Qu’est ce que c’est ?
Le terme “immunité de groupe” désigne un phénomène de protection indirecte d’une partie de la population non-immunisée, grâce à la vaccination d’une grande portion de la population. Dans une population largement vaccinée, un départ de maladie aurait beaucoup plus de mal à se propager et donc les rares individus non-immunisés auraient très peu de chance d’être en contact avec la maladie et de la contracter. Ainsi, ils sont indirectement protégés par le fort taux de vaccination dans la population générale.
Comment ça marche ?
Il est parfaitement possible de modéliser l’immunité de groupe mathématiquement, c’est d’ailleurs un sujet qui, par son importance, a constitué la base de plusieurs thèses et continue d’être un sujet de recherche actif 1 . La première mention de “l’immunité de groupe” remonte à 1923 2 , mais les principales avancées remontent aux années 1970, lorsque toute la théorie mathématique fut développée, jusqu’à l’obtention du théorème expliquant son fonctionnement.
Considérons une population et une infection qui est prête à se propager en elle (par exemple un touriste qui revient d’un pays étranger infecté par un bacille ou un virus). Le premier sujet infecté va rencontrer d’autres gens qui ont donc une certaine chance de contracter cette infection. A son tour l’entourage du premier infecté va rencontrer d’autres gens et potentiellement les infecter, etc…
Dans une population non vaccinée ou avec une couverture vaccinale insuffisante, les individus infectés transmettent la maladie à une grande partie de leur entourage et l’infection se répand très vite dans la population. Le nombre d’infectés croît de plus en plus vite, on fait face à une épidémie.
Dans une population où la couverture vaccinale est importante, les individus infectés contaminent très peu leur entourage et l’infection est relativement contenue. Le nombre d’infectés reste faible, on a évité l’épidémie.
Quelles conséquences ?
Une conséquence extrêmement importante de l’immunité de groupe est qu’un fort taux de vaccination profite à toute la population, y compris ceux qui ne sont pas immunisés.
En particulier, certaines personnes ne peuvent pas, pour des raisons médicales, être vaccinées (à cause de fortes allergies ou de systèmes immunitaires déficients par exemple). Celles-ci sont alors protégées indirectement par la forte couverture vaccinale, grâce à l’immunité de groupe. Par ailleurs, il faut également considérer que les vaccins ne sont pas à 100% efficaces 3 : certains individus peuvent être vaccinés mais non immunisés. Ces individus chez qui le vaccin est inefficace sont également protégés par l’immunité de groupe, dans la mesure où le vaccin est suffisamment efficace pour que leur nombre reste limité.
Mais un tel effet est à double tranchant. L’immunité de groupe peut en effet encourager les effets “passager clandestin” 4 : celui qui fait le choix, en ne se vaccinant pas, de ne pas prendre le risque d’un éventuel effet secondaire du vaccin, tout en comptant bien être protégé par ceux qui consentent à prendre ce risque. Au contraire, dans une population où la couverture vaccinale est faible, se faire vacciner bénéficie principalement à l’individu lui-même, et non la communauté, encourageant donc les individus à aller se faire vacciner.
Quelle fraction de la population doit être vaccinée pour que l’immunité de groupe fonctionne ?
La probabilité qu’un certain sujet affecté en contamine un autre non-immunisé dépend de la transmissibilité de la maladie mais aussi de sa contagiosité, elle est par exemple très haute pour la rougeole, facilement transmissible, et plus faible pour la polio 5 . Le seuil du taux vaccinale nécessaire à l’immunité de groupe dépend donc lui aussi de la maladie et de son infectiosité. Plus la maladie est contagieuse, plus ce seuil est élevé. Pour la rougeole, il se situe entre 90 et 95% de couverture vaccinale alors qu’il n’est que de 80-85% pour la polio. Même si le taux est plus faible, il reste très élevé, d’autant que certains individus ne peuvent se faire vacciner 6 .
Applicabilité de la théorie pour les vaccins
Ces différentes protections indirectes constituent, voire avec l’éradication de maladies telles la variole 7 , la base de l’argumentaire gouvernemental justifiant les politiques de santé publique du XXème siècle, fondées sur une forte couverture vaccinale. En effet, au delà de la protection individuelle apportée par la vaccination, l’état se doit de protéger tout le monde, en particulier les plus fragiles et vulnérables.
Cependant d’autres acteurs réfutent l’applicabilité de cette théorie dans la société. Concernant la plupart des maladies concernées par l’extension de l’obligation vaccinale, l’immunité de groupe ne se vérifierait pas scientifiquement ; elle ne serait qu’un pantin brandi par l’administration pour justifier ses politiques de vaccination de masse, sans fondement scientifique aucun 8. L’intérêt de l’administration serait alors d’enrichir des complexes médicaux producteurs de vaccins.
Le 16 octobre 2017, un groupe de médecins généralistes envoie une lettre ouverte aux députés contre le projet d’extension de l’obligation de vaccination des nourrissons 9 , critiquant notamment l’utilisation politique de l’immunité de groupe. Il le considère comme un modèle pertinent pour la rougeole, où le nombre de victimes diminue lorsque le taux de vaccination augmente. En revanche, il l’est beaucoup moins pour les autres maladies. Pour certaines maladies, la transmission ne se fait pas seulement de personne à personne ; c’est le cas du tétanos transmissible à partir de la terre. Ainsi une haute couverture vaccinale ne peut éliminer la maladie ni protéger les individus non vaccinés. De plus, l’intérêt d’une vaccination générale chez les nourrissons est parfois discutable. Pour l’hépatite B, la transmission se fait par voie sexuelle ou par voie sanguine. Ainsi, un enfant n’a que peu de chances de contracter la maladie, réduisant l’intérêt d’une vaccination si tôt. En effet, ces médecins considèrent qu’un vaccin n’est efficace qu’une dizaine d’années. Cette idée ne fait pas l’unanimité ; Alain Fischer et Jean-Hughes Dalle la réfutent tous deux.
La balance bénéfices-risques | Les adjuvants |
- Fine, P., Eames, K., & Heymann, D. L. (2011). “Herd Immunity”: A Rough Guide. Clinical Infectious Diseases, 52(7), 911‑916. https://doi.org/10.1093/cid/cir007
- Topley, W. W. C., & Wilson, G. S. (1923). The Spread of Bacterial Infection. The Problem of Herd-Immunity. The Journal of Hygiene, 21(3), 243‑249.
- Les vaccins sont-ils efficaces ? (2016, 24 mai). Vacc.info. Disponible sur http://www.vaccination-info.be/questions-reponses/questions-generales/les-vaccins-sont-ils-efficaces [Consulté le 19 juin 2018]
- Herd immunity. (2018, 10 mai). In Wikipedia. Disponible sur https://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Herd_immunity&oldid=840549897 [Consulté le 18 juin 2018]
- Pierre M. (2017, 22 novembre). R0 ou R zéro – Rougeole, Ebola… : quel VIRUS est le plus contagieux ? Santé sur le Net. Disponible sur https://www.sante-sur-le-net.com/r0-virus-le-plus-contagieux/ [Consulté le 19 juin 2018]
- Willingham, E. & Helft, L. (2014, 9 mai). What is Herd Immunity? NOVA PBS. Disponible sur http://www.pbs.org/wgbh/nova/body/herd-immunity.html [Consulté le 19 juin 2018]
- Dr Henderson, D. A. (1971, 23 décembre). La variole. World Health Organization (WHO). Disponible sur http://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/67497/WHO_SE_71.28_fre.pdf [Consulté le 17 juin 2018]
- L’immunité de groupe: un fait ou un mythe? (2014, septembre 20). Le blog d’Expovaccins. Disponible sur http://expovaccins.over-blog.com/2014/09/l-immunite-de-groupe-un-fait-ou-un-mythe.html [Consulté le 19 juin 2018]
- Dr Claudina Michal-Teitelbaum, Dr Jean-Claude Grange, Dr Christian Lehmann, Dr Sylvain Fèvre, Dr Jean-Baptiste Blanc, Dr Marc Gourmelon, & Dr Bertrand Stalnikiewicz. (2017, 16 octobre). Lettre ouverte aux députés contre le projet d’extension de l’obligation de vaccination des nourrissons. Lettre ouverte. Disponible sur http://enattendanth5n1.20minutes-blogs.fr/archive/2017/10/16/lettre-ouverte-aux-deputes-contre-le-projet-d-extension-de-l-939223.html ou https://drive.google.com/file/d/0B5uL3qcB-2Z9dVlzdnowMGxoRm8/view?usp=embed_facebook [Consulté le 6 avril 2018]