Réussir à l’école ne veut pas dire être intelligent… et réciproquement!
Il est important de bien distinguer “réussite scolaire” et “intelligence”. Il arrive que les deux soient confondus, mais les études menées portant souvent sur la corrélation entre la génétique et l’une de ces deux notions, mais presque jamais les deux, car ce sont des concepts différents. Laurent Alexandre illustre d’ailleurs cette différence en donnant l’exemple de Mark Zuckerberg, Steve Jobs ou encore Bill Gates dont l’intelligence ne fait guère de doute mais pourtant ces personnalités n’ont jamais fini leurs études, et ne sont donc pas des exemples de réussite scolaire.
Les articles fournissant des corrélations entre les gènes et la réussite scolaire se basent très souvent sur les notes obtenues aux examens. Par exemple, dans un article publié entre autres par le généticien américain Robert Plomin, on s’intéresse aux scores de GCSE (General Certificate of Secondary Education) comme un chiffre révélateur de la réussite scolaire, car réalisé à l’échelle nationale, et dans des conditions normalisées. Une autre façon de procéder est de s’intéresser au nombres d’années d’études, comme par exemple l’étude Ultra-rare disruptive and damaging mutations influence educational attainment in the general population (2016)
L’intelligence : une notion plus complexe
Etant donné que la notion d’intelligence est beaucoup plus large, il est beaucoup plus difficile de la mesurer afin d’établir une corrélation avec les gènes. De nombreuses définitions ont été proposées, mais beaucoup ont été critiquées. C’est le cas par exemple de celle proposée en 1923 par le psychologue E. G. Boring: “l’intelligence est ce que testent les tests”. Face à la nécessité de trouver une définition adéquate et adaptée aux recherches menées, un groupe de 52 chercheurs ont proposé la suivante: “Intelligence is a very general capability that, among other things, involves the ability to reason, plan, solve problems, think abstractly, comprehend complex ideas, learn quickly and learn from experience. It is not merely book learning, a narrow academic skill, or test taking smarts. Rather, it reflects a broader and deeper capability for comprehending our surroundings—‘catching on’, ‘making sense’ of things, or ‘figuring out’ what to do. Intelligence, so defined, can be measured, and intelligence tests measure it well”. Dans The neuroscience of human intelligence differences (Deary et al., 2010), différentes façons de mesurer l’intelligence sont évoquées comme par exemple le quotient intellectuel, cependant critiqué pour ne pas prendre en compte certaines capacités cognitives, ou bien en mesurant le facteur g (pour general intelligence) introduit par Charles Spearman en 1904, ou encore les tests de Raven qui s’intéressent à différents types de raisonnement et de capacités cognitives. Cependant, ce même article affirme que certains remettent en question les tests utilisés pour mesurer l’intelligence, en affirmant qu’ils pourraient être biaisés et plus adaptés à certains groupes ethniques ou sexe.
Cependant, bien que la réussite scolaire et l’intelligence soient deux notions distinctes, pour beaucoup il existe une corrélation entre les deux. Par exemple, le directeur de recherche Franck Ramus affirme que le quotient intellectuel est le meilleur prédicteur de la réussite scolaire, avec une corrélation entre les deux d’environ 0,6 chez les étudiants français. La généticienne américaine Lee Thompson va même encore plus loin dans son article Associations between cognitive abilities and scholastic achievement : Genetic Overlap but Environmental Differences (). Elle y affirme qu’il y a un recouvrement entre l’influence génétique sur la réussite scolaire et sur les capacités cognitives, avec une corrélation comprise entre 0,57 et 0,85. L’article publié par le Washington Post, How genes influence children’s success in school (Krapohl et al., 2014), prétend cependant que la réussite scolaire, mesurée par les scores de GCSE est plus héritable (voir page sur l’héritabilité) que l’intelligence, d’où selon cette étude l’existence réelle d’une différence entre les deux notions. L’article souligne néanmoins le fait que parmi les différents facteurs mesurés, l’intelligence est le facteur le plus corrélé avec les scores observés.
Dans son rapport au ministre britannique de l’éducation, Dominic Cummings rapporte que l’héritabilité de la réussite scolaire est plus grande que celle de l’intelligence, car l’enseignement est normalisé et gomme en partie les inégalités environnementales.