La décision repose finalement sur le poids relatif donné aux arguments justifiant l’anonymat ou soutenant la levée. En effet, la pertinence de ceux-ci est rarement discutée. Toute la discussion réside dans le choix de l’Etat de faire prévaloir un argument au dessus d’un autre. C’est pourquoi à partir des mêmes constatations, les différents états européens par exemple ont tranché la question différemment [1]. Il est intéressant pour alimenter notre propre controverse d’observer où s’est arrêté le débat de la levée de l’anonymat dans les autres territoires, sous le prisme de mentalités différentes des nôtres.
La Suède est le premier pays à avoir levé l’anonymat du don de gamètes en 1985. Les enfants issus de don de gamètes sont donc libres de faire la demande de l’identité de leur donneur dès 18 ans. Pourtant, d’après l’enquête menée par un professeur à l’institut Karolinska à Stockholm, un seul enfant majeur a fait les démarches pour connaître son donneur en 2000. [2]
L’Allemagne a adopté en 2017, au nom du droit d’accès aux origines, une loi qui permet aux enfants issus de don de gamètes de retrouver leur donneur en en faisant la demande dès leur 16e année. Avant d’avoir atteint cet âge, seuls les parents y ont accès. Les données sont donc centralisées par un registre créé par le Bundestag qui répertorie les donneurs de sperme ainsi que les femmes receveuses. Ces données sont conservées pendant 110 ans. Cette loi a pris effet le 1er juillet 2018.
La Suisse se charge de réunir les informations liées au dons de sperme et de les concilier dans un registre dès 1998. Aussi les enfants nés du don de gamètes peuvent-ils faire la demande d’accès à ces données au nom de la loi de 1992 (concernant la connaissance de ses origines génétiques) dès leur majorité à 18 ans en s’adressant à l’Office fédéral. Ces données vont de l’identité du donneur à son aspect physique, en passant par les résultats des examens qu’on lui a fait passer au moment du don.
Aux Pays-Bas, le registre des informations relatives aux dons de sperme est tenu depuis 2002. Les enfants nés de dons après 2004 ont accès aux données non personnalisantes dès 12 ans, et peuvent faire une demande pour connaître l’identité de leur donneur dès 16 ans. Cependant cette demande se confronte ensuite à la volonté du donneur. Si le donneur manifeste un refus, un cas est ouvert et les arguments des deux parties sont évalués pour aboutir à une décision, souvent en faveur de l’enfant.
En Espagne, l’anonymat du don des gamètes est érigé et maintenu par la loi du 26 mai 2006. Il en était déjà question dans la première loi sur la procréation médicalement assistée de 1988. Il n’en demeure pas moins qu’il est possible d’obtenir des “renseignements d’ordre général sur les donneurs”.
L’Italie présente un cas à part : la loi de 2004 sur la PMA interdit le don de gamètes. Si cependant un enfant venait à naître d’un tel don, il est précisé que le “donneur n’acquiert aucun lien parental avec l’enfant et que ce dernier ne pourrait ni se prévaloir de droit vis à vis du donneur ni se voir imposer des obligations”.
L’éventail des situations quant à l’anonymat du don de gamètes dans ces 6 pays est déjà représentatif de la variété des décisions qui peuvent être prises par les acteurs à qui il en incombe.
Néanmoins, ce ne sont que des exemples non exhaustifs des différents cas que l’on peut rencontrer, les situations sont complexes dans tous les pays et si vous voulez en savoir plus, nous vous invitons à suivre l’état actuel des lois sur le site du sénat.
[1] Sénat, Étude de législation comparée n° 186 – septembre 2008 – L’anonymat du don de gamètes
[2] Antoine JACOB (janvier 2011). La Suède a levé l’anonymat des donneurs de gamètes, La Croix.
[3] http://pmanonyme.asso.fr/?page_id=2279