Améliorer la prévention des pandémies

La méthode Gain-of-Function

 

Il est nécessaire de rappeler que le cas du virus de la grippe H5N1 représente un cas particulier de cette méthode. L’ajout d’une fonction néfaste a un intérêt scientifique et sanitaire également, d’où l’entreprise sur H5N1. Le processus consiste à ajouter via une mutation de la structure moléculaire une fonction à une cellule. Ainsi de nombreux cas de mutation OGM résultent de telles expériences, de même que certains médicaments ou vaccins. Le principal argument avancé pour soutenir le maintien des recherches de type GOF est la prévention des risques de pandémie. Cependant, les connaissances scientifiques actuelles ne permettent pas un savoir complet des associations entre mutation et fonction. Il y a donc une dimension d’aléatoire dans la recherche, en virologie et dans d’autres domaines, car il s’agit de choisir dans un flou relatif quelle mutation entreprendre afin d’y associer un gain de fonction.

 

 

L’intérêt de la mutation in vitro du virus de la grippe H5N1

 

Dans le cas de la grippe H5N1, l’enjeu des travaux de Ron Fouchier et Yoshihiro Kawaoka était de prévoir quelle(s) mutation(s) pouvait entraîner l’apparition de la fonction de transmission de furet à furet. En effet cet animal est celui présentant le plus de similarité avec l’homme dans le cadre de la transmission d’un individu à l’autre d’un virus grippal (bien qu’observer une mutation de furêt à furêt ne garantisse pas une transmission d’homme à homme d’une même souche virale; les modèles bien que proches présentent des spécificités). Si la fonction zoonotique (c’est à dire transmissibilité du virus de l’animal à l’être humain) ne peut être découverte sans expérimentation sur des êtres humains, on peut ainsi identifier un virus ayant un potentiel pandémique en cas d’infection d’un humain. Or, si la transmissibilité d’homme à homme du virus de la grippe H5N1 est encore absente à l’état naturel, les cas d’infections d’humain par des animaux (oiseaux et porcs notamment) sont nombreux: on dénombre environ six cent cas d’infections par le virus depuis 2003, et ce dans quinze pays différents.

 

Les travaux de Ron Fouchier et Yoshihiro Kawaoka ont pu permettre d’associer la transmissibilité de furêt à furêt du virus de la grippe H5N1 à la présence dans la souche virale de cinq types d’acides aminés spécifiques. Ainsi, une fois la molécule du virus étudiée, les connaissances acquises permettent d’identifier et de localiser dans la nature les souches virales les plus proches de l’acquisition de la fonction de transmission homme-homme,et de les classer selon le degré de préoccupation jugé nécessaire. Les virus possédant déjà quatre des cinq acides aminés peuvent alors faire l’objet d’une étude spécifique. En travaillant sur un virus précis à la structure génétique connue, on peut ainsi prévoir et préparer une production massive de vaccin si la dernière mutation nécessaire se produisait, rendant dès lors la lutte contre l’épidémie bien plus aisée. Cependant, cet aspect reste à nuancer, car il est impossible dans l’état de garantir que l’acquisition de la dernière acide aminé laisserait un virus encore sensible aux vaccins préparés à l’avance en laboratoire.

 

Existe-t-il des alternatives?

 

Si l’intérêt de la méthode Gain-of-Function est évidente, on note tout de même une forte dimension aléatoire dans la recherche et les études en amont des mutations. Mais c’est surtout face à la question du risque de la détention d’un virus potentiellement pandémique en laboratoire que se sont levées les critiques. Cependant, il ne semble pas y avoir de méthodes alternatives au GOF.

Par exemple, certains opposants aux recherches présentent la méthode inverse du Gain-of-Function comme alternative. Il s’agit naturellement du procédé par Loss Of Function, qui suit une logique inverse: en retirant un tropisme génétique, on observe quelle fonction de la molécule est éventuellement perdue. On pourrait ainsi obtenir un résultat similaire sans se retrouver à manipuler une souche virale dangereuse. Cependant, si le processus est symétriquement inverse, les résultats ne le sont pas. Observer une perte de fonction liée au retrait d’un tropisme ne se traduit pas par une corrélation entre le tropisme et la fonction. Ceci signifie que cette relation n’est pas symétrique, et que l’on ne peut en déduire que le gain du même tropisme sur une molécule différente lui fera acquérir la fonction. L’intérêt pratique de la méthode en est grandement atténué, puisque l’on cherche à identifier quels virus dans la nature seraient en mesure d’acquérir la fonction de transmissibilité d’homme à homme.

 

La présence d’une alternative viable au résultats identiques aurait clôt la controverse sur la méthode GOF immédiatement. En l’absence de celle-ci, les prises de position se définissent d’une manière relativement subjective selon la perception des risques et des gains potentiels.

 

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