Comme déjà vu dans les parties précédentes, une des raisons pour lesquelles la situation avait été traitée en urgence fut le lourd risque que représente la brucellose  sur l’économie des alpages. Derrière ces arguments se cache bien entendu les syndicats agricoles qui font pression afin de protéger son terroir, mais dont d’autres motivations sous-jacentes les poussent à vouloir la disparition du bouquetin dans le Bargy.


Concurrence pour les pâturages

Comme nous l’a expliqué Bernard Marclay dans l’entretien qu’il nous a accordé, il existe des tensions entre agriculteurs et écologistes concernant les animaux sauvages indépendamment de la brucellose. En effet, les hardes de bouquetins peuvent occasionner des dégâts dans les pâturages. Mis à part les dégâts occasionnels qu’ils peuvent infliger aux abreuvoirs ou aux clôtures, ils paissent la même herbe que le bétail et l’écrasent en se déplaçant. Ils exercent donc une pression sur les pâturages, ce qui entraîne une baisse de la qualité de l’herbe. Par conséquent, le rendement agricole des pâturages baisse. Pour les écologistes, il est donc possible que l’abattage de bouquetins atteints de brucellose soit également motivé par un désir de faire baisser la pression exercée par ces animaux sur les pâturages. [1]

Un climat général tendu entre agriculteurs et écologistes

Si l’on prend un peu de recul et que l’on replace cette controverse dans un contexte plus général, on s’aperçoit qu’elle s’inscrit dans une opposition entre syndicats agricoles et associations écologistes à l’échelle nationale. À titre d’exemple, on peut citer l’intervention de Xavier Beulin, président de la FNSEA lors du 69e congrès de ce syndicat en mars dernier, au cours de laquelle il a appelé les dirigeants politiques à ne pas écouter les demandes des associations écologistes car « nous [les agriculteurs] nous sommes les vrais verts ». Il répond ainsi aux accusations portées par les écologistes selon lesquelles les agriculteurs font passer le rendement avant tout, au détriment de l’environnement. Or, pour Xavier Beulin, les agriculteurs, au contact direct de la terre, sont totalement tributaires de  la santé de l’environnement, et sont donc les premiers à s’en soucier, en cherchant à minimiser l’impact des méthodes d’amélioration des rendements. [2] On se trouve donc dans une situation où des opinions radicalement opposées se confrontent sans véritable interaction constructive.


Les pressions des agriculteurs et des chasseurs s’accumulent donc sur les décideurs politiques, qui sont ainsi poussés à agir dans l’urgence. Ils cherchent donc à éviter le plus possible les protestations, et peuvent faire preuve d’une certaine opacité vis à vis de leurs activités concernant la question.


[1] Entretien avec Bernard Marclay. Lien

[2] BERGOT Sophie. Xavier Beulin adresse ses revendications à Manuel Valls. LaFranceAgricole.fr. 26/03/2015

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