Il existe un statut juridique pour les œuvres orphelines au Canada depuis 1985, l’existence de telles œuvres n’est évidemment pas un problème nouveau, mais ce problème était à une échelle très restreinte avant l’avènement de l’ère numérique. La mention « DR » était de rigueur, malgré ses insuffisances légales.
Historique juridique :
Ces temps juridiques correspondent-ils à l’exposition de la controverse dans les différents médias et dans les publications ?
Pour répondre à cette question, nous avons recherché l’évolution temporelle des recherches de certains mots-clés dans des bases de données telles que Europresse, Google Scholar etc.
Dans la base de données Europresse, l’équation de recherche « oeuvres orphelines » dans « Titre » renvoie les résultats les plus intéressants. Les articles s’étalent essentiellement de 2008 à 2012. En anglais, l’équation de recherche « orphan work » donne plus de résultats entre 2006 et 2008 que celle en français, on retrouve là un parallèle avec la chronologie juridique (thématique plus vieille aux Etats-Unis). Le pluriel « orphan works » est plus appropriée pour effectuer des recherches que le singulier « orphan work » : la première est en bleu dans ce graphe Google trends, tandis que la seconde est en rouge.
Les résultats d’équations de recherche en français et en anglais dans Google Scholar suivent des chronologies proches, à ceci près que la forte augmentation du nombre de publication sur le sujet a lieu près d’un an plus tôt dans le monde anglophone : il semble donc que les Etats-Unis ou le Royaume Uni aient initié la publication des travaux recensés par Google Scholar.
Il est cependant possible que les variations observées sur ces graphiques soient en réalité dues à des phénomènes plus corrélés au mode de publication qu’au sujet même des œuvres orphelines ; la croissance globale du nombre de documents référencés par Google Scholar peut être par exemple causée par le développement de l’Open Access. La surprenante décroissance entre 2012 et 2013 peut également s’expliquer si le référencement est différé.
Afin de savoir si ces biais sont à considérer, nous avons réalisé la même étude sur un tout autre sujet de recherche, dont la quantité des publications est peu susceptible de varier rapidement, le génome. Si le domaine concerné n’est pas le même, nous pouvons toutefois remarquer que le nombre des résultats correspondant sur Google Scholar à la requête « génome » décroit légèrement sans chuter en 2013, démentant les hypothèses évoquées ci-dessus :
Nous pouvons donc accorder plus de crédit à l’idée selon laquelle les variations de la courbe « œuvres orphelines » traduisent des évolutions propres à la controverse que l’on étudie.
Synthèse des résultats par base de données :
Google Scholar :
La grande majorité des documents recensés est constituée de commentaires d’universitaires portant sur les solutions à apporter aux problèmes des œuvres orphelines.
Ainsi, parmi les 11 résultats (consultés le 17 janvier) datés de 2014, 8 sont ou des thèses ou des articles publiés par des universitaires dans des revues juridiques ou d’informatique (les trois autres étant des bibliographies). Ils émanent principalement des Etats-Unis, mais aussi du Royaume-Uni, du Danemark, du Japon et de Chine, où la controverse commence à émerger.
La recherche « orphan works » retourne 2220 résultats :
Les documents sont alors essentiellement en provenance des Etats-Unis ou de l’Europe.
La recherche « œuvres orphelines » retourne 104 résultats :
Science Direct :
Les résultats correspondant à la recherche « orphan works » varient temporellement comme suit :
Les premiers articles, de 2006 et 2007, analysent le fonctionnement des grands acteurs de l’internet, en particulier Google. A partir de 2008 sont écrits des articles spécifiquement sur le projet de numérisation de livres par Google, et en 2010 débute vraiment l’étude des moyens légaux de s’attaquer aux problèmes des œuvres orphelines. Depuis 2012, l’intérêt porté au sujet semble décroître, le nombre des publications allant dans ce sens.
La quasi-totalité de ces articles est publiée dans des revues juridiques – on y retrouve d’ailleurs une partie des documents référencés par Google Scholar – le reste provenant de revues à destination des photographes. Les seules perspectives européenne et américaine semblent considérées.
Cairn, Dalloz, LexisNexis JurisClasseur :
Les bases Cairn(surtout des articles de presses spécialisées), Dalloz et LexisNexis JurisClasseur fournissent majoritairement des articles commentant la juridiction sur les œuvres orphelines.
Analyse de cette évolution :
Cette analyse traduit donc une évolution de la controverse : les œuvres orphelines sont au cœur du débat de 2006 à 2010, puis la question des livres indisponibles gagne du terrain dans le débat jusqu’à devenir aujourd’hui le cœur du débat ce qui montre une évolution claire dans l’approche des œuvres orphelines. Les acteurs que nous avons pu rencontrer ont tous débutés en nous demandant si nous nous intéressions aux œuvres indisponibles ou aux œuvres orphelines. Cette question est, dans le cas du livre, ce qui anime aujourd’hui en grande partie le débat notamment juridique. Ceci se retrouve dans l’historique qui voit en 2014 une question de constitutionnalité portant non pas sur les œuvres orphelines mais sur les livres indisponibles.
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