Quelles sont les conséquences juridiques concrètes ? . La pression publique nécessaire ainsi que les difficultés rencontrées durant le vote de ce changement (deux refus par le Sénat) montrent à quel point la modification du Code Civil pour les animaux est controversée. Maintenant que le changement a été effectué, la controverse s’est déplacée : comment considérer juridiquement l’actualisation du statut de l’animal ? Est-ce une modification purement symbolique ? Ou est-ce au contraire un point de départ vers l’élaboration de nouvelles procédures juridiques avec retombées concrètes sur le terrain ? . Une avancée juridique saluée par tous les défenseurs des animaux Presque tous les acteurs en faveur d’un droit pour les animaux saluent l’amendement Glavany, en tant qu’il est la reconnaissance de ce pour quoi ils se battent depuis plusieurs années. . Pour certains défenseurs des animaux, un changement essentiellement symbolique Pour certains juristes et avocats, la principale faiblesse de l’amendement Glavany est justement son manque de retombées concrètes sur le terrain. Formulant une évidence – les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité -, il n’apporte aucun élément nouveau au procureur désireux de rendre son jugement, d’autant qu’un arsenal juridique spécifique existait déjà pour défendre les animaux. Le problème se situerait donc là. Ce changement est purement symbolique, en tant qu’il permet de supprimer une absurdité dans le Code Civil et de l’harmoniser au passage avec le Code Rural. On ne verra donc pas d’effet concret de la modification du statut des animaux sans nouvelles lois qui permettront aux avocats d’avoir les armes nécessaires pour protéger les différentes espèces animales des maltraitances et de la souffrance. . Pour d’autres défenseurs des animaux, le point de départ pour l’élaboration de nouvelles procédures D’autres juristes sont plus optimistes sur les retombées juridiques possibles que pourra entrainer le fait que les animaux soient à présent considérés comme des êtres vivants doués de sensibilité. Même si dans l’immédiat, rien ne changera concrètement, il s’agira pour les parlementaires et les avocats d’avoir une démarche active : les premiers en continuant un travail de réflexion traduit en lois sur le droit animal, les seconds en imaginant de nouvelles procédures basées sur cet article. Plus généralement, la plupart des acteurs de la controverse s’accorde sur le fait que le changement de statut des animaux seul n’apportera pas grand-chose pour les animaux. Par contre, c’est pour certains, comme 30 Millions d’amis par exemple, un point de départ, un tremplin vers une nouvelle ère du droit animalier. Séparer les animaux des biens dans le Code civil les rend en effet légitimes à l’obtention de droits propres. Il faut donc continuer à lutter pour que ce changement ne soit pas vain. Mais même sans loi supplémentaire, on commence lentement à voir quelques effets de ce changement. Dans des procès impliquant des animaux, on a vu pour la première fois des avocats utiliser ce nouveau statut d’ « être sensible » (Code Civil, 2015) pour les animaux, capables de ressentir une forme de souffrance, pour les défendre et obtenir gain de cause. Ainsi, des préjudices de douleur pour des animaux ont déjà été établis récemment, après consultation d’un expert pour évaluer la douleur de l’animal. La modification du statut des animaux, en plus de pouvoir conduire à de nouvelles lois, devrait donc également permettre de monter les premiers précédents judiciaires lors de procès impliquant des animaux, ce qui devrait mener à leur multiplication, effet d’autant plus renforcé si de nouvelles lois viennent aider les avocats dans cette optique. . Pour les syndicats agricoles, des ennuis juridiques en perspective pour les éleveurs Paradoxalement, les syndicats agricoles ne sont pas sans minimiser l’apport au droit des animaux que représente l’amendement Glavany. Au contraire, ils soulignent les conséquences potentiellement importantes que pourrait avoir celui-ci, envisageant les procès dans lesquels pourraient se retrouver enlisés les éleveurs. En effet, à partir du moment pour les animaux se voient reconnaitre des droits fondamentaux, alors n’importe quel citoyen pourrait porter plainte pour séquestration, meurtre, voire génocide. . . Références Entretien avec Jean-Marc Neumann, juriste travaillant sur le droit des animaux, réalisé le 10/03/2016 Entretien avec un avocat travaillant pour des associations de défense des animaux, réalisé le 14/01/2016 Quinault Maupoil Tristan, Pour un député UMP, le nouveau statut de l’animal menace l’agriculture, Le Figaro, 17/04/2014 http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/citations/2014/04/17/25002-20140417ARTFIG00034-pour-un-depute-ump-le-nouveau-statut-de-l-animal-menace-l-agriculture.php (Consulté le 03/03/2016) 30 Millions d’amis Statut juridique, les animaux reconnus comme des êtres sensibles. Disponible sur : http://www.30millionsdamis.fr/la-fondation/nos-combats/exiger-un-statut-juridique-de-lanimal/ (Consulté le 18/04/2016) Fondation Brigitte Bardot Statut juridique de l’animal : vers la reconnaissance du caractère d’être sensible des animaux domestiques… et sauvage !, Fondation Brigitte Bardot. Disponible sur : http://www.fondationbrigittebardot.fr/s-informer/statut-juridique-des-animaux (Consulté le 18/04/2016) . . .