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A l'occasion de consultations, qu'il s'agisse de l'USPTO, l'Office des brevets américains, ou des institutions européennes, et par leurs propres campagnes de lobbying, de nombreuses entreprises ont pu s'exprimer sur leur position vis-à-vis des brevets logiciels, et notamment sur le fait que des programmes puissent ou non être considérés comme des inventions brevetables.
IBM est une entreprise multinationale fabricant des ordinateurs et développant des logiciels ainsi que des services autour de ses logiciels. C'est l'une des plus anciennes et des plus importantes au monde, employant plus de 350.000 personnes à travers le monde et possédant une histoire remontant au XIXème siècle. IBM est de plus un acteur important de la recherche scientifique, aussi bien fondamentale qu'appliquée ; trois prix Nobel de physique ont été décernés à des employés d'IBM. De plus, la compagnie est le plus gros détenteur de brevets parmis les entreprises de technologies aux États-Unis.
A l'occasion de consultations qui se sont tenues à San Jose en janvier 1994 pour l'USPTO dans le but de savoir s'il fallait ou non abroger la jurisprudence qui voulait qu'on puisse sur le sol américain breveter des logiciels, un représentant d'IBM a pu s'exprimer sur la position de la compagnie sur ce qu'est une invention dans le domaine du logiciel.
Pour le géant de l'informatique, le but de toute opération de recherche et développement est de gagner un avantage sur ses concurrents, et pour ce faire il est nécessaire que ces derniers ne puissent librement copier le produit de ces travaux pour en bénéficier sans produire aucun investissement. Le logiciel en tant que produit d'un tel processus d'innovation devrait donc pouvoir être protégé par les brevets afin de protéger l'argent investi et d'encourager les entreprises à faire de même. Ainsi, tout produit issu d'une phase de recherche et développement devrait être considéré selon IBM comme une invention brevetable.
L'argumentation est poursuivie en arguant du fait que le logiciel est indissociable du matériel sur lequel il tourne, et qu'il est donc impossible de séparer la notion d'invention entre matériel et immatériel ; ce qui va totalement à l'encontre des positions que défend notamment la FFII aujourd'hui. Pour IBM, le fait que l'on puisse remplacer un appareil matériel par un logiciel est prépondérant dans la redéfinition du concept : les fonctions doivent pouvoir être protégées en tant qu'invention indépendamment du fait qu'elles mettent en oeuvre ou non des forces physiques. De plus, à l'inverse, un logiciel pourrait très bien être transformé en dispositif physique par sa transposition en ensemble de circuits électrique, ce qui rendrait caduques les définitions fondées sur cette séparation.
SAP est un éditeur de logiciels allemand, fondé en 1972 et spécialisé dans les solutions de gestion d'entreprise. C'est actuellement la plus grosse compagnie spécialisée dans l'informatique en Europe, et la quatrième au monde.
A l'occasion des différents débats sur les textes législatifs autour des brevets logiciels en Europe, des représentants de SAP se sont exprimés sur leur conception de ce que doit être une invention brevetable.
Ils confortent essentiellement la vision de Mark Schar lorsque celui-ci affirme que l'OEB devrait se concentrer sur la vision pour laquelle toute solution applicable à un problème doit être une invention brevetable. Pour l'éditeur logiciel allemand, des innovations développées par l'entreprise qui font preuve de leur rentabilité économique, quelles qu'elles soient, doivent pouvoir être couvertes par un brevet.
Lors d'une consultation en l'an 2000, la Commission Européenne a affirmé qu'il existait une "majorité économique" en faveur des brevets logiciels. Plusieurs PME se sont donc regroupés pour exprimer leur opinion, sous le nom de Economic Majority ; ce rassemblement comporte aujourd'hui 1948 entreprises, environ 32000 employés et un chiffre d'affaire de plus de 3 milliards d'euros. Parmis les éditeurs de logiciels concernés se trouvent MySQL, qui produit un des logiciels de base de données les plus utilisés sur les systèmes GNU/Linux, ILOG, qui développe des logiciels d'optimisation de méthodes commerciales, ou encore Opera Software, dont la principale oeuvre est un navigateur Web alternatif utilisé principalement sur les ordinateurs de poche.
Ces entreprises ont décidé de parler d'une voix car elles se retrouvent sur une ligne d'opposition ferme à tout principe de brevet logiciel. Elles argumentent essentiellement sur des points concernant leur activité propre et contre l'application en tant que tel du système des brevets. Cependant elles prennent part au débat qui nous concerne sur un aspect des inventions : elles affirment dans leur majorité qu'il est impossible dans le domaine du logiciel de définir précisément ce qu'est une invention parce qu'on ne parviendrait pas à les délimiter, c'est-à-dire à savoir ce qui dans un logiciel relève de l'invention nouvelle et ce qui a été repris d'autres logiciels existants. Ceci donne une caractérstique propre au développement logiciel également évoqué par les associations : pour mettre en oeuvre une unique idée novatrice, un programme doit utiliser des centaines, voir des milliers d'autres qui ont déjà été employées ; il est alors difficile de définir ce qui relève de l'invention brevetable.