ANSM

ANSM[6]

L'ANSM

En tant qu’agence sanitaire garante de la sécurité des médicaments, l’ANSM est à de multiples reprises impliquée dans la controverse : l’ancienne AFSSAPS du début des années 2000 puis la nouvelle ANSM de 2012 ont en effet financé des recherches sur la maladie, mais l’association E3M critique régulièrement son inaction. C’est pourquoi notre groupe d’élèves a pris contact avec le Dr Caroline Semaille et le Dr Isabelle Parent Du Châtelet, deux médecins de service public, pour comprendre le point de vue de l’Agence.

Le Dr Caroline Semaille

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Le Dr Isabelle Parent Du Châtelet

Le rôle de l'ANSM

Pour comprendre pourquoi l’Agence est si importante dans la controverse, il convient d’abord de s’intéresser à ses attributions.

L’ANSM, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé, anciennement AFSSAPS, constitue la branche française du réseau d’agences sous l’autorité de l’EMA, l’agence sanitaire en charge de l’Union européenne, basée à Londres. Depuis 1995, cette dernière est chargée de l’évaluation scientifique, de la surveillance et de la pharmacovigilance des médicaments développés par des entreprises pharmaceutiques en vue de leur utilisation dans l’UE. L’EMA supervise les agences correspondantes dans chaque pays européens.

EMA[7]

Les vaccins doivent subir un processus très strict d’évaluation avant de pouvoir être commercialisés. L’EMA et les agences sous son autorité ont le pouvoir d’autoriser ou d’interdire un produit pharmaceutique en délivrant ou non une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) : le médicament doit vérifier un cahier des charges très strict. L’AMM s’applique là où est fait la demande; dans toute l’Europe si l’EMA est sollicitée. Cependant, l’ANSM ne s’occupe en aucun cas de la politique vaccinale : elle ne peut prendre aucune décision relative à l’obligation vaccinale, par exemple.

6 des principaux industriels pharmaceutiques [8]

Les médicaments sont produits et développés par un petit nombre d’entreprises privées qui se partagent un marché gigantesque. Néanmoins, les industriels pharmaceutiques ne sont pas libres de vendre ce qu’ils veulent : l’ANSM s’assure qu’ils se plient aux règles. Elle dispose pour cela de moyens de pression : elle a l’autorité pour infliger des sanctions financières. Cependant, l’ANSM ne peut pas obliger un industriel à réaliser des études sur un produit donné.

 

Au niveau national est déployé un réseau de pharmacovigilance, pour surveiller les médicaments et prévenir les risques d’effet indésirable résultant de leur utilisation. Tout le monde peut déclarer un cas à l’un des 31 centres répartis sur le territoire. L’ANSM est impliquée lorsque l’on dénombre beaucoup de cas similaires et qu’on envisage de mettre en place des investigations supplémentaires. Des épidémiologistes mènent alors des recherches grâce aux précieuses données recueillies sur le réseau.

Le rapport à la recherche et le cas de la MFM

En 2002, l’AFSSAPS a financé une étude cas-témoin et a conclu en Mai 2004 que rien ne permettait alors de remettre en question l’usage d’adjuvant aluminique. L’avis des deux médecins suit le consensus scientifique actuel : le terme MFM qualifie une lésion histologique dont le lien avec une quelconque pathologie clinique reste purement hypothétique. Après cette étude, l’Agence avait estimé que le problème n’était plus de son ressort

C’était sans compter sur l’association E3M qui a engagé des grèves de la faim autour de 2014 : les autorités ont été incitées à lever 150 millions d’euros de fonds pour la recherche dans le domaine. L’ANSM a dû payer alors que ce n’est pas son rôle de financer la recherche, nous rappelle les médecins, bien qu’elle s’intéresse de près à toutes les publications scientifiques.

En ce qui concerne le contenu même des études, menées en majorité par le professeur Gherardi, elles ne sont pas concluantes car remplies de biais. Par exemple, les conclusions du Professeur obtenues sur la souris ne sont pas suffisantes pour justifier l’extrapolation à l’homme, car on manque de données.

La polémique autour de la MFM

En analysant les données épidémiologiques, les médecins ont constaté que les moments où la maladie est le plus fréquemment déclarée coïncident avec les campagnes de communication d’E3M ou avec les pics médiatiques sur le sujet. Cet élément, selon elles, permet de faire un parallèle direct avec l’agitation populaire puis judiciaire ayant eu lieu il y a une vingtaine d’années autour du vaccin anti-hépatite B.

Ce vaccin avait été accusé de provoquer la sclérose en plaques, une maladie là aussi auto-immune très grave. Cependant, il a été prouvé que ce lien était fictif. Pour les médecins, les personnes concernées par la sclérose en plaque faisaient partie de la population à risque (les jeunes de 20-30 ans) : il n’y avait aucun lien évident avec le vaccin, si ce n’est que les accusations survenaient dans le cadre d’une campagne vaccinale controversée. La même réflexion peut être menée pour la MFM : il pourrait y avoir des prédispositions génétiques qui feraient survenir les symptômes, indépendamment du vaccin. Si l’on ne peut conclure, c’est parce que les « symptômes sont trop peu spécifiques » : communs à une multitude de maladies auto-immunes, il est difficile d’en trouver l’origine

Les deux médecins nous ont fait part de leur hypothèse quant à l’origine de ces polémiques : les personnes atteintes voudraient peut-être inconsciemment trouver un responsable, et le vaccin est une cible facile. En effet, sans bouc émissaire, comment surmonter une épreuve aussi difficile que celle imposée par les maladies auto-immunes?

Comment faudrait-il faire pour prouver ce que E3M revendique?

Une étude cas-témoins seraient le moyen le plus efficace de trancher la question. Néanmoins, il serait dans le cas de la MFM très difficile d’en mener une.

Tout d’abord, aujourd’hui, le seul moyen de diagnostiquer la MFM est la biopsie. Or, il est clair que l’on ne peut pas réaliser de biopsie sur des patients sains, car l’opération est complexe et bien trop invasive. De plus, il est presque impossible de trouver une population-témoin en France car presque tout le monde est vacciné à l’aluminium : impossible de comparer deux groupes d’individus pour comparer l’effet d’un facteur sur un groupe par rapport à l’autre.

Finalement, il est impossible d’étudier l’impact épidémiologique des vaccins.

Pourquoi ne pas changer d'adjuvant dans les vaccins ?

Les scientifiques possèdent de nombreuses données sur l’aluminium, et le bénéfice a été incontestable. Changer d’adjuvant reviendrait à passer dans l’inconnu, et un autre adjuvant comprendrait lui aussi des risques différents. Il faudrait alors faire de nombreux tests longs et coûteux : mieux vaut investir dans l’amélioration de l’adjuvant à l’aluminium, et développer de nouveaux vaccins, comme pour le VIH.

« Mettre en œuvre la recherche et développement nécessaire à la création d’un nouvel adjuvant, c’est 20 ans. »

L'hésitation vaccinale

L’un des points les plus gênants de la controverse est sa propension à exacerber l’hésitation vaccinale : toutes les polémiques autour du vaccin décourageraient les Français de se faire vacciner, alors que cela est essentiel pour éviter de nombreuses maladies infectieuses. D’ailleurs, nous ont-elles expliqué, à chaque baisse locale de la couverture vaccinale, « c’est le retour des épidémies ».

Les deux médecins étaient très engagées sur la question et nous ont renvoyés à une étude (à trouver ici) financée par l’ANSM et qui a montré que la couverture vaccinale en France baissait de manière inquiétante.

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