La définition du prix du péage urbain (road pricing) peut être vue comme un aspect purement économique puisque cela concerne essentiellement les recettes du péage urbain et bien sûr le prix que vont payer les usagers pour pouvoir emprunter leur véhicule. Au-delà de ça, le prix affecte aussi l’acceptabilité du péage urbain par la population et donc son utilisation. Un prix mal défini ne va pas permettre au péage urbain de remplir ses objectifs de manière optimale, la relation entre l’offre et la demande sera déséquilibrée et les inégalités risquent d’augmenter.
C’est pourquoi la définition du prix du péage urbain est cruciale : ses répercussions touchent à la fois la rentabilité, l’acceptabilité, les inégalités et l’efficacité du projet.
Plusieurs idées existent pour pouvoir avoir le prix le plus pertinent : avoir un prix qui varie en fonction de l’heure ou de la journée, en fonction du type de véhicule, en fonction de la distance parcourue (Autriche, Suisse, Allemagne) ou encore des axes utilisés (Norvège).
Afin de traiter efficacement et de manière juste le problème de définition du prix, des moyens de calculs considérables ont été utilisés mettant en application des modèles mathématiques complexes faisant interagir les différentes classes d’utilisateurs (familles, couples, retraités, nombre de voitures…), les types de routes et les comportements sociaux. Cela permet d’avoir un aperçu de ce que peut être l’acceptabilité et la réponse qu’auront les utilisateurs face à ce péage urbain.
Bien évidemment ce ne sont que des modèles mathématiques, ils se basent sur des hypothèses qui peuvent être discutées, mais cela a le mérite de présenter des tendances de comportement.
Pour que la modélisation mathématique soit la plus riche possible, il faut se rapprocher au maximum de la réalité et donc faire rentrer en jeu un maximum de paramètres. En fonction des études qui ont été réalisées, différents paramètres sont retrouvés :
Les données concernant ces paramètres complexes ont été recueillie par différents moyens. Les instituts de statistiques et de sondages, tels que l’INSSE en France, peuvent fournir des informations utiles à ce genre de recherches. D’autre part des équipes de chercheurs Tina Gehlert, Christiane Kramer, Otto Anker Nielsen, Bernhard Schlag ont réalisé des expériences en grandeur nature à Copenhague au Danemark. En effet ils ont installé des dispositifs dans les véhicules d’utilisateurs volontaires, ces dispositifs permettaient de récolter un grand nombre d’informations utiles au dimensionnement du péage urbain et de son prix.
Remonter en haut de la pageIl faut savoir que l’investissement pour créer un péage urbain dans une métropole telle que Londres, Paris ou Milan est énorme. En effet il faut développer un réseau de grande envergure permettant de reconnaître à distance les voitures. En plus de cela, le coût de fonctionnement reste élevé car il faut assurer la maintenance de tout ce dispositif. Une condition exigée de ces péages urbains est qu’ils soient autonomes économiquement, c’est-à-dire qu’ils ne doivent pas perdre de l’argent au cours de son utilisation.
La définition du prix du péage urbain peut varier en fonction du type de péage urbain et surtout de son objectif. Trois objectifs principaux peuvent être distingués : la diminution du trafic dans la ville, la diminution de la pollution et le financement de transports en commun.
Remonter en haut de la pageLes péages urbains qui visent à diminuer le trafic dans la ville, comme ce qui existe à Londres, doivent transférer les utilisateurs de véhicules individuels dans des transports publics. Pour cela il faut que le prix des transports public soit plus attractif que la voiture. Ou au moins que le prix de la voiture soit tellement élevé que les utilisateurs préfèrent utiliser les transports en commun. Ainsi le prix peut être très élevé, il est actuellement de 8£ par jour à Londres. Certains experts Matthieu Glachant pensent que si le trafic est trop élevé, il faut simplement augmenter le prix pour que les utilisateurs se tournent plus vers les transports en commun.
Les péages urbains qui visent à financer les transports publics ont pour objectif à court terme de générer un maximum de recettes pour pouvoir développer des infrastructures couteuses. Il faut donc trouver un équilibre entre un prix dérisoire que les utilisateurs seront prêts à payer mais qui ne générera que très peu de recettes ; et un prix trop élevé que les usagers ne seront pas prêt à payer. Le problème classique en économie de l’offre et de la demande se pose alors.
Les péages urbains qui visent à réduire la pollution ont une méthode de pricing plus controversée. Si le but est de réduire la pollution dans le centre de la ville, certains pensent qu’il faut faire payer les utilisateurs qui vont dans le centre de la ville pour le préserver de la pollution des voitures. Cependant ce genre de péage à tendance à seulement déplacer le flux d’automobiles en dehors du centre ville, seulement la pollution ne s’arrête pas aux frontières du péage urbain et le centre ville reste très pollué. C’est ce qui est arrivé à Milan, malgré le péage urbain qui avait pour but de réduire la pollution atmosphérique, la ville a du interdire à une grande partie des véhicules de circuler pour ne pas avoir un air trop chargé en particules fines. Cette interdiction a été ressentie comme un échec du péage urbain dans la ville.
Remonter en haut de la pageAprès avoir défini les prix du péage, il faut encore savoir comment les utilisateurs paient. Pour cela il existe plusieurs méthodes :
Les deux méthodes ci-dessus soulèvent le problème de la tarification des résidents dans la zone de péage. Doivent-ils-payer le même tarif que les autres sachant qu’ils sont obligés de circuler dans la zone tarifée ?
Londres a par exemple pris le parti de ne faire payer ses résidents qu’à hauteur de 10% du tarif normal, ce type de réduction entraîne un report des coûts sur les autres utilisateurs. Est-ce bien une solution égalitaire ? Ne soulage-t-elle pas les utilisateurs déjà privilégiés ?
Deux méthodes de pricing s’affrontent pour définir le prix en fonction du temps.
Il faut tout d’abord préciser qu’il n’y a pas de pricing tout fait, ni de formule mathématique pour tous les types de péage urbain. Il faut prendre en compte la morphologie de la ville, ses axes congestionnés et les transports en communs présent. Il est ainsi primordial de bien définir le prix du forfait du péage urbain ainsi que la zone ou l’axe sur lequel s’applique le péage urbain.
Pour cela, des modèles mathématiques complexes sont développés et des modélisations numériques sont réalisées. Ces modélisations prennent en compte le prix du péage urbain, les populations qui circulent ainsi que leur comportement. Les tendances d’acceptabilité et d’utilisation sont alors utilisées. Cela permet de définir un prix qui permet d’optimiser les recettes du péage urbain. Ces recettes doivent être optimisées car le coût d’un péage urbain est très élevé.
Pour évaluer et surtout pour quantifier l’efficacité d’un péage urbain, il faut regarder les données de circulation après son implantation dans la ville. En fonction de l’objectif du péage urbain, les critères d’évaluation ne seront pas les mêmes :
Pour évaluer l’efficacité du péage urbain, on peut monétiser le temps gagné par les usagers pour connaître les bénéfices de l’infrastructure, notamment ce que l’usager gagne en payant le forfait du péage. Les bénéfices pour l’usager sont à la fois le temps gagné, la justesse qu’ils auront dans les prédictions de temps de parcours, mais aussi la diminution du nombre d’accidents de la route. Cela peut mener à ce type de bilan financier :
A travers ces bilans financiers et en faisant varier les prix, zones de tarifications et modes de paiement, il est possible d’optimiser les bénéfices ainsi que l’efficacité du péage urbain. C'est-à-dire à quel point l’objectif premier est rempli sans développer d’inégalités sociales, sans créer de rupture spatiale et/ou économique.
En conclusion, la définition du prix d’un péage urbain peut se schématiser comme sur le graphe ci-dessous, c’est un processus en boucle fermé qui doit s’adapter en permanence à la réponse de ses usagers.
Theodore TSEKERIS et Stefan VOSS. "Design and evaluation of road pricing: state-of-the-art and methodological advances", Netnomics, 2009, n°52, p6-52
Benjamin BUREAU et Matthieu GLACHANT. "Distributional effects of road pricing: Assessment of nine scenarios for Paris, Transportation research, 2008, p996-1008
Charles RAUX, Stephanie SOUCHE, Damien PONS. "The ef ficienc y of congestion charging: Some lessons from costebenefit analyses" Research in Transportation Economicsn°36 , 2012, p85-92