2005/2007 : Crise chronique de mévente et de surproduction. Les caves coopératives de l'Ouest du Languedoc sont plus durement touchées, les viticulteurs coopérants sont plus touchés, à cause de leur manque de réactivité lié à la structure des coopératives. 8000 emplois seraient menacés dans la viticulture et l'on craint des problèmes sociaux graves dans les villages languedociens frappés par la crise. Les slogans diffusés par le "Collectif de l'Hérault" sont :"On assassine ma vigne, on tue ton pays!" ou encore :"Si ton voisin meurt aujourd'hui, tu mourras demain".
La crise qui frappe actuellement la communauté viticole française ne s'est faite ressentir que récemment bien qu'elle soit latente depuis quelques années (voir frise chronologique).
Les premiers effets n'ont été ressentis par les vini-viticulteur dans le Languedoc-Roussillon que depuis un an ou deux, en fonction du type d'exploitation considérée. Les vignerons indépendants et les coopérateurs ne sont pas affectés de la même manière.
Les vignerons indépendants qui assurent toute la chaine de fabrication du vin, depuis la plantation des vignes jusqu'à la commercialisation du vin fini ont été les premiers touchés. La crise se manifeste principalement par la fermeture de nombreux débouchés et de nombreux marchés depuis l'année dernière. La phase de distribution du produit fini pose problème et les voies habituelles de distribution sont actuellement bouchées pour la plupart des vignerons indépendants du Languedoc-Roussillon.
Les viticulteurs coopérateurs, eux, ne sont touchés par la crise que depuis le début de la campagne 2006-2007. Ce retard d'apparition de la crise est lié au principe de fonctionnement d'une cave coopérative. Les vignerons qui vendent leur raisin à une cave sont rémunérés sur les bases du prix du raisin moyen de l'année précédente, puisqu'il est impossible d'évaluer au moment de la récolte l'évolution du marché du vin. Ainsi la crise a mis un an de plus à se déclarer aux yeux de ces exploitants et devra durer en principe un an de plus pour eux. Pour eux, la crise se résume à la baisse du prix de vente du raisin à la coopérative. Ils n'ont pas un accès direct au problème de commercialisation et de promotion du produit fini.
Cave coopérative utilisant le vieillissement en fût de chêne
La durée et l'intensité de la crise :
La crise ne se distingue pas, pour le moment, des crises précédentes que ce soit du point de vue de l'intensité ou de la durée. Certains (cf interview de M. De Volontat) prévoient une sortie de crise assez rapide avec cependant une forte diminution de l'activité vini-viticole dans le Languedoc-Roussillon à la suite des mesures qu'est en train de prendre l'Union Européenne (voir parties suivantes). Pour d'autres, la crise n'en est qu'à son début et risque d'être ravageuse. Pour tous, elle remet en question l'organisation de la filière vini-viticole dans le midi (et d'une manière générale en France).
La localisation de la crise :
La crise touche de manière disparate différente région de France. Quasiment toutes sont touchées (mis à part quelques particularité locale comme le champagne) mais à différentes échelles et différents degrés. Les grands vins de Bordeaux, comme lors de la plupart des crises, arrivent à poursuivre une activité normale. Au contraire, des régions comme le Languedoc-Roussillon, les côtes du Rhônes ou les pays de la Loire sont frappés de plein fouet.
La crise actuelle n'est à priori pas différentes des crises précédentes par ses symptômes d'un point global (bien qu'il existe des régions qui soont plus fortement touchées que dans les précédentes crises) mais elle l'est par ses causes.
La crise actuelle est remarquable par sa complexité et le nombre de facteur qui sont à même de l'expliquer. Si les causes traditionnelles des crises viticoles jouent encore un rôle dans la crise aujourd'hui, celle-ci se démarque par l'apparition de nouveaux enjeux.
Les causes latentes :
La première des raisons de la crise, qui a été présentes à l'origine de la plupart des problèmes de la filière vini-viticole française, est la baisse de la consommation nationale. Elle décroît de manière régulière depuis les années 70. Le marché national ne permet pas d'absorber la production vinicole française (et elle ne l'a jamais permis) mais sa diminution significative apporte un coup dur pour la filière française.
Cette diminution de la consommation est intrinsèquement liée à une raison plus profonde qui est la baisse de l'intérêt des nouvelles générations pour la filière vini-viticole, autant sur le plan de la production avec la reprise des anciennes exploitations ou simplement au niveau de la consommation. Les vins que se sont traditionnellement vendus et qui bénéficiaient d'un marché fidèle ne le sont plus systématiquement aujourd'hui. On constate aujourd'hui une perte de la tradition viticole accompagné d'une crise identitaire du vignoble languedocien : faut-il continuer à produire du vin en s'appuyant sur la tradition française du vin qui a fait sa force et sa réputation ou est-il temps au contraire de s'adapter à la nouvelle donne du marché du vin?
A ses causes traditionnelles s'ajoutent de nouveaux enjeux, notamment à l'échelle internationale avec la concurrence croissante des nouveaux pays producteurs menés par l'émergence des pays du nouveaux monde (Australie, États-Unis, Chili...) dans le secteur vinicole.
Un vignoble californien
Cette intrusion de nouveaux pays dans la production de vin n'est pas un phénomène récent en soi puisque depuis le milieu des années 80, les vins australiens ont fait leur apparition sur les tables du monde entier. Ces entrées sur le marché sont d'ailleurs en partie responsable des crises qui ont frappé le vignoble français entre 1980 et 2000. Cependant, la crise actuelle fait apparaître des phénomènes inédits lié à cette nouvelle concurrence.
Évolution du marché :
Le marché du vin français est à la fois national et international. On remarque qu'il y a aujourd'hui une évolution de la demande qui ne s'accompagne pas toujours d'une adaptation de l'offre. De nouvelles exigences apparaissent chez les consommateurs, qui ne sont pas toujours en accord avec la tradition vinicole française. Par exemple, une demande croissante en vin peu alcoolisé conservant les qualités gustatives apparaît chez les consommateurs ; C'est un véritable défi pour les viticulteurs car faible alcoolisation et arômes expressifs sont traditionnellement incompatibles.
En outre, on assiste actuellement à une segmentation de plus en plus prononcée du marché du vin. Parler de surproduction globale en mélangeant les différents types de vin n'a plus beaucoup de sens. Certains segments du marché sont beaucoup plus touchés que d'autres et il est pour le moment impossible de connaître, par exemple, les effets de la surproduction de vin de pays sur le marché des AOC. Les marchés qui se développent actuellement font apparaître de nouvelles demandes et de nouvelles catégories de vin que le vignoble français n'est pas habitué à satisfaire. Ceci entraîne un déséquilibre du marché du vin. Certains segments, comme par exemple celui des vins de table sont en surproduction alors que la demande évolue. D'une manière générale, la filière est en surproduction. on a un déséquilibre quantitatif au niveau mondial, européen et national.
Quantitativement :
Bilan: différence de 60MhL auxquels s'joute 25MhL ( des jus et des mouts)
sachant qu'un écart normal est de 35 voire 40 MhL
On obtient un excédent de 20 à 25 MhL
Le vignoble français fait preuve d'un cruel manque d'adaptation au marché : l'offre ne correspond plus toujours à la demande et les nouveaux marchés sont le plus souvent gagnés par les nouveaux pays producteurs qui font preuve de réactivité et qui n'ont pas peur de développer de nouvelles méthodes de production dont notamment des procédés à haut rendement qui concurrence directement la classe des vins de table produit en Languedoc-Roussillon. Face à ces faibles coûts de production, les vigneron français ont du mal à lutter et à s'aligner sur les techniques utilisés dans les pays concurrents. Les nouveaux pays producteurs ont par exemple étendu l'utilisation de méthodes comme l'ajout de copeaux de bois et cela il y a plus de dix ans. Cette méthode permet d'accélérer le vieillissement du vin en lui procurant des arômes qui ne sont traditionnellement transmis que par les fûts de chênes et ainsi d'obtenir des vins très aromatiques à de faibles coûts. Les producteurs français commencent à peine à s'y mettre alors que certaines tendances du marché prévoient un désintéressement pour cette technique et un retour à des méthodes plus traditionnelles. Les exploitations française pêchent par leur manque de réactivité et d'adaptation au marché ;selon certains, elles arrivent souvent avec dix ans de retard.
Copeaux utilisés pour accélérer le vieillissement du vin
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