Le Conseil Constitutionnel a joué un rôle crucial dans l'évolution de la controverse sur les statistiques ethniques lors de l’élaboration de la Loi relative à l’Immigration. En effet, l’article 63 tendait à permettre, pour la conduite d'études sur la mesure de la diversité des origines, de la discrimination et de l'intégration, et sous réserve d'une autorisation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la réalisation de traitements de données à caractère personnel faisant « apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques » des personnes. Celui ci a été déclaré non conforme à la Constitution.
Dans le Communiqué de Presse du Conseil Constitutionnel apparaissent les motifs de cette annulation.
Le premier motif de cette annulation relève d’une question de procédure. En effet, l’article 63 résulte d’un amendement réalisé à l’Assemblée Nationale par les parlementaires de la CNIL, dans un projet de Loi portant sur l’immigration et l’intégration, l’article n’ayant donc pas de lien direct avec le reste du projet de loi. Il s’agissait d’un « cavalier législatif ».
« En tout état de cause, l'amendement dont est issu l'article 63 était dépourvu de tout lien avec la loi déférée qui ne comportait à l'origine que des dispositions liées à l'entrée et au séjour des étrangers en France. De ce seul fait, l'article 63, ayant été adopté au terme d'une procédure irrégulière, a été annulé. »
Toutefois, le Conseil Constitutionnel n’a pas arrêter là sa réflexion sur l’article. Il a aussi émis sa position par rapport à un futur texte de loi sur les statistiques ethniques :
« Si les traitements nécessaires à la conduite d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration peuvent porter sur des données objectives, ils ne sauraient, sans méconnaître le principe énoncé par l'article 1er de la Constitution, reposer sur l'origine ethnique ou la race. »
L’article 1er de la Constitution est : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. »
Ainsi, l’article 1er de la Constitution semble au premier abord à l’encontre de l’idée de catégorisation de la population et donc de référentiel ethno-racial. Toutefois, comme nous l’a souligné Dominique Schnapper et comme il apparaît clairement dans la précédente déclaration, le Conseil Constitutionnel ne s’oppose pas à la réalisation de statistiques ethniques dans la mesure où aucun référentiel ethno-racial national n’est créé et où les données utilsées sont objectives.
Les statistiques ethniques et leur application ont été freinées par l’annulation de l’article 63, suite à un problème procédurier, mais le Conseil Constitutionnel affiche simultanément sa volonté de dialogue afin de légiférer (positivement) autour des statistiques ethniques.
« D'une part, il a jugé que si les traitements nécessaires à la conduite des études sur la mesure de la diversité des origines peuvent porter sur des données objectives, ils ne sauraient reposer sur l'origine ethnique ou la race. L'article 63 ne prenait pas en compte ce principe énoncé par l'article 1er de la Constitution.»