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Evolutions récentes du mutualisme français

Michel Dreyfus, directeur de recherche au CNRS, dans son article « L'histoire de la Mutualité : quatre grands défis »[0] paru dans Les Tribunes de la santé, décrit les mutuelles comme le point de départ de la tradition de collectivisation des risques en France. Leurs principes fondateurs, que sont la liberté, la démocratie, la solidarité et l’indépendance, sont représentés et défendus depuis 1902 par la Mutualité Française. Au même titre que les assurances obéissent au Code des Assurances, les mutuelles sont tenues d’obéir au Code de la Mutualité[1], qui définit leur action comme :

"Une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide, dans les conditions prévues par leurs statuts, afin de contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et à l'amélioration de leurs conditions de vie"

Michel Dreyfus [0]

A l’heure actuelle, elles sont d’après la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), les premiers pourvoyeurs de contrats d’assurance santé, c’est-à-dire de complémentaires santé.

Les mutuelles s’efforcent de respecter leurs principes originels encore aujourd’hui, malgré le changement d’ampleur de leur action, devenue souvent régionale. Le site internet de la Mutualité Française [2] stipule qu’elles n’ont pas le droit de faire de bénéfice, qu’elles restent gérées selon un principe démocratique puisque chaque adhérent peut élire ses représentants. Leur fonctionnement est sévèrement contrôlé en interne et en externe respectivement par la Mutualité française et par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution, l’organe français de supervision de la banque et de l’assurance, qui est rattaché de la Banque de France.

Les mutuelles ont tendance à présenter leur fonctionnement démocratique et le fait qu’elles ne sont pas soumises aux directives d’un actionnariat comme un argument de probité. Ceci ne les empêche pourtant pas de faire l’objet de reproches quant à leur gestion, estimée opaque, ou à leur puissance financière. Outre les procès aux chefs d’accusation variés (licenciement abusif, violation du code de la Mutualité et d’autres) qui ont été perdus par des mutuelles et dissolvent leurs apparentes valeurs de solidarité du mouvement mutualiste[3]. L’Union des Chirurgiens de France, premier syndicat chirurgical français, dénonce la proximité troublante entre les membres des instances dirigeantes de la Mutualité française et de la Matmut, une société d’assurance non soumise au respect du code de la Mutualité. Dans une courte vidéo à caractère satyrique intitulée « Porschez-vous bien ! »[4], publiée par l’UCDF suite au rejet d’une plainte portée contre un de ses membres pour avoir calomnié la Mutualité Française, le syndicat rappelle qu’en 2016 le président de la Matmut Daniel Havis était aussi le vice-président de la Mutualité française, dont le président Etienne Caniard était quant à lui l’un des vice-présidents de la Matmut. Cette intrication entre des organismes aux objectifs supposés très différents laisse la place au doute sur les intérêts véritablement défendus par les Mutuelles.


Références :

[0] Dreyfus Michel (février 2011), L'histoire de la Mutualité : quatre grands défis, Les Tribunes de la santé, n°31, p. 49-54.
[1] (6 mai 2017) Code de la mutualité. legifrance.gouv.fr.
[2] Le site de la Mutualité Française, consulté en mai 2017.
[3] Document anonyme recensant un ensemble d’affaires ayant impliqué des mutuelles françaises, en fournissant des sources pour chaque affaire.
[4] Union des Chirurgiens de France (5 septembre 2014), « Porschez-vous bien ! ». Vidéo polémique, qui met en relief la proximité qui peut exister entre assurances et mutuelles.