Des économistes du CEPII, au cours d’un entretien qu’ils nous ont accordé pour discuter de l’impact des subventions agricoles sur le développement des PMA, ont particulièrement attiré notre attention sur l’utilisation des normes sanitaires comme barrière à l’importation des produits du Sud. Si à la suite des discussions qui se tiennent actuellement à l’OMC l’Union Européenne doit réduire ses subventions agricoles, on peut penser qu’elle protégera alors ses agriculteurs en utilisant un autre moyen : celui des normes sanitaire et phytosanitaire. Ces mesures sont particulièrement nuisibles aux PMA car beaucoup d’entre eux ne disposent pas des fonds, de la main-d’œuvre et des l’infrastructures nécessaires pour se conformer aux normes adoptées.
Extrait
d’un article de Antoine Bouët paru dans Economie Internationale, en 2002 (Version intégrale)
La
question des normes techniques, sanitaires, phytosanitaires et
environnementales est devenue
fondamentale. L’Organisation mondiale du commerce autorise l’adoption
d’entraves à l’échange pour des motifs sanitaires ou
environnementaux lorsque la barrière adoptée est non discriminatoire, transparente, qu’elle applique la clause du
“traitement national” (Le
principe du traitement national signifie que les biens importés et les produits
de fabrication locale doivent être traités de manière égale) et à condition que cette décision soit
scientifiquement appuyée.
Résumé d’un article de Gumisai Mutume paru dans la revue Afrique Renouveau, De nouveaux obstacles au commerce de l’Afrique, 2006
Selon des études réalisées par le
Ministère de l’agriculture des Etats-Unis et l’OCDE, en 1996, des barrières
techniques contestables ont été signalées dans 62 pays et ont entraîné, d’après
les estimations, un manque à gagner de 5 milliards de dollars. Le plus souvent,
ces analyses des effets sur le commerce des mesures sanitaires et
phytosanitaires s’intéressent essentiellement aux pays développés, bien que
Bien qu’il faille de toute
évidence des mesures sanitaires et phytosanitaires pour protéger les
consommateurs, les retombées bénéfiques de la libéralisation des échanges dans
le secteur agricole qu’a permise le cycle d’Uruguay “risquent d’être
compromises par le recours à des fins protectionnistes de mesures sanitaires et
phytosanitaires”, prévient Mme Simonetta Zarrilli de
Il existe de nombreux exemples de mesures
sanitaires et phytosanitaires ayant servi à limiter l’entrée de marchandises
africaines sur les marchés étrangers. Pendant plusieurs années à la fin des
années 90, par exemple, les pays européens ont interdit les poissons en
provenance du Kenya, du Mozambique, de l’Ouganda et de
“Certaines des conditions imposées sont justifiées sur le plan de la sécurité alimentaire, note M. Nyangito, un chercheur kényan. Mais de nombreux pays africains ont du mal à répondre aux normes en raison d’obstacles techniques et par manque de moyens.” Selon des études réalisées au Kenya, les exploitants agricoles devraient, pour respecter les normes rigoureuses qu’impose l’Union européenne, multiplier leurs dépenses actuelles par dix. L’Ouganda devrait, quant à lui, dépenser 300 millions de dollars pour moderniser ses usines de conditionnement du miel et les producteurs de café devraient supporter une hausse de 200 % de leur frais.
Le Commissaire européen à la santé et à la protection des consommateurs, David Byrne, reconnaît que “l’on s’imagine que l’UE, ainsi que d’autres pays développés, se servent des normes de sécurité alimentaire à des fins protectionnistes”. Il soutient toutefois que les mesures sanitaires et phytosanitaires appliquées par l’Union n’ont pas pour objet de freiner le commerce mais plutôt de préserver les normes sanitaires de la région. “Je reconnais tout à fait que l’UE impose des critères très élevés en matière de sécurité alimentaire et qu’il est difficile de respecter ces critères, en particulier pour les pays en développement, mais je n’ai pas à m’en excuser.”
Sources :