Entretien avec Nicole Alby, présidente d’honneur d’Europa Donna
- Le dépistage a forcément des inconvénients (faux positifs). Lorsqu’une femme est victime d’un faux positif, inévitablement, elle s’inquiète. Et même lorsqu’on lui annonce que finalement elle n’a rien, elle va quand même s’inquiéter et stresser avant les mammographies qui suivent son faux positif.
- Quand on se rend au dépistage organisé, les femmes y vont pour s’entendre dire qu’elles n’ont rien. Du coup, lorsqu’on leur trouve un cancer, cela provoque un choc, car elles ne s’y attendaient pas. Autrefois, alors qu’il y avait peu de dépistage, les femmes s’en rendaient compte elles-mêmes, en sentant des boules dans leurs seins, et en général c’était trop tard pour les soigner correctement. La majorité des cancers était de grosse taille, alors qu’aujourd’hui, grâce au dépistage organisé, il n’y a en grande majorité que de petits cancers, qui se soignent beaucoup plus facilement, et qui souvent, du fait de leur petite taille, ne nécessitent pas qu’on enlève totalement le sein ; diminution du nb de cancers graves de manière drastique.
- C’est un peu une question de solidarité. Le dépistage organisé ne met actuellement pas (ou infiniment peu, si on tient compte des cancers radio-induits, en très petit nombre) en danger la santé des patientes. La question est donc de savoir si l’ensemble des femmes est prêt à se participer au dépistage organisé et à en supporter les inconvénients, pour permettre de sauver l’infime partie des participantes touchées effectivement par un cancer. (elle nous l’a répété plusieurs fois ; d’après elle, c’est le principal problème). Ce n’est pas possible d’exclure tous les inconvénients. Le dépistage organisé a permis d’empêcher beaucoup de femmes d’avoir un cancer grave, et aujourd’hui, 85% des femmes diagnostiquées comme ayant un cancer sont encore vivantes 10 ans après, du fait du dépistage et du traitement tôt de leur cancer, qui n’a pas eu le temps de devenir trop gros. Les patientes sont en général en faveur du dépistage organisé. L’intervalle de 2 ans est optimal. Bien sur, il se peut qu’un cancer se développe très rapidement dans ce laps de temps et devienne dangereux, mais c’est extrêmement rare.
- Concernant l’abaissement à 40 ans, elle pense qu’on y arrivera un jour, mais que pour l’instant ce n’est pas nécessaire, et cela couterait trop cher par rapport aux bénéfices à en tirer. Il vaut mieux insister sur d’autres modes de dépistages, et de mesures. D’après elle, il est essentiel que les femmes se fassent suivre par un gynéco, qui leur fasse passer des examens (mammographies, etc…) en fonction de leurs antécédents familiaux, et qui leur palpe les seins pour sentir s’il n’y a pas d’anomalie. Cette surveillance médicale est nécessaire, mais le problème est que de moins en moins de gynécos sont formés, et qu’ils sont remplacés par les généralistes. Il faudrait donc former davantage les généralistes concernant ce problème (comment bien palper les seins, etc…), les impliquer plus, ce qui n’est pas le cas pour l’instant.
- L’étude danoise ainsi que les campagnes mettant en avant les inconvénients du dépistage organisé font peur, et nuisent à l’efficacité du dépistage. Cela donne une excuse aux femmes peu motivées pour ne pas y aller.
- En France, la situation est globalement bonne : meilleur score de survie au cancer du sein, avec la Suède (problème : elle n’a pas dit quels pays étaient pris en compte).
- Le budget prévisionnel 2011 pour Paris seulement est de 2.330.000 €, ce qui donne une idée du prix que ça coute.
- On ne peut pas prévenir le cancer, juste le soigner du mieux possible, et cela passe par un dépistage tôt.
- Le dépistage et l’invitation envoyée par courrier sont au moins un moyen de rappeler aux femmes que le cancer du sein est une réalité, et qu’il faut se faire dépister. Sans cette invitation par courrier, beaucoup n’iraient que tous les 10 ans, ce qui ne sert quasiment à rien.
- Actuellement, le dépistage organisé offre une certaine assurance qualité, avec la double lecture, etc…Les performances des médecins sont évaluées, et des statistiques sont faites sur le nb de surdiagnostics, d’erreurs de chaque médecin, afin de réctifier le tir.