Contexte et problématisation

Le DSM-V (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) définit une catégorie assez large appelée Trouble du Spectre Autistique (TSA), qui englobe une partie de ce qui était précédemment (DSM-IV) appelé Troubles Envahissants du Développement (TED), soit le trouble autistique, le syndrome d’Asperger, le trouble envahissant du développement non spécifié. Les TSA se caractérisent par des anomalies dans la communication sociale et les interactions sociales, et des intérêts restreints et comportements répétitifs. On compte aujourd’hui 1 personne touchée par des TSA sur 100, soit 650 000 personnes en France, dont 80% des enfants ne sont pas scolarisés. Cette proportion est considérable. Pourtant, l’autisme est encore mal connu et difficilement pris en charge aujourd’hui.

En fait, le traitement de l’autisme comme la recherche sur l’autisme et ses causes sont récents (une trentaine d’années), le paysage sanitaire est donc encore très flou. Les pistes sur les origines de l’autisme sont nombreuses, développées dans une multitude de publications scientifiques, mais elles sont débattues. Les prises en charge possibles de l’autisme sont diverses et résultent quant à elles de la confrontation entre différentes postures adoptées par parents, scientifiques, et praticiens.

Pourcentage de livres traitant de l'autisme entre 1900 et 2008 (Source : Google Books Ngram Viewer)
Nombre de livres traitant de l’autisme entre 1900 et 2008 (Source : Google Books Ngram Viewer)

Certains scientifiques s’attachent à chercher les causes primaires. Les pistes de recherche s’articulent autour de trois axes : génétique, environnement et facteurs psychanalytiques. Ces trois pôles semblent indépendants et cloisonnés, et leur importance relative fait débat au sein de la communauté scientifique. Cette dernière ne s’accorde pas non plus sur l’utilité de ces travaux dans l’optique du traitement de l’autisme : doit-on faire de la prévention autour des facteurs à risques ? de la thérapie génique ? Mais la question subsiste : est-il vraiment envisageable de s’attaquer directement à ces causes primaires ?

Ces questionnements poussent certains scientifiques à se placer plus en aval, de façon à ignorer l’origine de l’autisme, dont la définition est jugée peu pertinente par les détracteurs de la recherche causale. Une partie de ceux-ci examinent donc pour une part les mécanismes biologiques qui font le lien entre les causes et la manifestation du trouble. Ce niveau intermédiaire semble plus facilement atteignable et plus malléable que l’origine elle-même.

Certains acteurs abordent plutôt la question comme la nécessité d’intégrer les autistes à la société. Les manifestations majeures de l’autisme sont au niveau de l’interaction sociale et sont parfois incompatibles avec la vie sociétale ordinaire. Ainsi, un mode d’action consiste à apaiser les symptômes qui excluent socialement les autistes. C’est par exemple l’idée des comportementalistes, qui utilisent des protocoles relativement normés, ou bien de psychanalystes, qui travaillent avec des méthodes plus individuelles et adaptées à chaque autiste. Cependant, pour les opposants au comportementalisme, cette méthode tend à normaliser l’enfant par un conditionnement qui n’est que superficiel qui masque le trouble. D’autres mouvements encore, comme le courant Neurodiversity, remettent en cause la nécessité même de cette standardisation. Pour eux, la société doit plutôt être à l’écoute de la différence de ces enfants ou adultes, qui ont un fonctionnement neurologique qui leur est propre et qu’il est impensable de leur retirer.

Un des points de débat entre ces acteurs semble être le niveau auquel ils abordent une question multifactorielle aussi complexe. Cette confrontation hétéroclite montre que cette question ne peut pas être aisément tranchée ; nous explorons la controverse à partir des interrogations suivantes :

Dans quelle mesure les différentes approches peuvent-elles fonctionner conjointement ? Les causes doivent-elles fonder la recherche sur l’autisme ? Inversement, en quoi la prise en charge quotidienne des enfants autistes peut-elle orienter la recherche ? Les travaux de recherche scientifique doivent-ils tous avoir pour premier objectif le développement de traitements ? Ces possibles traitements doivent-ils être systématiques ? Vu la complexité de la pathologie, est-ce même possible de développer un traitement ?

Les différents aspects de la controverse

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L’autisme est un trouble que l’on sait multi-causal, mais il n’existe a priori pas de consensus autour des origines précises du trouble. Par conséquent, selon les acteurs intervenant dans ce débat, la hiérarchie des facteurs primaires diffère ; la compatibilité des différents paramètres causaux n’est pas nécessairement accomplie.
Le Triptyque des causes

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Différentes approches existent, s’opposant ou se complétant, pour envisager le problème de l’autisme. Comportementalistes et psychanalystes cherchent à prendre en charge les symptômes des troubles tandis les biologistes et généticiens s’intéressent aux mécanismes d’apparition des troubles autistiques ainsi qu’à leurs éventuelles causes afin de pouvoir proposer des traitements. Le mouvement Neurodiversity milite quant à lui contre l’uniformisation des enfants autistes.
Recherche, traitement et prise en charge