Question de la preuve : les points de débat entre les économistes
Quand on réalise une IA, la première difficulté est de représenter le monde, infiniment complexe, par un jeu fini de paramètres qu’on va chercher à mesurer, relier, ou bien utiliser : on imagine aisément que le set de variables que l’on va considérer ou non joue un rôle important dans les conclusions de l’étude. Ici nous passons en revue quelques-unes de ces variables dont l’utilisation est ou a été débattue.
Le choix des variables
la localisation des sites
L’enquêteur Gaile s’est posé la question de l’impact de la localisation du lieu des sites d’où sont originaires les sujets de l’expérience : selon lui, il s’agit également d’un facteur à débat. De même, une étude de Schuler et Hashemi révèle que la plupart des IMF choisissent un lieu favorable et facilement accessible. Ils nous amènent donc à remarquer le point sensible de cet argument. Les travaux n’explicitent souvent pas pourquoi ils ont situé leur étude dans telle zone, et la raison vient souvent de la facilité à développer un projet économique dans la zone (en comparaison avec une autre zone plus difficile par exemple). La localisation des sites ne fait en général pas partie de l’étude des preuves, l’étude que nous avons analysée étant une exception. Celle-ci fait entrer en jeu le lieu de site, ainsi que les distances séparant les emprunteurs de leur banques.
Le degré de pauvreté des emprunteurs
On avance maintenant de plus en plus souvent l’argument que les emprunteurs d’aujourd’hui sont moins pauvres que ceux d’il y a quelques années. Cette nouvelle variable est à prendre en compte, car partant d’un foyer où les conditions sont meilleures, il semble logique de pouvoir prouver de meilleurs résultats. L’étude de Mustafa et al.' sur l’impact du Programme de Développement Rural de BRAC nous montre qu’un point essentiel de l’étude est la définition même de la pauvreté : laquelle doit-t-on aider par la microfinance ? De leur côté, les welfaristes insistent sur l’approfondissement de l’atteinte des plus pauvres par les IMFs.
La taille des groupes échantillons
La taille des groupes échantillons est aussi un facteur à prendre en compte. Il est souvent conseillé de prendre des échantillons plus importants pour mieux valider les critères. On peut comparer ainsi l’étude de Mustafa (1995) ainsi que celle de Schuler and Hashemi (1994), qui utilisent tous deux des groupes d’échantillon de plus de 1000 personnes, avec celles de Buckley, Hulme (1994 and 1995) et Nelson & Bolnick (1986), qui se sont restreint à une taille de groupe échantillon minimale (mais tout de même raisonnable) : les résultats de cette comparaison sont clairs, et permettent de déterminer une taille de groupe échantillon optimale (environ 500 personnes). Ainsi ce point important a été débattu et il semble qu’un certain consensus se soit installé.
Le sexe de l’emprunteur
Pitt et Khandker ont mené une étude sur l’impact des crédits au Bangladesh : dans celle-ci, ils testent l’impact de trois programmes en fonction du sexe de l’emprunteur, puis ils classent ces derniers par genre et domaine d’activité. Ils dégagent ainsi le fait que le sexe de l’individu comme variable déterminante. Les résultats diffèrent lorsque les prêts sont accordés aux femmes ou aux hommes. En effet, lorsqu’un prêt est accordé à des femmes, on remarque souvent que celle-ci utilisera l’argent gagné dans l’éducation des enfants, une meilleure hygiène du foyer… alors que les hommes auront tendance à dépenser cet argent dans d’autres projets ou en réinvestissant tout dans le même projet.
1.5 Le choix du groupe de contrôle
Parmi les différents modèles de preuves adoptés que nous décrirons plus loin, utilisation est faite de groupes de contrôle.
Le problème ici est de trouver deux populations avec une correspondance maximale sur les plans économiques, physiques et sociaux. Cela est d’autant plus difficile que si certains paramètres sont accessibles (âge, taille de la famille…), d’autres sont mal mesurables (implication dans la vie politique du village, envie de faire un micro-business, importance accordée aux enfants…) et peuvent influencer les résultats.
En particulier, dans les IMF fonctionnant en Village Banking, un problème de self-sélection est dénoncé par certains économistes(1) notamment pour des études au Bangladesh. La self-sélection est le fait que les villageois demandant un prêt l’ont voulu, ou bien ont été sélectionnés par les membres du groupe solidaire. Donc si on regarde les emprunteurs et les non-emprunteurs, il peut y avoir de grandes différences entre ces groupes. Si elles ne sont pas mesurables, le groupe de contrôle est biaisé.
La possible interaction entre groupe de contrôle et groupe test constitue un autre problème : il faut les interactions entre ces deux groupes de population pour empêcher la « contamination » d’un groupe par l’autre (les membres du groupe de contrôle empruntent à des membres du groupe test).
Ainsi cette manière de procéder, rigoureuse en théorie, pose de nombreux problèmes pratiques : il faut pouvoir trouver des populations comparables (donc assez proches géographiquement) tout en limitant leurs contacts… Pour résoudre ces problèmes certains économistes comme E. Duflo défendent une sélection des groupes d’avantage laissée au hasard : c’est une partie du débat autour de la randomisation que nous présenterons avec le modèle scientifique.
Le choix des variables
la localisation des sites
L’enquêteur Gaile s’est posé la question de l’impact de la localisation du lieu des sites d’où sont originaires les sujets de l’expérience : selon lui, il s’agit également d’un facteur à débat. De même, une étude de Schuler et Hashemi révèle que la plupart des IMF choisissent un lieu favorable et facilement accessible. Ils nous amènent donc à remarquer le point sensible de cet argument. Les travaux n’explicitent souvent pas pourquoi ils ont situé leur étude dans telle zone, et la raison vient souvent de la facilité à développer un projet économique dans la zone (en comparaison avec une autre zone plus difficile par exemple). La localisation des sites ne fait en général pas partie de l’étude des preuves, l’étude que nous avons analysée étant une exception. Celle-ci fait entrer en jeu le lieu de site, ainsi que les distances séparant les emprunteurs de leur banques.
Le degré de pauvreté des emprunteurs
On avance maintenant de plus en plus souvent l’argument que les emprunteurs d’aujourd’hui sont moins pauvres que ceux d’il y a quelques années. Cette nouvelle variable est à prendre en compte, car partant d’un foyer où les conditions sont meilleures, il semble logique de pouvoir prouver de meilleurs résultats. L’étude de Mustafa et al.' sur l’impact du Programme de Développement Rural de BRAC nous montre qu’un point essentiel de l’étude est la définition même de la pauvreté : laquelle doit-t-on aider par la microfinance ? De leur côté, les welfaristes insistent sur l’approfondissement de l’atteinte des plus pauvres par les IMFs.
La taille des groupes échantillons
La taille des groupes échantillons est aussi un facteur à prendre en compte. Il est souvent conseillé de prendre des échantillons plus importants pour mieux valider les critères. On peut comparer ainsi l’étude de Mustafa (1995) ainsi que celle de Schuler and Hashemi (1994), qui utilisent tous deux des groupes d’échantillon de plus de 1000 personnes, avec celles de Buckley, Hulme (1994 and 1995) et Nelson & Bolnick (1986), qui se sont restreint à une taille de groupe échantillon minimale (mais tout de même raisonnable) : les résultats de cette comparaison sont clairs, et permettent de déterminer une taille de groupe échantillon optimale (environ 500 personnes). Ainsi ce point important a été débattu et il semble qu’un certain consensus se soit installé.
Le sexe de l’emprunteur
Pitt et Khandker ont mené une étude sur l’impact des crédits au Bangladesh : dans celle-ci, ils testent l’impact de trois programmes en fonction du sexe de l’emprunteur, puis ils classent ces derniers par genre et domaine d’activité. Ils dégagent ainsi le fait que le sexe de l’individu comme variable déterminante. Les résultats diffèrent lorsque les prêts sont accordés aux femmes ou aux hommes. En effet, lorsqu’un prêt est accordé à des femmes, on remarque souvent que celle-ci utilisera l’argent gagné dans l’éducation des enfants, une meilleure hygiène du foyer… alors que les hommes auront tendance à dépenser cet argent dans d’autres projets ou en réinvestissant tout dans le même projet.
1.5 Le choix du groupe de contrôle
Parmi les différents modèles de preuves adoptés que nous décrirons plus loin, utilisation est faite de groupes de contrôle.
Le problème ici est de trouver deux populations avec une correspondance maximale sur les plans économiques, physiques et sociaux. Cela est d’autant plus difficile que si certains paramètres sont accessibles (âge, taille de la famille…), d’autres sont mal mesurables (implication dans la vie politique du village, envie de faire un micro-business, importance accordée aux enfants…) et peuvent influencer les résultats.
En particulier, dans les IMF fonctionnant en Village Banking, un problème de self-sélection est dénoncé par certains économistes(1) notamment pour des études au Bangladesh. La self-sélection est le fait que les villageois demandant un prêt l’ont voulu, ou bien ont été sélectionnés par les membres du groupe solidaire. Donc si on regarde les emprunteurs et les non-emprunteurs, il peut y avoir de grandes différences entre ces groupes. Si elles ne sont pas mesurables, le groupe de contrôle est biaisé.
La possible interaction entre groupe de contrôle et groupe test constitue un autre problème : il faut les interactions entre ces deux groupes de population pour empêcher la « contamination » d’un groupe par l’autre (les membres du groupe de contrôle empruntent à des membres du groupe test).
Ainsi cette manière de procéder, rigoureuse en théorie, pose de nombreux problèmes pratiques : il faut pouvoir trouver des populations comparables (donc assez proches géographiquement) tout en limitant leurs contacts… Pour résoudre ces problèmes certains économistes comme E. Duflo défendent une sélection des groupes d’avantage laissée au hasard : c’est une partie du débat autour de la randomisation que nous présenterons avec le modèle scientifique.
(1 )E. Coleman « The impact of group lending in Northeast
Thailand » et Chen, M., 1992. “Impact of Grameen Bank’s Credit Operations on its Members: Past and Future Research, unpublished mimeo.”
Avec cette page, nous avons pris conscience de l’importance du choix des variables considérées dans l’étude. Nous voyons ainsi que le débat autour de ce qu’est une bonne preuve est multiple, et les points de vue divers. Nous allons maintenant essayer de dégager des grands modèles qui symbolisent chacun une idée cohérente de ce qu’est une bonne preuve en microfinance.