Ainsi, l’ensemble des recherches sur les causes de l’autisme fait émerger ces trois pôles : la culpabilité des parents, la génétique et l’environnement. Ceux-ci évoluent indépendamment les uns des autres et apparaissent relativement cloisonnés, bien qu’ils soient probablement liés. Le premier point de vue est porté par les psychanalystes du XXème siècle mais il est aujourd’hui abandonné, par manque de preuves. Les deux autres sont soutenus respectivement et schématiquement par les généticiens et divers chercheurs en médecine. Aller à la page des acteurs…
Ainsi, les causes énoncées par les premiers psychanalystes ayant parlé d’autisme ne sont plus d’actualité. Aucune nouvelle thèse n’a pris le dessus ; actuellement en psychanalyse il semble que seuls les résultats des méthodes employées méritent du crédit. Par ailleurs évolue la recherche de la combinaison entre génétique et environnement pour le développement de l’autisme.
Aujourd’hui, la plupart des acteurs de la controverse s’accordent sur le fait que génétique et environnement agissent conjointement dans le trouble du spectre autistique. Cependant, la part de l’un et l’autre n’est pas définie et prend plus ou moins d’importance selon les points de vue. En fait, aucune théorie causale génétique ou environnementale spécifique à l’autisme n’est pour l’instant scientifiquement prouvée : ce sont des facteurs influents qui ont été décelés à partir d’études d’échantillons.
Certains scientifiques considèrent davantage l’environnement, comme ceux qui s’attachent à traiter les mécanismes physiologiques en jeu dans l’autisme. C’est notamment l’idée de Y. Ben Ari et E. Lemonnier, de la société Neurochlore, qui accordent peu d’intérêt au rôle des généticiens, dont le travail ne donne selon eux aucune solution concrète à l’autisme. Leurs travaux ne s’attachent d’ailleurs pas au causes primaires de l’autisme (qu’elles soient génétiques ou environnementales), mais bien à un mécanisme (en l’occurrence, lié au niveau de chlore dans le cerveau de l’enfant pendant l’accouchement) par lequel ces causes peuvent déclencher la maladie. Avec ce positionnement, peu importe que l’origine soit génétique ou non.
A l’inverse, L. Mottron, psychiatre et chercheur à l’université de Montréal, affirme que les variations génétiques découvertes comme intervenant dans l’autisme sont avérées, et que les recherches sur les facteurs environnementaux sont moins fiables (mis à part l’acide valproïque qui a donné lieu à un modèle animal), cherchant à développer ce qui reste inexpliqué dans l’origine de l’autisme.
On peut se demander quel est le champ d’application de ces travaux. Pour la génétique, la voie du traitement est sans issue : une thérapie génique est inenvisageable pour l’instant à cause de la trop grande multiplicité des gènes impliqués. En revanche, les recherches dans ce domaine pourraient donner lieu à des critères diagnostics. Par ailleurs, les mécanismes induits par l’environnement semblent être les plus malléables et influençables, en vue de prévenir ou d’apaiser les symptômes autistiques.
“L’environnement agit probablement pour moduler les causes génétiques”
(L. Mottron)
Peut-on envisager ces trois pôles de manière si indépendante, portés par des acteurs qui ne se comprennent pas ? Pas vraiment. Pour M. Mottron (voir son entretien), l’environnement “agit probablement pour moduler les causes génétiques”. Ainsi, les facteurs environnementaux pourraient soit déclencher des mutations de gènes, ou tout au moins en augmenter la prévalence, soit influencer des mécanismes en aval de l’origine génétique.
“Il n’y a aucun doute que la grossesse est la période fragile entre toutes. Que l’environnement se rajoute à la génétique, c’est possible, ou que la pollution ait provoqué des mutations, c’est possible, mais la cause primaire n’est pas la mutation, c’est la pollution”
(Y. Ben Ari)
De la même manière, M. Ben-Ari (voir son entretien) affirme, en prenant l’exemple d’une étude montrant l’influence négative des pesticides sur les femmes enceintes : “il n’y a aucun doute que la grossesse est la période fragile entre toutes. Que l’environnement se rajoute à la génétique, c’est possible, ou que la pollution ait provoqué des mutations, c’est possible, mais la cause primaire n’est pas la mutation, c’est la pollution.”
“Il y a une structure autistique […]. Il y a effectivement une unité qui tient essentiellement à l’investissement du bord. La jouissance est localisée sur le bord ; enfin disons plus simplement que les autistes inventent un objet autistique. […] C’est en s’appuyant dessus qu’on peut avancer. […] Pourquoi ce fonctionnement particulier ? On n’en sait rien”
(J-C. Maleval)
Le lien entre génétique et environnement n’est donc pas nié, au contraire. De plus, même si M. Maleval (lien vers son entretien), psychanalyste, distingue la clinique de la psychologie de celle de la médecine, il défend l’existence d’une unité au sein de l’autisme au-delà de la spécificité de chaque patient : “Il y a une structure autistique […]. Il y a effectivement une unité qui tient essentiellement à l’investissement du bord. La jouissance est localisée sur le bord ; enfin disons plus simplement que les autistes inventent un objet autistique. […] C’est en s’appuyant dessus qu’on peut avancer. […] Pourquoi ce fonctionnement particulier ? On n’en sait rien.” Il encourage par conséquent la recherche sur les voies psychologiques, génétiques et environnementales. La scission des opinions autour de l’autisme s’opère davantage au niveau des conséquences sur les modes d’action, comme il sera plus amplement expliqué dans la deuxième partie De la recherche au traitement.