vis des patients. Il invite les médecins à regagner les rapports humains de la pratique médicale qui ne doit compromettre pour aucune raison le soin et la guérison des malades, en leur expliquant en toute transparence les raisons de toute initiative proposée par leurs médecins (cf. Indépendance Professionnelle).
Du côté de Vincent Diebolt, directeur du F-CRIN (French Clinical Research Infrastructure Network), l’avis est moins tranché sur la possibilité d’informer idéalement le patient avant de lui laisser le choix d’être inclus dans les protocoles, notamment ceux des essais cliniques. Néanmoins, l’enjeu éthique peut bien se réaliser même si les patients ne saisissent pas les détails des protocoles de façon parfaite.
Selon Vincent Diebolt, la médecine, à son niveau de progrès actuel, est capables de conduire ses expérimentations dans le respect complet de la conscience humaine et des principes éthiques de la pratique médicale. Certes, les soins se font avec une part de risque omniprésente associée à la complexité irréductible de l’organisme humain, mais cela ne peut dissimuler la grande part de connaissance qui y intervient au même temps. La médecine n’est plus au temps où l’on imaginait une molécule et où elle était testée sans la moindre idée de ce que cela pourrait donner. Il y a plutôt un certain nombre d’impératifs qui font que le praticien, au moment de parler pour la première fois à un patient d’un produit, présentera ce que l’on sait de la molécule et quels effets elle peut potentiellement avoir, et c’est là que réside tout l’intérêt d’avoir cette information et de la donner en une part d’ombre et une part de lumière, afin que la personne puisse décider en toute connaissance de cause. Sur des cas plus critiques, tels que les essais phase 1, dont les patients sont souvent en fin de ressource thérapeutique (phase terminale d’un cancer par exemple), Vincent Diebolt estime que la marge du choix doit être évaluée en terme de chance comme en terme de risque, tout en introduisant bien sûr une réflexion sur la part de douleur et de souffrances physiques et morales associées. Vincent Diebolt achève son compromis éthique en soulignant l’importance d’apprécier en sa participation un grand acte de citoyenneté contribuant aux progrès scientifiques.
La mise en place croissante de protocoles de traitement (voir définition et organisation des protocoles de traitement) est considérée par certains médecins, à l’image du docteur Gérard Delépine, comme une « uniformisation» de la pratique de la médecine. Il s’agit selon lui d’un phénomène récent qui consiste en une « normalisation » des traitements jugée « dramatique » non seulement pour le patient, mais aussi pour la liberté d’exercice du médecin.
De nombreuses institutions publiques (voir Organismes publics de législation, gestion et régulation) se chargent d’établir les méthodes de traitement à mettre en place, à l’image du CeNGEPS dans le domaine oncologique, qui établit une stratégie thérapeutique devant être mise en place pour chaque type de cancer (lymphatique, tumeur au cerveau, leucémie…).
Au sein de leur institut, les médecins se réunissent ensuite en comités selon leur spécialité pour établir la manière dont le traitement préconisé sera appliqué au patient. Cette décision s’inscrit donc dans un cadre prédéfini, avec des consignes de traitement préétablies. Le docteur Gérard Delépine dénonce ainsi une « déshumanisation » de la médecine, qui consisterait désormais à rentrer les données d’un patient dans un ordinateur qui renvoie ensuite le traitement standardisé correspondant à ces données. Cela permettrait de « traiter les patients à la chaîne », sans s’attacher à observer l’évolution de leur maladie et à adapter le traitement.
Sa femme et lui préconisent à l’inverse ce qu’ils appellent une « médecine individualisée », basée sur un suivi jour par jour de l’état du patient et une adaptation en conséquence de la dose de médicaments à administrer (Pour en savoir plus, voir méthode Delépine).
Selon le docteur Gérard Delépine, cette uniformisation des méthodes de traitement est récente, et constitue un obstacle au progrès scientifique et à la liberté de recherche du médecin.
L’uniformisation de protocoles et de méthodes de traitements doit-elle être considérée comme un obstacle au progrès ? Ceci n’est pas l’avis du docteur Sue Caste, qui expose les atouts considérables selon elle d’une standardisation des méthodes d’imagerie de suivi du patient afin de favoriser une collecte générale des données et un dialogue entre médecins de différents instituts :
Certaines innovations technologiques telles que le suivi du patient par cartographie tumorale introduite dans la directive européenne de 2004 permettent donc de renforcer le suivi individualisé du patient, ce qui s’inscrit dans la continuité des bienfaits de la standardisation des protocoles de traitement selon le docteur Caste, car elles permettent notamment aux médecins de dialoguer, d’avoir plus d’informations à leur disposition, et donc plus d’éléments pour réfléchir de manière éclairée au meilleur traitement pour le patient.
La publication des résultats constitue une étape cruciale dans le travail de tout chercheur. C’est sur ce point que sont jugées la qualité de ses recherches et par la même occasion sa crédibilité. Les chercheurs, qui pour la plupart sont affiliés à des laboratoires pharmaceutiques, manipulent des données sensibles concernant leurs patients pendant toute la durée des essais cliniques.
Les laboratoires pharmaceutiques sont légalement obligés de communiquer aux autorités réglementaires les résultats des essais qu’ils ont menés. Une fois que le produit testé a été autorisé à être mis sur le marché (voir rôle de l’ANSM), les données relatives à l’essai clinique réalisé sont transmises à des médecins et sont parfois publiées dans des revues scientifiques et dans des bases de données sur Internet. Certains grands groupes comme Sanofi proposent pour les patients un suivi en ligne des différentes phases de l’essai clinique. Il est dit de façon plus précise sur leur site web que :
Néanmoins, de nos jours, selon certains médecins comme le couple de docteur Delépine, un nombre croissant de chercheurs ont de plus en plus recours à des pratiques jugées peu orthodoxes. En effet, ils traitent leurs chiffres de sorte à toujours publier des articles qui paraissent concluants aux yeux du public. Cette pratique est désignée par le terme d’embellissement des données. Lorsque la modification des résultats correspond à une intention délibérée de modification des chiffres, on parle de fraude scientifique.
Concrètement, l’embellissement des données consiste à publier une étude sous une forme qui diffère de la réalité et dans laquelle il manque des données dans le but de présenter ses résultats sous un aspect plus favorable ou attractif. Selon le docteur Gérard Delépine, cette méthode est particulièrement mise en œuvre pour les grands essais cliniques incluant des milliers de patients, car elle permet de faire accepter de nouveaux médicaments innovants qui rapportent beaucoup d’argent chaque année aux laboratoires :
Selon lui, cela est rendu possible par le monopole qu’exercent les laboratoires sur la mise en place des essais (voir Financement des essais), et donc par le pouvoir que possèdent les laboratoires sur la publication de leurs résultats. Pour y remédier, Martine Piccart, spécialiste du cancer à l’Université libre de Bruxelles, en appelle à une réorganisation de la mise en place des essais passant par une collecte des données des patients de manière indépendante. Le docteur Gérard Delépine préconise également le partage de droit concernant la publication des résultats, ainsi qu’une transparence de la publication assurée par la législation :
Force est donc de constater que dans le domaine médical où la vie de plusieurs personnes est en jeu, certains médecins publient de faux rapports à des fins strictement personnelles liées au prestige et à la reconnaissance.
Bien que des méthodes pour promouvoir la transparence soient progressivement en train d’être mises en place par des organismes de régulation (voir chronologie), il n’existe toujours pas de bases de données communes et publiques imposées aux laboratoires.
Le caractère lacunaire voire faussé de la publication des résultats des essais par les firmes pharmaceutiques est donc un point clé de notre controverse, qui est reconnu et prouvé au sein de la société, mais pour lequel tous les acteurs concernés ne souhaitent pas entrer dans le débat. Ainsi, aucun des laboratoires pharmaceutiques que nous avons contactés en tant qu’étudiants n’a souhaité nous recevoir lors d’un entretien pour répondre à nos questions.