Construction, projets et retards

Le réacteur de Flamanville n'est pas le premier exemplaire en chantier. En septembre 2005, AREVA a lancé la construction d'un réacteur atomique EPR sur le site d'Olkiluoto au Sud-Ouest de la Finlande, après avoir remporté le marché face à la concurrence étrangère.

Photo du réacteur de Olkiluoto

Site de Olkiluoto en Finlande (source: Internet)

Moins de deux ans plus tard, les Français passent un contrat avec l'Etat chinois pour la construction de deux usines électroatomiques sur le site de Taïshan, dans la province du Guangdong (Sud-Est du pays). Ce qui fait qu'à la mi-2009, 4 chantiers EPR sont en cours de par le monde en comptant celui de Flamanville (voir le calendrier).

Ces derniers contrats ont fait plus ou moins taire à l'époque les critiques sur le potentiel à l'exportation de l'EPR. Ainsi, dans son communiqué du lundi 9 février 2004, le réseau Sortir du Nucléaire écrit « dans un entretien accordé à Enerpresse, publié le mercredi 4 février 2004, le directeur Asie d'EDF Hervé Machenaud fait un aveu de taille : le réacteur EPR n'est pas jugé fiable par les autorités chinoises ; les Chinois nous ont clairement fait savoir qu'ils souhaitaient disposer d'une technologie éprouvée. Ce qui devrait conduire à ne pas proposer une offre EPR. » 11.2 Ces critiques reprendront par la suite, alimentées par de nouveaux événements qui leur permettent de douter légitimement du dévelopement de l'EPR. En effet, les projets et à Olkiluoto et à Flamanville accumulent depuis leur lancement des retards plus ou moins importants : plus de deux ans pour le premier5.1, plus d'un pour le second8.2, 13.20. Ces retards entraînent naturellement un surcoût, d'environ 50% en Finlande comme le cite le journal Les Echos 3.5 portant le coût total aux alentours de 4,5 G€. En France, le gros d'oeuvre a pris plus de temps que prévu. Ces retards font d'ailleurs dire dans les couloirs d'AREVA que les deux usines de Taïshan seront prêtes les premières (malgré le fait que le chantier ait débuté en octobre 2009 !) Ces retards n'étonnent pas les experts. En 2003, pour remporter le contrat en Finlande de la première centrale nucléaire construite depuis la catastrophe de Tchernobyl (1986), les candidats (à savoir les Français, les Américains et les Russes) s'étaient engagés à boucler le chantier en 4 ans. Très vite, il est apparu évident que le calendrier annoncé pour obtenir le contrat était intenable 1.3 . Ce qui nuit à l'image du petit dernier d'AREVA.

S.D. : C'est pas idiot de faire un EPR un peu avant [d'avoir à revouveller le parc] pour se faire la main. Il y a ça, et puis il y a aussi le fait que si on veut en vendre à l'étranger, c'est pas idiot de se faire la main un peu chez soi, pour dire aux autres : « ben vous voyez nous on en achète un ».

V. : Dans cette hypothèse là, le fait d'en avoir fait en Finlande en premier, c'était peut-être une erreur ?

S.D. : Oui, ça, c'était pas terrible. En plus, il y a problème de contrôle commande, ils voulaient du mécanique, alors que c'était du numérique. C'est pas la même chose de se faire la main en Finlande qu'en France.

extrait de l'interview de Sylvain David

Les médias se font naturellement le relais de ces déboires auprès du public (comme l'attestent les références !). Visiblement, ces retards détériorent cette image à tel point que récemment, le duo AREVA - EDF avec la garantie de l'Etat français a essuyé un revers dans ses tractations avec l'émirat d'Abu-Dahbi en se voyant préférer un réacteur coréen, moins puissant et moins cher. 3.6

Un projet tel que la construction d'une nouvelle tranche nucléaire fait travailler plus de 2 000 personnes 7.2 . A Flamanville, le gouvernement a d'ailleurs octroyé le statut de Grand Chantier , ce qui concède aux collectivités locales d'importantes subsides, et favorise certainement l'acceptation du projet. 19.1.4

Si les délais peuvent être considérés comme normaux dans le cas d'une tête de série, ils deviennent plus inquiétants lorsque deux chantiers sont affectés en même temps. Cependant, les avancées du projet de Taïchan (mise en marche prévue pour 2013), et la construction envisagée par le gouvernement de la France d'un autre réacteur EPR à Penly (Seine-Maritime) 13.21 , offrent à l'EPR des solutions de rebond. D'ailleurs, EDF envisage la construction de séries complètes (4) d'usines atomiques de type EPR en Angleterre (grâce au rachat de British Energy), en Italie (Edison), aux Etats-Unis (Constellation)... 19.2.1, 6.1

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