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Une politique ancree dans les mentalites ?

 

 

Peut-on considérer que la politique de l’enfant unique est ancrée dans les mentalités ? Autrement dit, les Chinois ont-ils oublié leur aversion première pour cette loi et pleinement intégré la limitation à un enfant par couple ?

 

Importance de la dimension culturelle

On ne peut pas réduire le problème posé à la seule dimension culturelle, mais cette dernière tient une place importante dans notre controverse. Il s’avère que notre recherche sur l’acceptation de la politique de l’enfant unique auprès de la population chinoise nous a menés à des informations contradictoires : d’une part selon un premier sondage, la population serait très attachée à cette politique et la suppression officielle de la loi n’aurait probablement pas beaucoup d’effet sur les mœurs. D’autre part, une autre étude révèle que la majorité des femmes chinoises souhaite avoir au moins deux enfants et pensent que les enfants uniques deviennent des enfants pourris gâtés (désignés par le terme de « petits empereurs »).

 


Nous nous sommes ainsi demandé si l’arrêt officiel de la politique de l’enfant unique serait accompagné d'un changement des mentalités sur la conception de la famille en Chine.


 

La peur d'une reprise incontrôlable de la croissance démographique

Selon Jiang Fan, vice-ministre de la Commission du Planning Familial National, que 70% des femmes voudraient avoir au moins deux enfants. La fin de la politique de l’enfant unique entraînerait donc logiquement une hausse du taux de la natalité, ce qui se traduirait par un taux de la croissance démographique, ce que le gouvernement voulait justement limiter. Néanmoins, cette croissance serait-elle si grande que ce à quoi on peut s’attendre ?

 

Selon Isabelle Attané, les comportements démographiques observés ne sont pas directement liés à la politique de l’enfant unique : dans les années 70, le taux de fécondité a chuté, pour se stabiliser dans les années 1980, ce tendrait à suggérer un impact plutôt limité de la politique de l’enfant unique. En réalité, des facteurs socio-économiques prennent le dessus : le prix d’un enfant est très élevé, en particulier en ce qui concerne son éducation, et nombreuses sont les familles qui font le choix de n’avoir qu’un enfant pour être en mesure de subvenir à ses besoins et lui promulguer une éducation de qualité, indépendamment de la politique de l’enfant unique. De ce point de vue, un éventuel arrêt de la politique de l’enfant unique, qui laisserait totale liberté aux ménages quant au nombre d’enfants qu’ils peuvent avoir, n’aurait pas de retombées immédiates sur le taux de natalité. Il faudrait dans un premier temps que le niveau de vie des chinois s’améliore nettement pour qu’ils aient envie d’avoir plusieurs enfants.

 

 

 

 

Le nombre d’enfants souhaité par les femmes chinoise, est variable dans le temps et dans l’espace : comme on peut le voir sur le graphique ci-dessus, les femmes vivant en milieu rural voudraient davantage procréer que celles venant de milieux urbains. Ceci peut notamment s’expliquer par le fait que les travaux aux champs sont un travail rude , demandant beaucoup de temps et d’énergie ; avoir plusieurs enfants pour les aider n’est donc pas négligeable. On remarque que le nombre d’enfants désiré décroît au cours du temps. Cela semble cohérent avec le développement des campagnes de propagande visant à réduire le taux de natalité, ce qui passe par une mise en valeur de l’avortement et des moyens de contraception. Mais l’impact de la politique gouvernementale doit néanmoins être nuancé : des facteurs socio-économiques, notamment le coût croissant de l’éducation, occupent également une place non négligeable dans les mentalités des couples chinois, et conditionnent le nombre d’enfants qu’ils désirent avoir.


Graphique représentant l'évolution du désir d'enfants dans les milieux ruraux et urbains



L’enracinement de la politique de l’enfant unique dans les mentalités est un point délicat : d’une part parce que les données concernant le nombre d’enfants souhaités par les femmes chinoises diffèrent d’une étude à l’autre, mais également parce qu’il est difficile de distinguer le poids respectif de la politique mise en place et des facteurs socio-économiques : avoir un enfant nécessite d’avoir les ressources financières nécessaires pour assouvir ses besoins. Il est probable que la réduction du nombre d’enfants souhaité par couple est due à une combinaison de ces deux facteurs, mais il reste épineux de distinguer la part réelle de chacun.


2012  La politique de l'enfant unique en Chine  globbersthemes joomla templates