Les réacteurs atomiques de génération 4 jouent un grand rôle dans cette controverse dans la mesure où un certain nombre de gens y voient l'avenir du nucléaire.
La génération 4, l'intérêt principal, c'est de consommer 100 fois moins d'uranium que les gén2, gén3. Vous savez peut-être que dans la nature, il y a deux isotopes d'uranium, le 235 et le 238. Le 235 est la seule matière fissile naturelle, mais c'est 0,7% du minerai ; donc en gros, quand vous sortez 1 t d'uranium, vous avez 7 kg que vous pouvez fissionner. Donc vous sortez 993 kg qui servent à rien. C'est pour ça que quand vous faites un cycle en REP ou en EPR, vous mettez 30 t de matière et vous en sortez 29 t. Sur les 30, il n'y en a qu'une qui a fissionné. Il reste 29 t d'uranium. Donc en gros, on consomme moins de 1% du potentiel du minerai, du potentiel total si on compte tout l'uranium. Gén4, c'est exactement utiliser les 99,3% d'uranium 238.
Voilà, c'est le principe de la surgénération. Donc si vous voulez, c'est toujours pareil : d'un point de vue purement économique, si vous tracez le prix du kWh en euros en fonction du prix d'uranium naturel - donc les réacteurs actuels - évidement plus l'uranium est cher plus le kWh est cher. Il faut bien voir que cette pente est très faible. Parce que le prix d'uranium - enfin la part de l'uranium dans le prix du kWh - est extrêmement faible, c'est 2-3%. On considère que le nucléaire, c'est essentiellement de l'investissement, et puis de la construction du réacteur. Donc ça, c'est l'EPR ou le REP ; et le surgénérateur, lui, il est plus cher à l'achat parce que c'est du sodium, c'est plus complexe, mais il consomme 100 fois moins ; donc cette pente qui est déjà faible, elle est 100 fois plus faible, donc à cette échelle... Donc il y a un moment, un prix d'uranium, à partir duquel il est plus rentable de faire du gén4 que du gén3. La philosophie gén4 d'un point de vue économique, c'est ça.
Ah oui, le gén4 c'est des milliers d'années, des dizaines de milliers d'années, parce que le prix n'a plus aucun sens. On en consomme 200 fois moins qu'aujourd'hui, donc ça veut dire qu'au lieu de payer 200 dollars le kg maximum, vous pouvez monter à 4000 dollars, donc on peut extraire l'uranium de l'eau de mer. La discussion n'a plus vraiment d'intérêt, il y a des milliers d'années de réserves avec gén4.
Naturellement, le prix « pivot » à partir duquel il est plus rentable de faire des réacteurs de génération 4 n'est pas connu, dans la mesure où les marges d'erreur sur les courbes de prix sont très importantes. Comme les pentes sont faibles, cela engendre des incertitudes qui ouvrent la porte à toutes les hypothèses.
Le programme Génération 4 a été initié par les USA dans le but de définir les caractéristiques de réacteurs du futur qui pourraient donner lieu à démonstration vers 2030.. Le programme Génération 4 a un caractère international et est désormais porté par les pays suivants : Afrique du Sud, Argentine, Brésil, Canada, Corée du Sud, Grande Bretagne, France, Japon, USA. L'idéal serait de remplir tous ces critères :
Les réacteurs envisagés ne devront pas remplir tous les critères ci-dessus, mais au moins les critères 1, 2, 4 et 7. Ces critères mèlent des questions de sécurité, d'environnement, d'économie,... ce qui montre bien que de nos jours, toutes ces notions sont intriquées et que l'une ne saurait aller sans l'autre.
Les types de réacteurs envisagés sont donnés par la liste suivante, où sont indiqués leurs points forts parmi les 7 critères 18.3:
La génération 4 ne se limite pas à des surgénérateurs, mais ceux-ci en restent les plus représentatifs
En ce sens, l'EPR et plus généralement la génération 3 n'est qu'une étape de transition, comme le croit par exemple l'ancien président de Framatome en 2003 : l'EPR n'est pas un réacteur de recherche que l'on construit pour la beauté de la science [...] Il s'agit d'être sûr qu'en 2015 il y aura à disposition un réacteur fiable et éprouvé qui pourra servir de trait d'union avec la génération 4.
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Actuellement, la génération 4 en France se limite aux deux réacteurs de la centrale de Phoenix dans l'Ain : Phoenix et Superphoenix, ce dernier étant d'ailleurs arrêté depuis plus de dix ans. Un autre est en projet. Ces réacteurs ne sont pas comme l'EPR de Flamanville des têtes de séries, mais seulement des prototypes ; nous ne sommes pas encore en mesure de faire de la génération 4, du moins pas avant de nombreuses années. Par ailleurs, on peut remettre en question le statut « miraculeux » des surgénérateurs pour la production d'électricité.
Le gén4, une fois qu'on l'a chargé en plutonium, il tourne tout seul, on n'a plus besoin de lui en remettre chaque année, on ne met que de l'uranium 238. Il ne fissionne pas mais il vient régénérer le plutonium qui a disparu. Donc il n'y a pas besoin de plutonium, il a juste besoin d'une charge de plutonium au démarrage. Un réacteur de 1 GW électrique sodium rapide, c'est 15 t de plutonium dont il y a besoin au démarrage. Donc 60 réacteurs, c'est en gros 1 000 t. Et aujourd'hui en France dans le MOX usé, on a à peine 200 t de plutonium. Donc vous voyez que dans un scénario où la France déciderait de passer, parce que le nucléaire dans le monde augmente, parce qu'il n'y a plus assez de ressource, parce qu'il faut passer à gén4 - à puissance constante, même pas augmenter la puissance - à 60 GW électriques de réacteur sodium, il lui faut 1000 t de plutonium à un moment donné. Une fois qu'elle les a, il est régénéré donc ça va. Et aujourd'hui, après 30 ans de production de plutonium par les réacteurs actuels, on a 200 t.