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« Un bachelier ES est mieux armé pour comprendre le monde qu’un étudiant achevant sa licence d’économie ».
C’est le constat déroutant que fait Louison Cahen-Fourot, étudiant engagé dans le mouvement PEPS (Pour un enseignement pluraliste dans le supérieur), sur l’enseignement de l’économie. Mais il n’est pas le seul. Des collectifs étudiants se sont développés partout dans le monde avec une revendication très simple : l’enseignement universitaire de l’économie doit être pluraliste. Qu’est-ce que cela signifie ? Tout simplement que l’enseignement de l’économie devrait rendre compte de l’ensemble des théories et méthodes économiques qui la traversent. Certaines prônent par exemple l’usage des sciences sociales (sociologie, histoire, anthropologie, géographie), tandis que d’autres privilégient la modélisation mathématique. Le principal reproche fait à l’enseignement de l’économie est qu’il donnerait actuellement beaucoup trop d’importance à une certaine théorie : la théorie néoclassique et ses outils. Toute théorie alternative ou concurrente serait ainsi évincée du cursus.
Néanmoins, la critique va au-delà de l’enseignement, c’est l’ensemble de la discipline qui est visée. Pour les critiques de cet enseignement, la science économique serait gangrenée par une « pensée unique » appelée « orthodoxie« . Toute théorie qui s’en écarte est, pour reprendre la métaphore religieuse, une hérésie. Les hérétiques, parfois accusés de ne plus faire d’économie du tout, ont formé ce qu’ils ont appelé l' »hétérodoxie« .
Mais si la théorie néoclassique domine la science économique, et si elle est prônée par une majorité d’économistes, pourquoi n’aurait-elle pas la légitimité pour dominer également l’enseignement de l’économie ? Pour les hétérodoxes, cette théorie reste fragilisée par ses récurrents échecs à expliquer le monde, n’ayant notamment pas prévu la crise de 2008. C’est pourquoi un bachelier ES serait « mieux armé pour comprendre le monde » qu’un étudiant ayant baigné dans la théorie néoclassique. L’enseignement des sciences économiques et sociales (SES) est en effet réputé plus pluraliste et une partie non négligeable des hétérodoxes s’en revendique.
Le constat est donc le suivant : il existe une école de pensée dominante en économie qui domine aussi son enseignement à l’université. A coté de cela il y a un groupe minoritaire d’économistes qui sont contre cette école de pensée et qui veulent que d’autres théories soient enseignées pour qu’un pluralisme puisse apparaître, prônant d’autres méthodes et une ouverture sur d’autres disciplines proches.
Mais cette volonté de pluralisme, concerne-t-elle juste la capacité de l’enseignement à retranscrire la diversité du spectre scientifique de l’économie ? N’est-elle pas, au-delà de ce seul enseignement, le reflet d’une discipline elle-même en crise ?